paternel
"Paternel" : Le prêtre Simon (Grégory Gadebois) a la surprise d'apprendre qu'il a un fils de 11 ans, Aloé (Anton Alluin), qui débarque dans sa vie (©Les films du clan/Micro Climat Studios).

Sortie cinéma. Être prêtre et père d’un enfant: c’est la situation délicate dans laquelle se retrouve le personnage principal du film « PATERNEL » (ce mercredi 27 mars sur les écrans), magistralement interprété par Grégory Gadebois.

Dans une petite ville du centre de la France (le film a été tourné à Auxerre), Simon est un prêtre dévoué à sa paroisse, ouvert et bienveillant, qui a la confiance des fidèles et de sa hiérarchie. Au cours d’une messe, Louise (Géraldine Nakache), qu’il n’avait pas revue depuis son séminaire, refait surface, après plusieurs années passées au Canada. Elle lui présente Aloé, un garçon de 11 ans, dont il est le père.

Louise veut que Simon reconnaisse son fils et décide de rester quelque temps. Le prêtre, d’abord perturbé et réticent, s’occupe du garçon, l’installe chez lui, l’emmène au restaurant japonais, le sort le soir écouter de la musique dans un bar, lui fait visiter la sacristie, lui montre les cloches de l’église –un vrai papa poule.

Dilemme

Mais il le fait passer pour son neveu. Ce qui chagrine un peu le gamin: « Pourquoi tout le monde t’appelle «mon père» et moi je peux même pas t’appeler «papa»?… »

C’est le dilemme de Simon: peut-il être un bon prêtre pour ses fidèles, et un bon père pour son enfant? La hiérarchie catholique est-elle prête à accepter sa situation, puisque sa « faute » date d’avant son ordination? Le sacerdoce ou la paternité, va-t-on l’obliger à choisir?…

Premier film

« C’est le passage d’une paternité spirituelle et théorique à une paternité physique et humaine qui m’intéresse. À travers le récit intime du dilemme de Simon, que j’ai souhaité mettre au premier plan, ce sont ensuite toutes les contradictions de l’Église que cette histoire cherche aussi à mettre en avant, comme le défi de modernisation de celle-ci », explique le réalisateur, Ronan Tronchot, dont c’est le premier film après deux courts-métrages en 2012 et 2014 et une dizaine d’années comme monteur de longs-métrages.



Il a grandi dans une famille catholique en Bretagne et dit avoir voulu « faire un film respectueux en mettant en lumière les prêtres dont on parle peu, ceux qui sont dévoués à leur communauté et qui font bien leur travail, tout cela en questionnant les règles de l’Église catholique au XXIème siècle. Est-ce que certaines règles sont encore d’actualité, sont encore applicables aujourd’hui et en phase avec les mœurs actuelles? »

Pas militant

Son film n’est pas militant, ni dans un sens (le respect des traditions) ni dans l’autre (la modernisation de l’Église), même si l’on voit bien, dans la dernière partie, qu’il prend le parti d’un personnage qu’il a rendu sympathique dès le début. Le père Simon est viscéralement attaché à sa vocation de prêtre, mais reste à l’écoute, sans vouloir imposer des règles trop strictes (par exemple quand il est confronté au cas d’une jeune fille de 16 ans qui est tombée enceinte et veut avorter).

Dans ce rôle Grégory Gadebois est remarquable de sobriété, de calme, de sérénité. Souvent utilisé dans des seconds rôles (comme dans POLICE d’Anne Fontaine en 2020, aux côtés de Virginie Efira et Omar Sy), cet acteur à la riche carrière théâtrale avait interprété des premiers rôles dans ANGÈLE ET TONY d’Alix Delaporte en 2010 et MON ÂME PAR TOI GUÉRIE de François Dupeyron en 2013 (qui lui valut une nomination pour le César du meilleur acteur).

Force et douceur

Dans PATERNEL il exprime, avec force et douceur à la fois, l’empathie de son personnage, son humilité qui n’empêche pas la solidité de sa foi, son ouverture d’esprit. Ce n’est que vers la fin qu’il élève le ton, blessé et agacé par certaines réactions de sa hiérarchie –et notamment celle du chef de la congrégation de son diocèse, personnage sans nuances (à peine moins enragé que l’inquisiteur interprété par F. Murray Abraham dans LE NOM DE LA ROSE…) qui tranche un peu avec la délicatesse du film.

Intimiste, humaniste, subtil, à mille lieues des films d’action aux histoires mouvementées et aux effets spéciaux spectaculaires, mais globalement un peu trop sage, PATERNEL invite à la réflexion, bien au-delà des croyants, fidèles ou catholiques pratiquants. Pour son réalisateur, « on sent dans l’Église que, depuis quelque temps, il y a une volonté d’évoluer et de s’inscrire pleinement dans notre époque ».

Et d’ajouter: « Je ne peux qu’être en accord avec l’altruisme, la transparence et l’écoute. C’est tout ce que PATERNEL défend. Et qui sait, peut-être que dans quelques années, la question que pose le film sur la vie privée des prêtres aura trouvé une nouvelle réponse ».

Jean-Michel Comte

LA PHRASE« L’arrivée d’un enfant n’est pas une mauvaise nouvelle en soi » (le père Simon, quand une jeune fille de 16 ans vient lui confesser qu’elle est enceinte).


  • A voir : « PATERNEL » (France, 1h33). Réalisation: Ronan Tronchot. Avec Grégory Gadebois, Géraldine Nakache, Lyes Salem (Sortie 27 mars 2024)

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