tim dup album qu'en restera-t-il?
Tim Dup sera à la Cigale à Paris le 27 mars où il dévoilera les chansons de son nouvel album "Qu'en restera-t-il?" (c) Hugo Pillard

Musique. Trois ans après « Mélancolie Heureuse », le chanteur Tim Dup revient avec « Qu’en restera-t-il ? ». Un album poétique aux délicates ambiances électro et aux questionnements existentiels mêlant espoir et inquiétude quant à l’avenir de la planète.

Les chansons délicates de Tim Dup sont comme des contes impressionnistes. Elles suggèrent plus qu’elles n’expliquent. Mais peu importe le film que l’on se fait au travers de la dimension onirique et mélancolique de son répertoire, l’essentiel est l’imaginaire à la poésie moderne qu’il favorise

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Tim Dup (c) Hugo Pillard

« Voilà, c’est la fin, depuis le temps qu’on nous en parle » chante Tim Dup. Le jeune auteur-interprète de « TER Centre », revient avec « Qu’en restera-t-il ? », son deuxième album marqué par une certaine inquiétude de l’avenir de la planète. Un registre aux ambiances électro et au tempo plus affirmé que lors de son précédent opus, où l’on retrouve son interprétation fragile et sa poésie intimiste aux mots délicats. Avec toujours cette « mélancolie heureuse » qui ne l’a pas lâché depuis son premier disque teinté d‘un léger spleen aux climats cinématographiques invitant à la rêverie.

Ses chansons sont comme des contes impressionnistes. Elles suggèrent plus qu’elles n’expliquent. Mais peu importe le film que l’on se fait au travers de la dimension onirique et mélancolique de son répertoire, l’essentiel est l’imaginaire à la poésie moderne qu’il favorise : « c’est le principe de l’art » confie-t-il « l’artiste lui-même est dépossédé de son œuvre à partir du moment où il commence à la proposer. » Rencontre.

Quel sens donnez-vous au titre assez énigmatique de votre album « Qu’en restera-t-il ? »

Tim Dup : Avant même de finir de composer les chansons, j’avais ce thème du temps qui passe. C’est à la fois un constat et une question que je me pose à moi-même et à celui qui écoute. « Qu’est-ce qui restera de tout ça? « , de nos vies, des  gens qu’on aime ou de la planète sur laquelle on vit ? J’aime bien cette question parce qu’elle nous rattache forcément à une certaine forme d’humilité. Il faut essayer de faire le plus possible dans le peu d’espace-temps qui nous ait donné. Si tout fini par s’éteindre, autant y mettre un peu de lumière, tant qu’on peut.

Faut-il voir une forme d’inquiétude dans ce questionnement ?

Tim Dup : Je suis très partagé là-dessus. A la fois, il y a une forme d’inquiétude qui nous est imposée par le monde. Il n’y a qu’à voir les actualités de ces dernières semaines. On a un continent entier qui brûle, des situations diplomatiques qui sont effrayantes. On est dans un monde très imprévisible, qui forcément fait un peu peur. En même temps, derrière ces constats qu’on vit dans un système qui cristallise les tensions, les violences, il y a du coup, cette envie de lâcher prise et de ne pas trop se poser de questions. Au quotidien, j’ai l’impression d’avoir peu la main sur tout ce qui se passe et d’être assez impuissant. Je suis pris entre ces deux sentiments. J’ai à la fois envie de m’investir dans ces combats-là, dans ces causes, d’en parler, mais c’est vrai qu’il y a aussi une part de moi qui me dit : « puisqu’on est dans la merde, autant savourer, profiter des siens, faire la fête, trouver une espèce de légèreté dans l’ivresse. » J’aime bien la phrase de Kundera au début de son livre  » L’insoutenable légèreté de l’être » : « Que faut-il choisir, la pesanteur ou la légèreté ?. » C’est une question que je me pose souvent avec le besoin de trouver les moyens de s’élever à travers la musique, la poésie, l’amour…

Musicalement, on sent une volonté d’évolution avec des ambiances moins minimalistes qu’à vos débuts…

Tim Dup : C’est vrai que l’album n’a pas été arrangé de la même façon que le précédent. Il y a plus de sons organiques. Donc, forcément, on a l’impression que c’est un peu moins clinique. Mais par contre, il y a moins d’éléments. Sur un premier album, on a envie de montrer plein de choses. Sur celui-ci j’ai essayé d’aller dans l’assimilation de toutes mes influences pour en faire un extrait plus précis de ce que je suis, de la musique que j’aime. Ça part moins dans tous les sens, même si il y a dans l’album des phases marquées hip-hop ou électro. J’ai essayé davantage d’être à l’écoute du texte et des chansons et d’aller chercher ce qui me semblait être l’essence de ce qui pouvait porter l’histoire et la voix, en n’allant pas vers des postures.

Dans le livret qui accompagne votre album, vous évoquez Tokyo, New-York, la Normandie, la Corse… Est-ce à dire que vous avez besoin d’ailleurs pour écrire ?

Tim Dup: J’aime beaucoup vivre à Paris, mais j’ai souvent besoin de quitter cette ville pour retrouver un peu de beauté. Dans les grosses métropoles, il y a plein de belles choses qu’on peut voir au quotidien, mais j’ai toujours aimé le contact avec la nature et ce qui est différent. C’est ce que j’aime dans le voyage, c’est d’aller chercher d’autres choses. Cela permet de contraster ses perspectives.

Vous dites d’ailleurs « les voyages nous donnent de la bonté »

Tim Dup : Je crois à la puissance d’une rencontre qui est différente. Généralement, plus les gens voyagent, plus ils se nuancent. Et la nuance, cela permet davantage de s’écouter parce qu’on n’est pas les mêmes, d’avoir de l’inflexion dans ses pensées, de ne pas être dans un truc binaire, que l’on retrouve souvent dans les réseaux sociaux. J’ai souvent envie de partir, mais pas forcément pour écrire. Par exemple, la chanson « Place  Espoir » est née exactement comme « TER Centre », qui parlait de mes trajets en train de banlieue. J’ai eu besoin de faire plein de trajets avant d’écrire la chanson. Pour « Place Espoir », c’est pareil, je suis passé des tas de fois sur cette place, et au bout d’un moment ça m’a paru comme une évidence d’écrire là-dessus. C’est souvent dans l’ordinaire qu’on trouve des choses à raconter.

Il y a aussi une dimension politique dans « Place espoir », qui est un  hommage à la place de la République à Paris avec ses luttes, ses rassemblements, ses combats…

Tim Dup : Peut-être qu’elle est politique dans le sens étymologique de la vie de la cité. C’est une place qui fait évidemment partie de la société, comme un forum. Par contre, je n’ai pas voulu être partisan. Je ne veux pas paraître donneur de leçon parce que je trouve que tout le monde est assez grand pour penser ce qu’il veut. Mais j’aime le poids symbolique que revêt cette place, un lieu important de l’histoire depuis  des centaines d’années, notamment ces dernières années. Aujourd’hui, cela fait cinq ans qu’ont eu lieu les attentats à Charlie Hebdo. La première fois où je suis allé sur cette place, pour me lever contre quelque chose, pour la paix, la liberté, c’était à ce moment-là. Et ce que j’aime, au-delà de l’aspect politique, c’est la quotidien très brut où il y a des tas de gens qui passent sur cette place pour aller au travail, en métro, à pied, à vélo. J’aime l’ idée d’être de passage, que ce soit ici-bas ou dans les rues, les bars, sur les places où les gens se croisent.

La poésie occupe une grande place dans vos chansons. On a l’impression que vous ne pourriez pas vivre sans les mots?

Tim Dup : Je crois que cela m’aide à vivre. C’est le désir d’aller chercher de la beauté, de l’harmonie, de la tendresse. Pour moi, la poésie, je l’assimile à la réalité humaine où tout est poétique. C’est comme cette notion d’infra-ordinaire de George Perec, que j’ai apprise durant mes études, ces choses qu’on oublie de regarder parce qu’on est pris dans une habitude. En fait, il y a des tas de choses à voir tout le temps. Il faut juste prendre le temps de le faire, d’accepter de contempler, de ne pas juger. La poésie permet à la vie d’être soutenable.

tim dup album qu'en restera-t-il?Entretien réalisé par Victor Hache

  • Album « Qu’en restera-t-il » Columbia/Sony music. Tournée à partir du 7 mars, concert le 27 mars à La Cigale – 120 bd de Rochechouart, 75018 Paris.

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