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Exposition Barbara à la Philharmonie par Victor Hache. La Philharmonie rend hommage à la légendaire chanteuse au travers d’une magnifique exposition traçant un portrait très vivant de la longue dame brune dont on commémore les 20 ans de la disparition.

 

Bien plus qu’un hommage, l’exposition « Barbara » offre un portrait éminemment sensible de la chanteuse, vingt ans après sa disparition à l’âge de 67 ans. Un regard à l’opposé de l’image teintée de mystère que l’on garde trop souvent de la longue dame brune aux chansons emplies de mélancolie. Barbara n’aimait pas que l’on voie en elle une femme sombre et mystérieuse : « Le mystère, c’est ce que les autres ont voulu que je sois », confia-t-elle à Denise Glaser dans sa célèbre émission Discorama, qui contribua à faire mieux connaître la chanteuse. Pour sa première exposition sur une artiste femme, la Philharmonie a choisi de tracer un portrait très vivant de Barbara, démarche souhaitée par sa commissaire, Clémentine Deroudille, à l’origine de la rétrospective en 2011 « Brassens ou la liberté », avec la complicité de Bernard Serf, neveu de la chanteuse. Derrière le mythe, on découvre ainsi la femme, ses peurs, ses joies, ses rêves et le quotidien de l’artiste qui décida un jour que la scène et les décors de music-hall guideraient son existence : « La scène porte à son paroxysme toutes les émotions, disait-elle. Tout est multiplié, électrisé, tu es seule à assumer tes erreurs et celles des autres, tout est ultrarapide, intense, tu es hors de toi, sortie de toi. » Née le 9 juin 1930 à Paris (17e), la petite fille juive Monique Serf connaît une enfance brisée, marquée par la guerre, la menace des rafles, les déménagements successifs, la blessure de l’inceste évoquée en filigrane de son autobiographie posthume parue en 1998, Il était un piano noir. À 20 ans, Barbara rêve d’ailleurs et s’installe à Bruxelles, où elle fait des débuts maladroits sous le pseudonyme de Barbara Brody, inspiré du nom de sa grand-mère Brodsky. La jeune femme, qui s’est promis d’être une « pianiste chantante », trouva dans la musique une manière d’exister en partageant au travers de ses chansons ce qu’elle ressentait de la vie. Au fil du parcours, on entend le vibrato de sa voix et les paroles émouvantes de Dis, quand reviendras-tu ?, Göttingen, Nantes, l’Aigle noir… tout en plongeant dans les riches archives, photos, vidéos et documents sonores présentés.

L’une des premières femmes auteures-compositrices-interprètes

De retour à Paris, elle se produit dans les petites salles de la rive gauche, devenant « la chanteuse de minuit » en 1958, au cabaret l’Écluse, dont on a restitué le décor où résonnent la voix et les images de la jeune Barbara s’accompagnant au piano. Après des débuts difficiles à Bruxelles, où elle a pour toute rémunération un « sandwich et un verre de vin rouge », elle est bien décidée à inventer sa vie. Elle compose ses « petits zinzins », comme elle appelle ses chansons enregistrées sur des cassettes, griffonnant ses premiers textes. À force de volonté, de travail et de talent, elle parvient à s’imposer comme l’une des premières femmes auteures-compositrices-interprètes, devenant une artiste incontournable. Entre deux concerts, elle mène une existence simple, faite de jardinage, de promenades avec ses chiens, de tricot à Précy-sur-Marne, maison où elle aimait se réfugier. La voici à Bobino en 1964, où elle triomphe et révèle Göttingen, bouleversant le public envoûté par celle qui allait devenir une figure mythique de la chanson française. Elle n’aimait pas son physique, alors elle construit son image avec la complicité de photographes qui avaient su gagner sa confiance, l’immortalisant sur scène ou dans la vie de tours les jours, de Just Jaeckin à Marcel Imsand, Jean-Pierre Leloir, Tony Frank, Jo Cayet ou Georges Dudognon. Longue robe noire, yeux maquillés, sa silhouette devient sa signature en pleine ère yé-yé. Elle est maintenant une icône que tout le monde veut voir sur scène. Aux côtés de l’accordéoniste Roland Romanelli, son fidèle accompagnateur pendant vingt ans, elle remplit les plus grandes salles. Mais elle rêve de liberté et, en 1969, elle annonce qu’elle arrête les tours de chant traditionnels. Une période d’aventures et d’expériences où elle s’essaie au théâtre et au cinéma avec Jacques Brel (Franz), Jean-Claude Brialy (l’Oiseau rare) ou Maurice Béjart (Je suis né à Venise). Et puis, il y aura les légendaires concerts en 1981, donnés sous chapiteau à Porte de Pantin, où elle rassemble 60 000 spectateurs durant 25 représentations, la comédie musicale Lily passion, au Zénith, avec Gérard Depardieu. Elle chantera aussi au Théâtre du Châtelet, à New York, Tokyo… Partout, ce n’est que torrent d’émotion, le public ne quittant la salle qu’après de longs adieux, jusqu’à son dernier concert en 1994, à Tours, où, malgré la fatigue, elle trouve la force de descendre au milieu des spectateurs auxquels elle lance : « Merci à vous, merci de vous ! Je vous aime. Je voudrais vous dire, entendez-le comme cela : vous êtes essentiels à ma vie de femme qui chante ! »

Jusqu’au 28 janvier à la Philharmonie de Paris. https://philharmoniedeparis.fr/fr/exposition-barbara

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