marvin jouno sort l'album s/mars
Marvin Jouno: "Je me suis figuré ce voyage en terre inconnue, hostile, un voyage solitaire dans un milieu assez âpre. C’est un peu l’histoire de ce disque où je raconte ces dernières années où j’ai vu le sol se dérober sous mes pieds."

#Musique. Après son précédent opus «Intérieur nuit», Marvin Jouno revient avec «s/Mars ». Un album émouvant et prenant aux influences pop-électro, mêlé de mélancolie, où le chanteur s’envole vers une planète fantasmée, pour se réinventer et oublier une période douloureuse marquée par deux séparations amoureuses et le deuil de sa mère. Rencontre avec un écorché-vif, qui au travers de ce second opus au matériau biographique, livre ses sentiments et sa poésie brute comme jamais.

« S/Mars », un album émouvant et prenant, au matériau biographique, où l’écorché vif Marvin Jouno livre ses sentiments et sa poésie brute comme jamais.

Marvin Jouno est un écorché vif. Un garçon, qui dans la vie, n’aime pas le compromis, ni les faux-semblants. Alors, il est parti comme ça, à l’instinct, pour oublier sa vie, où il a connu deux séparations amoureuses et le deuil de sa mère. Le chanteur a fait de cette expérience le matériau biographique de son nouvel album «s/Mars», planète fantasmée où il s’est envolé pour se réinventer et se reconstruire, envoyant de là-haut, des lettres à celles qu’il a aimées et aux êtres chers qui ont marqué son existence.

A travers ce passé et ce futur imaginaire, il raconte ces deux années où sa vie a basculé, où tout est entré en collision, le tourbillon de la tournée de son précédent disque qui l’a révélé « Intérieur nuit », ses amours perdues, la mort. Une période douloureuse faite de solitude pour le chanteur qui avoue avoir «touché le fond». Après des jours d’errance, il a entrepris un grand voyage, réel celui-ci, entre Brest et Tokyo, qui lui a permis de retrouver ses repères. C’est tout cela qu’il raconte d’une plume très cinématographique dans «s/Mars». Un album émouvant et prenant aux influences pop-électro, mêlé de mélancolie, où Marvin Jouno, livre ses sentiments et sa poésie brute comme jamais.

Marvin Jouno: « Je me suis figuré ce voyage en terre inconnue, hostile, un voyage solitaire dans un milieu assez âpre. C’est un peu l’histoire de ce disque où je raconte ces dernières années où j’ai vu le sol se dérober sous mes pieds. »

Pourquoi avoir choisi la planète Mars plutôt que la lune ?

Marvin Jouno: C’est venu d’une anecdote d’une amie qui m’expliquait s’être inscrite à une loterie pour faire partie des premiers vols habités vers Mars. Ça m’a marqué et fait écho à mon histoire. J’ai quitté mon domicile conjugal et j’avais l’impression de partir vers l’inconnu. Je suis parti avec ma petite valise et quelques vêtements et suis resté pendant deux ans et demi sans lieu d’habitation. Ça été une période difficile. Je me suis figuré ce voyage en terre inconnue, hostile, un voyage solitaire dans un milieu assez âpre. C’est un peu l’histoire de ce disque où je raconte ces dernières années où j’ai vu le sol se dérober sous mes pieds.

C’est un album très autobiographique…

Marvin Jouno : Je l’ai rêvé comme cela. Après « Intérieur nuit », mon premier album qui m’avait beaucoup apporté, c’est comme si la vie m’avait infligé quelque chose que je devais rendre. Il s’en est suivi une période douloureuse où j’ai dû affronter deux deuils de relations amoureuses et un véritable deuil, celui de ma mère. J’ai mesuré à quel point tout était friable et que tout ce que j’avais construit durant ces 35 ans premières années, était un château de sable. J’ai vu tout se casser la gueule. J’ai perdu tous mes repères. J’ai déménagé dix fois dans des espèces d’endroits qu’on me prêtait à Paris et en Bretagne où j’ai des racines profondes (le chanteur est né à Saint-Brieuc, NDLR), où j’ai accompagné mon père dans ce processus de deuil. Mes parents étaient repartis s’installer là-bas il y a quatre ans, j’y voyais un retour aux sources qui me faisait vraiment plaisir pour eux. J’avais l’impression que c’était un  retour à l’essentiel, qui malheureusement a été brisé. Je me pose beaucoup de questions dans cet album sur les perspectives de vie.

On a l’impression que vous ne vous êtes jamais autant livré, non?

Marvin Jouno : Je me suis accroché à cet album comme à une bouée. Cela m’a permis de garder  la tête hors de l’eau. J’y ai mis tellement toute mon énergie, que je ne sais pas quoi faire après, quel va être son accueil. J’ai l’impression qu’il est très dense et va être plus clivant que le premier. J’ai peut-être pris des risques, mais je suis fier de cet album. J’ai toujours eu un rapport très intime et biographique. Je pars toujours de choses qui me percutent le ventre et me font mal, autrement je n’ai pas la sensation que cela vaille le coup d’écrire. Là, j’ai été dans une démarche d’immédiateté. Avant, par le prisme de la poésie et une extrême pudeur, j’avais tendance à coder. Cela m’amusait qu’on ne me comprenne pas. Et j’ai découvert avec le live que c’était exceptionnel quand les chansons rencontrent l’histoire du public, que les gens se les accaparent en leur donnant parfois un sens auquel on n’a pas pensé. Vu que je traversais des choses difficiles, je voulais partir de l’intime et tendre vers l’universel. J’ai essayé de ne pas filtrer en étant plus direct dans mon écriture.

Vous avez également beaucoup voyagé durant cette période. Où êtes-vous allé ?

Marvin Jouno : Les voyages, cela a été mes soupapes. Je suis parti de Brest et j’ai rejoint Tokyo, sans prendre l’avion. J’ai traversé l’Europe en bus, ensuite toute la Russie dans le Transsibérien, j’ai fini par prendre un ferry pour rejoindre le Japon. Je rêvais de ce voyage depuis mon enfance, partir de l’Atlantique et  retrouver la côte pacifique. Cela a été 45 jours intenses où j’ai passé beaucoup de temps dans les moyens de transport. J’ai une fascination pour l’Est. La Russie est un objet de fantasme, la Russie romantique, fin 19ème, début 20ème, comme si j’avais connu cette époque. J’ai visité Saint-Pétersbourg et Moscou, des villes que j’idéalisais depuis toujours. Après, je me suis posé sur les bords du lac Baïkal, les rives Ouest et Est. Et je me suis rendu à Vladivostok, cette espèce de porte improbable vers le Pacifique, une ville presque « américaine », très étonnante, vallonnée comme San-Francisco.J’ai envie de tracer ma voix la plus personnelle possible. Le revival, le faire « à la manière de », ne m’intéresse pas

Marvin Jouno: « J’ai envie de tracer ma voix la plus personnelle possible. Le revival, le faire «à la manière de», ne m’intéresse pas.

L’idée de partir, c’était pour trouver d’autres sources d’inspiration ?

Marvin Jouno : J’ai passé trois ans obsessionnels sur mon projet d’album. J’avais l’impression d’avoir oublié ma vraie vie. Ce voyage ça été une parenthèse. J’ai pris des notes de manière a peut-être un jour, romancer mon voyage, mais pas pour écrire des chansons. Cela n’a pas influencé l’album, ça a juste permis une respiration, de me sentir vivant et  d’être autre chose qu’un artiste. J’avais besoin de ça. Mon meilleur ami, ça été un carnet de voyage. J’ai essayé de le rédiger, d’écrire à la main avec un effort d’écriture littéraire. Ça été assez chronophage et j’ai fait aussi beaucoup de photos. Cette métaphore de Mars, ça été une manière de raconter l’indicible, en essayant d’élever la douleur, pour que ça ne reste pas terre à terre. Je voulais que mes histoires soient perméables. De ce point de vue je pense que le premier album était moins accessible.

Comment définiriez-vous votre univers musical ?

Marvin Jouno : J’essaie de faire une pop actuelle, une chanson française contemporaine et de distiller ce qui fait mon ADN d’auditeur depuis quinze ans, la musique électronique et le hip-hop. Je cherche à infuser cela dans la chanson française en ne recyclant pas le passé. J’ai envie de tracer ma voix la plus personnelle possible. Le revival, le faire « à la manière de », ne m’intéresse pas.

.D’où vient la mélancolie qui semble vous habiter également dans la vie ?

Marvin Jouno : Je n’ai pas été un enfant ni un adolescent mélancolique. Je le suis devenu adulte. J’aime parfois le mood dans lequel cela me met. Il y  a quelque chose de contemplatif dans la mélancolie qui permet d’observer les éléments tels qu’ils sont, de se tourner parfois vers le passé. En même temps, ça peut être profondément morose et la frontière avec la tristesse n’est pas loin. Mais c’est vrai que j’ai du mal à écrire sur le bonheur, à écrire des chansons heureuses. Comme je pars toujours de choses qui me percutent, c’est toujours un peu intense.

Vous avez d’abord d’été passionné par le décor de cinéma et la photo. Qu’est-ce qui vous a fait bifurquer vers la musique ?

Marvin Jouno : C’était un premier amour que j’avais laissé de côté. J’ai commencé la musique dans des petits groupes de lycée, j’en écoutais beaucoup chez mes parents. Quand s’est posée la question d’un choix d’étude j’ai préféré le cinéma à la musique. J’avais besoin de découvrir l’image. Ce qui me transcende littéralement, c’est le son sur de l’image. Je me suis trouvé confronté à l’industrie du cinéma, qui est aussi frustrante parfois en tant que créatif. J’ai ressenti le  besoin de retrouver une expression beaucoup plus personnelle en parallèle de mon activité de l’époque. J’ai commencé à écrire des chansons, à les composer, à les mettre en forme seul, sans budget. J’ai trouvé une espèce de libération dans cette pratique individuelle où je n’avais pas besoin d’attendre des millions de financements et 80 techniciens. J’ai retrouvé une pratique beaucoup plus artisanale, que j’avais également avec la photo et j’ai décidé de m’y consacrer. Aujourd’hui, je me sens mieux sur la planète grâce à la musique et à la scène où j’ai fini par trouver mon personnage.

Entretien réalisé par Victor Hache

  • Album «s/Mars», label Un Plan Simple/Sony Music. Concert le 12 mars au Café de la Danse : 5 passage Louis-Philippe Paris 11ème. Tél : 01 47 00 57 59

Lire: Bertrand Belin : «la musique c’est le partage, à l’inverse du livre»: https://www.weculte.com/featured/bertrand-belin-la-musique-cest-le-partage-a-linverse-du-livre/

 

 

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