Gainsbourg Dicale

 

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 À l’occasion du 25e anniversaire de la mort du chanteur, le journaliste Bertrand Dicale publie Tout Gainsbourg. Une somme de plus de 1 000 pages qui explore l’œuvre d’un artiste qui a souvent connu l’échec avant de triompher en 1979 avec la Marseillaise en reggae, Aux armes et cætera.

 

Placé au rang de génie de la chanson depuis son décès le 2 mars 1991, Serge Gainsbourg a d’abord connu une succession d’échecs et de tentatives artistiques plus ou moins réussies avant de devenir une légende. C’est ce que nous explique Bertrand Dicale, journaliste et auteur de plusieurs biographies (Juliette Gréco, Georges Brassens), dans un important ouvrage qu’il consacre à Gainsbourg. Une somme de plus de 1 000 pages qui entend « tout » dire sur l’artiste, qui fut longtemps un auteur au succès d’estime avant de triompher en 1979 avec la version reggae dela Marseillaise, Aux armes et cætera : « On a oublié les échecs, les impasses et les demi-tours pour ne plus percevoir qu’un chemin cohérent vers les sommets », souligne Dicale.

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De fait, nombre de ses chansons qui sont devenues des classiques, comme la Javanaise, étaient loin de faire l’unanimité et de passer en boucle dans les radios : « On considère Gainsbourg comme le parangon, le sommet d’une époque, or cette époque n’a pas écouté ses chansons », précise-t-il. Comme quoi le public est parfois ingrat. Celui qui commença sa carrière dans les années 1960 en pleine ère yé-yé en habillant ses chansons d’un jazz minimaliste n’était pas toujours raccord avec la mode d’une jeunesse plus prompte à rire et à danser le twist qu’à écouter les tourments d’un chanteur à la poétique empreinte de mélancolie très en vogue alors chez les artistes de la rive gauche.

Une adolescence marquée par la guerre et l’Occupation

Il a 30 ans en 1958 quand sort Du chant à la une !, son premier album très défendu par Boris Vian, rencontré quelques années auparavant, qui s’ouvrait par le Poinçonneur des Lilas, un titre emblématique d’un style réaliste qui marqua ses débuts. Tout Gainsbourg n’est pas vraiment une biographie au sens où son auteur n’a pas voulu retracer le parcours du chanteur, comme d’autres avant lui, tel Gilles Verlant en 2000 dans une biographie de référence sur « l’homme à la tête de chou », mais explorer l’ensemble de sa trajectoire artistique au travers de la chanson, de la peinture, de ses écrits ou de ses films. Un terrain d’exploration du sensible qui permet à Dicale de poser un regard distancié et fouillé sur le personnage, dont on sent qu’il n’était pas fan, contrairement à l’artiste, dont l’œuvre l’a profondément touché. Une manière originale d’entrer dans l’univers d’un auteur-compositeur-interprète aux multiples talents dont il relate par le biais d’une écriture très vivante la démarche, la quête de reconnaissance, le désir de partager sa poésie, ce quel que soit le médium par lequel il s’exprime. On saisit son évolution et comment s’est construit son paysage artistique intime grâce à un récit alternant analyse de ses chansons, portrait des personnalités croisées au cours de son existence et anecdotes sur sa tabagie, son goût pour la provoc, sa fascination pour le sexe et l’alcool, le monde de la publicité ou du cinéma.

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Né Lucien Ginsburg le 2 avril 1928 à Paris, il connut une adolescence marquée par la guerre et l’Occupation ainsi que par le métier de son père Joseph, juif, pianiste et peintre, installé à Paris en 1919 avec son épouse Olga, après avoir fui la Russie et sa révolution. Le désir de musique n’a pas été immédiat. Le jeune Lucien dessine souvent et rêve de devenir artiste peintre après avoir fait les beaux-arts. La frustration de la peinture l’habita longtemps, jusqu’à sa rencontre en 1947 avec sa première épouse, Élisabeth Levitzky, dont les confidences auprès de l’auteur témoignent de la difficile conversion de Gainsbourg à la chanson qu’il considérait comme un « art mineur ». Marchant sur les traces de son père, il étudie le piano en famille avec déjà des envies d’airs jazzy entendus chez Charles Trenet. Une vie très tôt placée sous le signe des femmes, de Gainsbourg à Gainsbarre, auxquelles il donna ses plus beaux titres interprétés par Juliette Gréco, Brigitte Bardot, France Gall, Jane Birkin, la muse idéale, Bambou, Catherine Deneuve, Isabelle Adjani, Charlotte sa fille ou encore Vanessa Paradis. Une histoire en mouvement qui fascine toujours vingt-cinq  ans après la mort du chanteur à l’œuvre inachevée que Bertrand Dicale fait revivre avec un réel plaisir en vrai amoureux de la chanson.

Tout Gainsbourg, de Bertrand Dicale. éditions « Jungle doc », 1 040 pages, 27 euros.

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