livre celestin freinet: non a l'ennui a l'ecole par marion poblete

Dans les classes de Célestin Freinet pas de leçons de morale, pas de manuels qui empêchent les initiatives des élèves. Place aux classes promenades. On apprend en réanimant une hirondelle blessée, en montant une côte, en réalisant un journal scolaire. Appréciations : curiosité, souci de l’autre, estime de soi.

livre celestin freinet non a l'ennui a l'école chez acte sud juniorCélestin Freinet. Non à l’ennui à l’école
Maria Poblete
Actes Sud junior, 96 pages, 9 euros

1920, Le Bar-sur-Loup. Célestin Freinet est fin prêt pour sa première rentrée des classes. Lui revient en mémoire la découverte de l’école à 5 ans, « la fin de la liberté ». Dans son habit d’instituteur, il est face à des enfants aux crânes rasés, en rangs comme des soldats, faut-il les embrigader du matin au soir, s’interroge-t-il ? Pas de leçons de morale comme l’exigent les textes officiels : je resterai assis sans bouger ; j’écouterai toujours le maître, mais des classes promenades les après-midis.

Célestin Freinet et son épouse Élise veulent changer la société, créer un monde où il n’y aurait plus d’enfants malheureux le fruit d’un système qui exploite les familles. Et ce processus doit passer par l’école

Les enfants réaniment une hirondelle blessée et c’est l’occasion d’expliquer la reproduction des oiseaux. Monter une côte leur apprend les mètres et les kilomètres, la valeur des pourcentages. L’objectif de Freinet : refuser l’habitude à la docilité et à la misère, faire confiance à l’enfant, lui donner le souci de l’autre, le guider dans son épanouissement.

Lui et son épouse Élise veulent changer la société, créer un monde où il n’y aurait plus d’enfants malheureux le fruit d’un système qui exploite les familles. Et ce processus doit passer par l’école. Mais ces convictions irritent les notables, « tu agaces les bourgeois », lui lance Élise. Soutenus par l’Action française, ils exigent sa démission, « libérez nos enfants de ce maître bolchevique », éructent-ils. Freinet ne plie pas, il décide de réaliser un journal scolaire, l’exercice impose de savoir construire des phrases et d’écrire sans fautes.

Célestin Freinet et Elise travaillent à une école égalitaire, ils n’acceptent pas que des enfants d’ouvriers ou de paysans aient un futur au rabais

Élise est adepte du dessin libre, le médium pour que les écoliers expriment leur élan créatif, un espace de liberté bâillonné par les cours traditionnels. Le couple travaille à une école égalitaire, il n’accepte pas que des enfants d’ouvriers ou de paysans aient un futur au rabais. En 1939, Freinet est contraint à quitter l’Éducation nationale ; à Vence, il crée son propre établissement, un lieu d’asile et d’accueil. Les manuels scolaires sont supprimés, « ils empêchent les initiatives des enfants ». L’équipe reçoit Pedro, il a fui seul l’Espagne et les bombardements.

Faire barrage à la barbarie, telle est la loi de la pédagogie nouvelle populaire. Lorsque Célestin Freinet meurt en 1966, Élise et leur fille Madeleine poursuivent l’aventure. L’institut de Vence existe toujours, il a été intégré à l’Éducation nationale et a obtenu un statut particulier d’école expérimentale. « Nous continuons à penser qu’il est urgent de transformer l’école et le quotidien de tous les enfants pour qu’ils ne s’ennuient plus, qu’ils apprennent avec plaisir, qu’ils réussissent tous, sans être en compétition », affirme Catherine Chabrun, enseignante, adepte de la méthode Freinet.

Alors que le ministère de l’Éducation nationale veut remettre à l’ordre du jour la dictée quotidienne et le calcul, cet aiguiseur de curiosités rétorquerait : aligner des mots et des chiffres abstraits, c’est astreindre l’élève à des tâches ingrates. Comment un tel système archaïque peut-il encourager l’estime de soi ?

Célestin Freinet. Non à l’ennui à l’école –  Actes Sud junior, 96 pages, 9 euros 

maria poblete pour son livre sur celestin freinet: non à l'ennui à l'école chez actes sudAuteure: Maria Pobletejournaliste, est née en 1964 au Chili. Elle est arrivée en France à l’âge de neuf ans, peu après le coup d’Etat du Général Pinochet, et en garde une incandescente révolte intérieure. Après de nombreuses collaborations à des radios nationales françaises, pour lesquelles elle a couvert l’actualité latino-américaine, elle s’est spécialisée dans les sujets de société. Elle travaille pour des magazines grand public et pour des publications spécialisées dans l’enfance, la famille et l’éducation.

Chez Actes Sud junior, elle est l’auteure dans la collection “Ceux qui ont dit non” de Lucie Aubrac : “Non au nazisme”, Simone Veil : “Non aux avortements clandestins” et Célestin Freinet : “Non à l’ennui à l’école” ainsi que co-auteure de Non à l’intolérance, Non à l’indifférence et Non à l’individualisme. Elle est également l’auteure de La dictature nous avait jetés là (Actes Sud junior, 2018), récit poignant sur la dictature et l’exil forcé d’une famille chilienne à travers les yeux d’une petite fille, Maria.

Lire: Frida Kahlo par Marc Petitjean: la recherche du père: https://www.weculte.com/non-classe/frida-kahlo-par-marc-petitjean-la-recherche-du-pere/

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