gauvain sers sort l'album les oubliés
Le chanteur Gauvain Sers revient avec l'album "Les Oubliés" -(c) Franck Loriou

#Entretien. Deux après le succès de « Pourvu », le chanteur repéré par Renaud, Gauvain Sers, revient avec « Les Oubliés« . Un album émouvant où il aborde la question de la désertification des campagnes et dénonce l’abandon des services publics en milieu rural au travers de paroles qui font écho à la lutte des Gilets jaunes.

Gauvain Sers: « Je voulais dénoncer l’abandon de tous les services publics. Les écoles qui ferment, je trouve que c’est cela le plus terrible par l’effet boule de neige que ça entraîne sur la vie de la campagne où tout disparaît. C’est triste de voir l’évolution et de vouloir tout centraliser »

gauvain sers sort l'album les oubliésGauvain Sers n’a pas besoin de grand-chose pour chanter. Une guitare, quelques suites d’arpège et des mots inspirés de la langue de Prévert lui suffisent. Deux ans après le succès de son album « Pourvu », le chanteur repéré par Renaud, a choisi de se produire en  tournée acoustique dans les campagnes. Sa façon d’aller au plus près des « oubliés » auxquels il rend hommage avec justesse et sensibilité dans son nouvel album à paraître vendredi 29 mars. Éminemment émouvante, la chanson qui donne son nom à l’album lui a été inspirée par la lettre que lui a envoyée Jean-Luc Massalon, instituteur à Ponthoile, un village de la Somme en lutte pour sauvegarder son école, qui a dû fermer en septembre 2018.  Une histoire qui a touché Gauvain Sers. Partant de ce cas particulier, il a élargi la focale pour aborder la question de la désertification des campagnes et des villages qui meurent au travers de paroles qui font écho au mouvement des Gilets jaunes. « On est les oubliés, la campagne, les paumés, les trop loin de Paris, le cadet de leurs soucis » chante-t-il, dénonçant en filigrane l’abandon des services publics en milieu rural. Entretien avec le chanteur qui dévoilera son album sur scène dans plusieurs festivals cet été avant une grande tournée cet automne qui le mènera jusqu’aux Zéniths de Limoges et de Paris les 24 et 25 avril 2020.

gauvain sers sort l'album les oubliésComment est née la chanson « Les oubliés » qui donne son nom à votre album ?

Gauvain Sers : D’un instituteur qui était venu me voir en concert. Le lendemain, il m’a écrit une lettre dans laquelle il me parlait de la lutte pour essayer de sauvegarder son école qui était menacée de fermeture. Il en parlait avec énormément de passion pour son métier, cela m’a touché. C’est quelque chose que je ressens aussi. Je sais ce que c’est, j’ai grandi dans un village à la campagne dans la Creuse, mon père est prof de maths. L’Education nationale, c’est un milieu que je connais, j’en ai beaucoup entendu parler à table quand j’étais enfant. L’école, c’est un symbole hyper fort dans un village. Cela faisait quelque temps que je voulais écrire sur la désertification en milieu rural, des campagnes, mais je n’avais pas encore trouvé l’angle pour attaquer la chanson. Quand j’ai reçu cette lettre, ça été l’élément déclencheur.

Quel message avez-vous envie de faire passer à travers ce titre très émouvant?

Gauvain Sers : Je voulais dénoncer l’abandon de tous les services publics, en général. Je me rends compte à chaque fois que je retourne dans la Creuse, qu’il y a de moins en moins de trains, de postes. Les écoles qui ferment, je trouve que c’est cela le plus terrible par l’effet boule de neige que ça entraîne sur la vie de la campagne où tout disparaît. C’est triste de voir l’évolution et de vouloir tout centraliser.

Les paroles font penser à celles des Gilets jaunes. Que vous évoque ce mouvement parti des régions?

Gauvain Sers : C’est drôle parce que j’ai écrit la chanson six mois avant. Au vu de l’évolution des choses je pense que c’était souterrain depuis longtemps. Il y a tellement de demandes dans le mouvement qu’on a du mal à être d’accord sur tout. Il y a des revendications dans lesquelles je me retrouve et que je comprends parfaitement, comme le sentiment d’être abandonné dans certains endroits. Dans la chanson, je voulais pointer ce côté de l’abandon des services publics. Et parler de cette guerre entre Paris et la Province où on est toujours d’un côté ou de l’autre. Je voulais contrer cette espèce de clivage. Ce qui fait la force de notre pays, c’est d’avoir des grandes villes riches culturellement parlant et aussi d’avoir des zones rurales riches de leur diversité.

D’où vient que vos chansons ont souvent un côté sociétal, voire social ?

Gauvain Sers : J’ai envie que mes chansons reflètent ce qui se passe dans la vraie vie. Dans l’écriture c’est pareil. J’essaie de varier les plaisirs, les émotions et surtout de ne pas me limiter sur les thèmes et de fonctionner à l’énergie du moment. Les sujets doivent me toucher. Parfois c’est léger, ça fait sourire, ça fout les boules et parfois on a envie de s’indigner. Il y a des moments où on est de bonne humeur et d’autres où on a envie de crier à l’injustice. C’est comme un constat, un documentaire de 3 minutes, où je donne mon point de vue entre les lignes, plutôt que d’être trop frontal et donneur de leçon. Si cela peut faire réfléchir, c’est déjà génial ou si cela ouvre le débat, c’est utile.

Parlez-nous de « Au pays des lumières » où vous évoquez un autre sujet qui vous indigne, celui du sort des réfugiés.

Gauvain Sers : Celle-ci c’est la plus cash, la chanson la plus frontale de l’album, un peu comme la  chanson « Hénin-Beaumont » sur mon premier disque. J’ai pensé qu’il fallait y aller directement plutôt que de passer par un chemin détourné. J’avais l’image du réverbère dans la ville qui pourrait symboliser le phare pour quelqu’un qui est en mer et veut atteindre l’autre rive du pays des lumières.

Il y a aussi « L’Etudiante » sur le thème de l’égalité des chances…

Gauvain Sers : Oui, et sur la vie à Paris qui est devenue complètement démesurée quand on voit le prix des appartements et les moyens qu’il faut avoir pour vivre à l’intérieur du périphérique. C’est hallucinant. C’est une chanson-portrait où je parle des étudiants qui essaient de s’en sortir et qu’on a aussi tendance à oublier. Je trouve que les artistes doivent aussi essayer de peindre leur époque. C’est pour ça que j’aime aborder ces thèmes qui sont rarement traités en chanson.

Vous êtes en tournée acoustique en milieu rural. L’idée, c’est d’apporter votre soutien aux associations qui luttent contre la désertification et d’aller au plus près des « oubliés » dont vous parlez ?

Gauvain Sers : Exactement. C’est soutenir quelques associations que j’aime et que j’ai envie d’aider. Il y a également le fait d’amener la culture où elle est difficile d’accès. C’était mon cas quand j’étais enfant et heureusement que mon père voulait bien à chaque fois faire 80 kilomètres pour aller voir un concert dans une salle à Limoges. J’ai voulu des concerts avec des prix plus que raisonnables à 10 euros l’entrée. Ce n’est pas la grosse machine d’une tournée. Il y a un côté vraiment très intimiste d’approche avec les gens. Cela permet de sacrées rencontres. L’idée, c’est qu’il n’y ait pas de barrière entre l’artiste et le public. Après, on aura tout le temps de faire une tournée plus classique dans des grandes salles ! (rires).

  • Album « Les oubliés«  label Fontana/Mercury Music, contenant « Que restera-t-il » la « B.O » du nouveau roman de Michel Bussi « J’ai dû rêver trop fort« , éditions Presses de la Cité.
  • Gauvain Sers en tournée acoustique jusqu’au 7 avril :

29/03 LA BOITE EN ZINC – CHANTEIX (19), Association TUBERCULTURE qui milite pour la diffusion culturelle en milieu rural et organisatrice du Festival AUX CHAMPS; 30.03.19 L’APOLLO – DUN LE PALESTEL (23), le village où Gauvain a grandi et où vit sa famille. Concert au profit de l’association Action solidarité et réfugiés qui accompagne des familles de migrants à s’installer et accomplir des démarches administratives dans la région; 07.04.19 SALLE DES FÊTES – SAINT-AMBROIX (18). Gauvain intervient dans la petite école primaire du village dans le cadre d’un atelier d’écriture de chanson

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