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Chaque fin de mois de novembre, il souffle un vent polaire sur la Normandie. Celui des cultures nordiques célébrées par le festival Les Boréales qui fête sa 27ème édition à Caen et dans sa région. Entretien avec Jérôme Remy, directeur artistique de la manifestation qui, cette année, va mettre les pays baltes à honneur, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie, à l’occasion des cent ans de leur indépendance.

Lors de la 27ème édition des Boréales, les pays baltes, l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie, seront à l’honneur, à l’occasion du centième anniversaire de leur indépendance

Premier festival nordique en Europe du Sud, Les Boréales fêtent leur 27ème édition à Caen (Calvados) et dans une trentaine de villes de la région. Durant onze jours, du 15 au 25 novembre, la Normandie va se transformer en un lieu dédié aux cultures nordiques contemporaines au travers d’une programmation pluridisciplinaire où s’exprimeront la littérature, le théâtre, le cirque, la musique, le cinéma, la danse et les  arts visuels. Plus de 150 spectacles, dont 90 gratuits seront à découvrir aux Boréales où l’on attend 40 000 personnes. Avec cette année, un focus sur les pays baltes, l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie, qui seront à l’honneur, à l’occasion du centième anniversaire de leur indépendance.

jerome remy directeur artistique des boréales
Jérôme Remy, directeur artistique du festival Les Boréales

Les Boréales fêtent leur 27ème édition. Comment est né ce festival dédié aux cultures du nord ?

Jérôme Remy : Il est né d’un constat assez simple. Au début des années 1990, la culture nordique n’était pas connue en France. Elle a eu ses heures de gloires dans les années 1970 avec la sociale démocratie triomphante, le cinéma de Bergman, avec la libération des mœurs ou l’on fantasmait sur un modèle des femmes suédoises très émancipées, libres de leur corps. Les années 1980 ont renversé le modèle en étant sur des valeurs d’argent très américaines, qui ne correspondait pas au mode de fonctionnement nordique. Et au début des années 1990, ici à Caen, des gens ont réfléchi et se sont demandés ce qu’on pourrait faire autour de la culture nordique, sachant que la Normandie partage avec la Scandinavie, un héritage commun très ancien qui remonte aux Vikings. L’étymologie-même de la Normandie renvoie aux hommes du nord. Tout au long du 20ème siècle, il y a eu des échanges extrêmement féconds, enracinés. C’est comme ça que l’université de Caen a fondé un département des études nordiques, où l’on peut apprendre les langues scandinaves, qui est aujourd’hui le plus important en France.

Comment expliquez-vous le succès des Boréales, qui sont devenues la plus importante manifestation consacrée aux arts et cultures nordiques en Europe ?

Jérôme Remy : En fait, on a occupé une place que personne n’avait voulu vraiment prendre. Et dès le milieu des années 1990, on a surfé sur une vague de succès. 1994, c’est le premier album de Björk, tout de suite après, le réalisateur danois Lars von Trier est invité régulièrement au festival de Cannes, où il remporte une Palme d’Or. C’est aussi le cas pour Kaurismäki et son cinéma. Des succès qu’ont connu beaucoup d’écrivains nordiques, jusqu’à Millenium dont plusieurs millions de romans se sont vendus en France. Tout cela fait qu’il y a un regain d’intérêt pour l’Europe du Nord. Des pays que l’on regarde à chaque élection présidentielle, comment ils se  comportent en terme de parité, d’écologie, de Flex-sécurité pour l’emploi, de mesures contre le chômage, le vivre ensemble etc. On est régulièrement tourné vers le nord. Nous, on a réussi un pari assez simple qui est de faire un festival en France qui corresponde à la manière dont la culture est pratiquée en Europe du nord. C’est-à-dire un événement horizontal qui refuse de hiérarchiser, de choisir entre l’opéra et la pop music, entre la littérature et la danse, entre le design et la photographie. On considère que tous les gestes artistiques participent d’un même mouvement qui est celui de rendre la vie un peu plus agréable et d’enrichir les citoyens. Ce sont des valeurs enracinées et fortes dans les sociétés scandinaves.

Quels sont les pays qui seront à l’honneur cette année ?

Jérôme Remy : On souhaité faire un focus sur les trois républiques baltes voisines des pays nordiques, qui partagent avec eux ce bras de mer Baltique. A savoir, L’Estonie, la Lettonie et la Lituanie qui sont des pays européens que l’on connaît encore assez mal, mais qui sont en pleine explosion. Ils fêtent cette année le centenaire de leur première indépendance de 1918. Ils sont, eux aussi, à travers la culture, en train de gagner petit à petit, un rayonnement international.

Il va y avoir plus de 150 spectacles. Quels seront les temps forts de la 27ème édition ?

Jérôme Remy : Il y aura l’adaptation d’Ibsen à travers le Peer Gynt mis en scène par David Bobée, qui est sans doute son meilleur spectacle à ce jour. Une très grosse production avec une espèce de cirque forain abandonné sur le plateau. On a la première française de Cirkus Cirkör «Epifonima », un projet de cirque féminin post patriarcal dans la mouvance du mouvement #MeToo, un spectacle assez impressionnant. Cirkus Cirkör, est la première compagnie de spectacle vivant en Europe du nord. A chaque fois qu’ils viennent en France, c’est un gros événement. On aura également la première française de Rymden , le nouveau projet des supers héros du jazz nordique. A savoir la section rythmique de « e-s-t », groupe de jazz suédois mythique avec notamment le grand pianiste Bugge Wesseltoft. Et on a un projet atypique avec le trompettiste Nils Petter Molvaer, une des stars du jazz électronique ou atmosphérique norvégien, qui invite Sly & Robbie la section rythmique jamaïcaine qui a fait des centaines d’albums de reggae mondiaux. Et, nous aurons beaucoup d’auteurs avec notamment la présence de Niviak Korneliussen. Une jeune romancière groenlandaise qui parle d’un Groenland qui n’est pas celui qu’on nous vend habituellement, celui des grands  espaces, des chiens de traineaux et de la fonte des glaces. Elle se revendique comme le premier écrivain queer inuit et elle travaille beaucoup sur la question du genre et de l’identité sexuelle du Groenland. Son roman  «Homo sapienne » est formidable, il est d’ailleurs salué par toute la presse française. Elle a vraiment une personnalité forte et très différente.

jerome remy directeur artistique des boréales
Jérôme Remy, directeur artistique des Boréales

Vous êtes directeur artistique du festival depuis 1994. Qu’est qui vous fait vibrer dans les cultures du nord ?

Jérôme Remy : L’exotisme. En France, on a toujours tendance à vouloir le chercher vers le sud car on est un pays latin. Je trouve qu’on a beaucoup de choses à apprendre du nord. La France est un pays indiscutablement fracturé en multiples endroits. Ce qui m’intéresse, c’est de voir comment les pays scandinaves regardent dans une même direction, comment ils essaient de se constituer un destin commun. Et comment les valeurs cardinales comme l’éducation qu’on prodigue à nos enfants et la culture qu’on offre à tous, sont très importantes. C’est un truc qui me fascine. La traduction de ça, c’est effectivement un foisonnement artistique très fort. La Suède c’est le troisième exportateur mondial de musique, alors que c’est un tout petit pays. La Finlande a des résultats extraordinaires en termes de nouvelles technologies et de résultats scolaires. La littérature scandinave et le polar nordique se portent bien et s’exportent mondialement. Tout cela, ce sont des traductions de volontés politiques qui consistent à mettre culture et éducation au premier rang des priorités. Ça reste des choses qui sont fascinantes dans le contexte qu’on voit tous émerger dans cette vielle Europe.

Est-ce que vous pensez déjà aux 30 ans des Boréales ?

Jérôme Remy : Absolument. On sait déjà que l’année prochaine on invite la Norvège, l’année suivante, on invitera le Danemark, le Groenland et les Iles Féroé. Et en 2021, on va inviter la Suède pour les 30 ans des Boréales. Nous allons essayer d’asseoir la manifestation à Caen. On est en train de réfléchir à un slogan autour du mot «Scaendinavie», car c’est vrai que Caen aujourd’hui est la place forte des relations culturelles et diplomatiques entre la France et la Scandinavie. Jusqu’en 2023, on a presque cinq festivals d’avance avec des projets qui se lancent déjà pour le théâtre ou le nouveau cirque.

Entretien réalisé par Victor Hache

Festival Les Boréales du 15 au 25 novembre 2018 à Caen et dans sa région. Toutes les infos: http://www.lesboreales.com/

Lire: “Les Primeurs”, l’indispensable festival des premiers albums: https://www.weculte.com/musique/les-primeurs-lindispensable-festival-des-premiers-albums/

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