mort de jean pierre marielle

L’acteur Jean-Pierre Marielle s’est éteint mercredi 24 avril, à l’âge de 87 ans. Grande figure du cinéma et du théâtre, nous n’entendrons plus sa voix chaude et ce phrasé si particulier qu’il apprit à maîtriser au Conservatoire de Paris.

Jean Pierre Marielle, avec Jean Paul Belmondo et Jean Rochefort, ses copains du Conservatoire de Paris

Facétieux, grave, séducteur, gouailleur, désabusé… Jean-Pierre Marielle était tout cela à la fois. Un acteur qui en imposait à l’écran grâce à sa voix chaude, son élégance et son charme teinté d’humour. Né le 12 avril 1932 à Paris, fils d’un industriel de l’agroalimentaire et d’une mère couturière, il s’est d’abord intéressé à la littérature. Mais il est vite encouragé par un de ses professeurs  à devenir comédien de théâtre. Il se présentera ainsi au Centre d’art dramatique de la rue Blanche et intégrera le Conservatoire national supérieur d’art dramatique à Paris, où il se liera d’amitié avec Jean-Paul Belmondo, Jean Rochefort mais également avec Bruno Cremer, Claude Rich et Françoise Fabian. Il obtient son premier rôle dans « Le mariage forcé » de Molière en 1953. La Comédie française le verra stagiaire mais il préférera les auteurs anglo-saxons tels Harold Pinter et Edward Albee.

Au cinéma, il faudra une bonne dizaine d’années pour celui qui enchaînait alors les seconds rôles avant de pouvoir donner la mesure de son talent dans « Le diable par la queue » (1969) de Philippe de Broca aux côtés d’Yves Montand, où il incarne un libertin grivois.

Claude Berri, George Lautner, Michel Audiard, Henri Verneuil seront parmi les réalisateurs qui le dirigeront. A l’origine d’une filmographie impressionnante – il a joué dans plus de cents films – il aimait passer d’un registre à l’autre , films d’auteur, grand public, comiques ou tragiques, se produisant au cinéma ou dans des téléfilms : « J’ai été dans tous les genres avec des gens qui ont très bon genre » s’amusait-il. Capable de tout jouer, il n’hésitait pas à se glisser dans la peau des méchants, des beaufs, des cyniques ou des sales types : « Pour un acteur, ce n’est pas très intéressant de jouer un type sympa. L’instabilité, le trouble, sont beaucoup plus riches« . Il enchaîne les longs métrages sous la direction de Bertrand Blier, Edouard Molinaro, Jean-Pierre Mocky, Claude Sautet, Bertrand Tavernier, Claude Miller, Patrice Leconte…Tout ce que compte d’immenses metteurs en scène des années 70-80 voudront Marielle dans leurs films.

Il avait la dégaine d’un Anglais, le ton d’un noble français, la gouaille d’un Titi parisien et le je-m’en-foutisme de celui qui est au-dessus de tout (grâce aussi à sa grande taille). En costume veste trois boutons, chapeau borsalino, culotte d’aristocrate avec perruque Régence et bas blancs, le port altier, Jean-Pierre Marielle savait tout porter y ajoutant le ton tour à tour narquois, hautain ou gouailleur qui va avec. Il imposa ainsi sa personnalité, son charisme et ses yeux rieurs à l’écran dans « Les galettes de Pont-Aven », « Week-end à Zuidcoote », « Que la fête commence », « Dupont Lajoie », « Coup de torchon », « Uranus », « Tenue de soirée« …

Mais son rôle le plus stupéfiant dans un film étonnant, sera dans  « Tous les matins du monde«  d’Alain Corneau (1991) où il incarne à jamais Monsieur de Sainte-Colombe, compositeur du XVIIème siècle, face à Gérard Depardieu (et son fils Guillaume) dans le rôle d’un autre compositeur, Marin Marais. Un registre tout en émotion et retenue où vibre comme jamais la viole de gambe. Ce film aura un immense succès malgré un sujet austère, nommé 7 fois aux Césars mais rien pour Marielle qui était pourtant favori «Les Césars, j’en ai rien à foutre ! disait-il.

A la télévision, on le retrouvera dans « La controverse de Valladolid » en 1992, rôle pour lequel il obtient enfin un 7 d’or !  Il donne la réplique à Jean-Louis Trintignant sur un scénario signé Jean-Claude Carrière. Il incarne un chanoine conservateur, Trintignant un dominicain humaniste et doivent juger et admettre que les Amérindiens ont une âme, déterminant ou non de les vendre comme esclaves.

Deux ans plus tard, en 1994,  il obtient un Molière du meilleur comédien pour «Le retour» d’Harold Pinter. Il y aura également « Les Grands ducs », une comédie de Patrice Leconte où ses copains Noiret, Rochefort et lui incarnent des vieillards désargentés qui vont s’offrir un dernier coup d’éclat en sauvant une pièce de théâtre médiocre.

Jean-Pierre Marielle, c’était une voix, un physique, faits pour le théâtre mais heureusement pour nous tous, le cinéma l’a happé et il s’est donné avec tout son talent, sa générosité et son sens de la réplique au plus grand nombre, à une époque où le 7ème art n’a jamais été aussi populaire en France.

Celui qui avait disparu des écrans depuis quelques années a marqué les esprits et restera comme un des plus importants comédiens des années 1960 à 1990. Un artiste que l’on n’oubliera pas resté modeste malgré son succès : « Je ne suis qu’un amateur défrayé  » souriait-il brisant le mythe de la vocation d’acteur: « Je n’ai jamais rien pris au sérieux, je n’ai pas grand-chose à dire et je ne sais pas le dire« . Souhaitons que les comédiens des jeunes générations des écoles de théâtre et de cinéma l’aient très souvent comme exemple.

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