les cheyennes de john ford
Le cinéaste américain John Ford a toujours montré de l’empathie pour la cause des Indiens d’Amérique du Nord

Télé. Sortie en 1964, « Les Cheyennes » est une admirable fresque signée John Ford sur les derniers mois d’errance de la tribu Cheyenne. Ils furent plusieurs centaines à quitter leur réserve, située dans l’Oklahoma, pour rejoindre le Dakota et le Wyoming, terres de leurs ancêtres, situées à 3 000 kilomètres. Ils font ce qu’ils ont toujours fait – avant la signature du traité d’assignation, imposé par le gouvernement nord américain – partir à l’automne pour retrouver les pâturages et territoires de chasse d’une contrée plus giboyeuse. NOTRE AVIS (***) : Un chef-d’œuvre et un film crépusculaire à la réussite totale, évoquant un peuple fier. A voir mardi 21 mars sur C8 -21:20.


Dans « Les Cheyennes », le point de vue de John Ford était de défendre une minorité qui avait le droit de vivre sur ses terres…


les cheyennes de john ford
Le cinéaste américain John Ford a toujours montré de l’empathie pour la cause des Indiens d’Amérique du Nord

Le cinéaste américain d’origine irlandaise, John Ford (1894-1973) a toujours montré de l’empathie pour la cause des Indiens d’Amérique du Nord qui n’étaient ni sauvages et cruels, ni bons, surtout vis-à-vis d’une tribu « ennemie ». Bien avant 1950, il les fit tourner dans ses films leur propre rôle de vrais indiens (« La Poursuite impitoyable »). En 1964, il a 70 ans; le maccarthysme est passé, il décide alors de filmer l’épopée des « Cheyennes » dans ce qui apparaît aujourd’hui comme son testament cinématographique. L’histoire se situe en 1878 et raconte ce que sera la fin de leur nation, d’où le titre anglais « Cheyenne Autumn ».

Dans son film, la tribu Cheyenne, une des plus importantes avec les Sioux, les Comanches, les Navajos, les Apaches, vit dans une réserve en Oklahoma, sol plus propice à la culture du maïs mais sans forêts ni pâturages, où les indiens auraient pu chasser le chevreuil, le bison ou diverses autres espèces. Ils végètent. Certains chefs, dont Little Wolf (Ricardo Montalban) préconisent de retourner sur leurs terres d’origines situées à 3 000 kilomètres. Ils partent à plusieurs centaines avec femmes, enfants, vieillards, tentes roulées trainées par leurs chevaux. Hélas, ils ont rompu le traité qui les maintenait dans la réserve….

Bientôt poursuivis par la cavalerie américaine, avec à sa tête le Capitaine Thomas Archer (Richard Widmark) et à cause d’exactions commises par de jeunes indiens, ils seront à nouveau regroupés en attendant que leur sort soit décidé définitivement. C’est la fin de l’automne, il neige. Ils ont froid et faim. Grâce à l’intervention du Capitaine Archer, du Secrétaire d’Etat à l’Intérieur et aux Affaires indiennes, Carl Schurz (Edward G. Robinson) et avec l’aide d’une institutrice Deborah Wright (Carroll Baker) qui les soigne, ils sont admis à des négociations sur leur retour ou pas, dans le Wyoming.

Le point de vue de John Ford était de défendre une minorité qui avait le droit de vivre sur ses terres. L’âge d’or des superproductions de Hollywood s’éteignait mais le style de Ford, maître du western de « proximité » fonctionne encore. C’est un conteur. Ceux qui veulent connaître la véritable histoire de l’Amérique profonde, regarderont avec plaisir « Le Convoi des braves » (1950), « La Prisonnière du désert » (1956) ou encore « L’Homme qui tua liberty Valence » (1962). Dans ses films, le réalisateur marque fortement les caractères des protagonistes, l’anecdote, le comportement des humbles. Le cinéaste donne à ses exclus une identité certaine, comme dans « Les Raisins de la colère » (1937) avec Henry Fonda.

John Ford après plus de 140 longs métrages, livre un film de fin de carrière éminemment réussi, où il dit adieu à la célèbre Monument Valley si souvent filmées dans ses réalisations. Une fresque où il dépeint un tableau vivant tourné en Technicolor et 70 mm, avec pour chef opérateur William Clothier, où l’on retrouve la plupart de ses acteurs favoris (mais sans John Wayne ni Henri Fonda trop connus).



John Ford
John Ford en tournage

« Les Cheyennes » est un film ambitieux, maîtrisé, pas vraiment pro-indien, qui insiste sur la réalité du moment et n’idéalise personne. Il tourne même en dérision ce qui fit sa célébrité, montrant un Wyatt Earp âgé, à Dodge City (James Stewart à contre-emploi), dont il fabriqua la légende, le shérif courageux et honnête, de « La Poursuite impitoyable » (1947) avec Henry Fonda.

Un film crépusculaire à la réussite totale, mélancolique, évoquant un peuple fier, en voie de disparition. Discutant un jour avec lui pour un documentaire, le critique et réalisateur Peter Bogdanovitch (*) lui fit remarquer que dans son cinéma les indiens d’Amérique du Nord avaient une dignité rare. Ce chef-d’œuvre qui n’est pas vraiment un western est à voir absolument, d’autant qu’il est très rarement diffusé à la télé.

Jane Hoffmann

  • A voir : « Les Cheyennes » de John Ford avec Richard Widmark, James Stewart, Carroll Baker, Edward G. Robinson, Ricardo Montalban, Sal Mineo. A voir mardi 21 mars sur C8 -21:20.

(*) Filmographie sélective de Peter Bogdanovitch : « La Dernière séance » (1971), « Dirigé par John Ford » (1971), « Barbe à Papa » (1973), « Nickel Odéon » (1976), « Et tout le monde riait » (1981). Il signa également la saison 5 de « Soprano » et certaines scènes de « Vérité et mensonges » d’Orson Wells.


 

 

 

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