59e Festival Off d’Avignon. Comme le Festival In, la 59ème édition du Festival Off d’Avignon se déroulera du 5 au 26 juillet. L’occasion pour We Culte d’aller à la rencontre de Laurent Domingos, co-président avec Harold David de l’association Avignon Festival et Compagnies qui encadre le Festival, second plus grand rassemblement mondial du spectacle vivant après le Fringe d’Edimbourg.
59e Festival Off d’Avignon. Laurent Domingos : « En 2026 ce sera le 60ème anniversaire du Festival. A cette occasion on va mettre en place les Assises de la Diffusion »
En 2024, pour la première fois, un questionnaire a été soumis aux compagnies et structures de production lors de leur inscription au programme du festival Off d’Avignon pour mieux connaître « la structuration des propositions artistiques, les moyens dont elles disposaient pour être présentées au public du festival, et les résultats de diffusion des spectacles » obtenus grâce au festival.
La première conclusion de cette enquête est que les compagnies et structures de production financent majoritairement leur participation au festival Off Avignon avec des ressources privées et que si près de la moitié des compagnies peuvent accéder à des subventions, celles-ci restent très modestes. La conclusion la plus importante de cette enquête porte sur le résultat obtenus en terme de diffusion post-festival. Celle-ci est « faible et limitée au regard des investissements et de la prise de risque consentie par les compagnies et les structures de production car près de 80% d’entre elles déclarent avoir obtenu entre 0 et 5 dates en tournée sur les saisons précédentes et en cours ».
Nous avons pu rencontrer Laurent Domingos qui co-préside avec Harold David l’association Avignon Festival et Compagnies qui encadre le Festival. Nous l’avons interrogé sur les nouveautés de cette édition et échanger avec lui sur les résultats de cette enquête et, de façon plus générale, sur la crise que traverse le spectacle vivant.
Quelle sont les nouveautés du Festival Off en 2025 ?
Laurent Domingos : La première création importante est celle du village Tadamm, le village des enfants. On pense en effet qu’il faut développer le public familial qui a beaucoup de raisons pratiques de ne pas venir au Off. La garde d’enfants est une difficulté. On y va donc petit à petit, cette année avec ce village.qui est le village du Jeune Public. On travail pour 2026 sur un système de garde mais ça n’est pas évident à mettre en place compte tenu du nombre d’enfants qui pourraient être concernés.
Quelles sont vos initiatives pour donner au Festival une dimension internationale ?
Laurent Domingos : L’an dernier nous avions invité Taiwan. Cette année c’est le Brésil. qui va être mis à l’honneur avec des ateliers, de la danse et on va, manger et boire des spécialités locales. Le Brésil sera donc à l’honneur artistiquement mais on parlera aussi de la politique culturelle et sociale, de la déforestation et d’écologie.
On peut s’attendre à d’autres nouveautés cette année ?
Laurent Domingos : On va organiser des points de vente physiques de la billetterie du Off à côté de celle qui est accessible sur Internet pour aider les festivaliers qui recherchent un contact humain.
On a mis également en place des dispositifs à destination des professionnels sous forme de rencontres, d’outils de mise en réseau et des banquets pour favoriser les rencontres entre compagnies et programmateurs de façon à travailler sur la diffusion. On poursuit aussi le « label off » pour proposer au public et aux compagnies un degré d’accueil professionnel dans des salles labellisées.
Le nombre de spectacles est-il encore en augmentation ?
Laurent Domingos : Le nombre des spectacles n’est pas le chiffre le plus important. Ce qui est important c’est le nombre de représentations car toutes les compagnies ne viennent plus pendant toute la durée du Festival. On en est à 27 400 représentations cette année, soit un peu plus que l’année dernière où le festival avait duré moins longtemps.
Que représente pour vous ce Festival ?
Laurent Domingos : Venir au Off c’est un risque énorme. Il faut des épaules solides et être près à perdre. Mais il y a aussi de très belles histoires de compagnies qui ont réussi grâce à Avignon. Le Off est un lieu pour tenter le coup et c’est un lieu d’existence.
On parle d’Avignon comme un marché alors qu’Avignon c’est d’abord un Festival. Avignon crée une vie artistique même si c’est aussi un marché. C’est un lieu très précieux pour les intermittents, un lieu où on vient rencontrer d’autres artistes, un public et jouer plus de 20 fois un spectacle ce qui est une occasion exceptionnelle.
Est-ce que vous ressentez à Avignon la crise que traverse le spectacle vivant ?
Laurent Domingos : C’est la diffusion qui est menacée aujourd’hui et non la création. On est dans un monde où il y a beaucoup de créations mais dans une économie où les programmateurs ont de moins en moins d’ argent pour faire venir des spectacles car les subventions diminuent. Le Festival Off est une sorte d’Arche de Noé . Si une compagnie veut se développer au national elle doit venir au Festival Off ou faire de longues séries de représentations à Paris.
Dans un monde où la diffusion est en crise les créations en cours viennent tenter leur chance à Avignon. Mais c’est vrai, le Off est une sorte de symptôme : le nombre des créations est un indice de la bonne santé artistique de la France. Mais c’est aussi un lieu de refuge et d’espoir pour des milliers d’artistes. Rester en local est très difficile mais venir au Off n’est plus du tout une assurance de trouver une diffusion.
Les chiffres d’une étude que nous avons faites portent sur 2023 et 2024. Ils montrent que beaucoup de compagnies trouvent moins de 5 dates à Avignon et ça ne leur permet pas de survivre. Mais les répercussions de la crise sont encore à venir.
Est-ce que le Festival peut prendre des initiatives pour faire face à cette crise ?
Laurent Domingos : En 2026 ce sera le 60ème anniversaire du Festival. A cette occasion on va mettre en place les Assises de la Diffusion. On va inviter tous les acteurs concernés, l’Etat, les institutions, les territoires pour tenter de mettre en place une sorte de Plan Marshall pour changer le jeu. Il faudra bien sûr des engagements publiques mais aussi des idées venant des programmateurs et des compagnies. On pense que le Off est le meilleur endroit pour aborder ce sujet puisque c’est le second rassemblement mondial du spectacle vivant après le Fringe d’Edimbourg.
Entretien réalisé par Yves Le Pape
- Festival Off d’Avignon, du 5 au 26 juillet 2025. Toutes les informations sur le site du festival ICI
.