Théâtre, musiques… les mille émotions des scènes d’Avignon

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Théâtre, musiques... Mayra Andrade (c) Raynaud de Lage

Théâtre, musiques… Il y a de multiples parcours possibles au sein des festivals d’Avignon. Il y en a pour tous les publics et pour toutes les sensibilités. Notre premier parcours nous a conduit de la Cour d’Honneur et le chant de la cap-verdienne Mayra Andrade au théâtre de la Compagnie des Asphodèles du Colibri qui met à l’honneur l’écrivain Boualem Sansal emprisonné actuellement en Algérie. Nous avons fait étape également pour découvrir le seul en scène très personnel de Mehdi Dix et pour retrouver HK en amoureux de Jacques Brel, lui qu’on a connu avec « On lâche rien », l’hymne des grandes manifestations populaires de ces dernières années.

Medhi Dix (c) DR


Difficile de situer ce seul en scène. Mehdi Dix a connu un long parcours qui l’a conduit du côté de la musique puis du slam. Il s’est posé un moment pour construire ce spectacle où il se raconte. Il nous fait surtout vibrer avec son amour des mots et de la langue française qui est pour lui « un trésor de paix car de la paix il n’y en a guère ». A ceux qui ont connu Raymond Devos, il rappelle le plaisir qu’on peut prendre avec les jeux de mots. Et Mehdi s’en délecte à sa manière, avec son propre personnage dans ce qu’il nomme « un spectacle littérire« . Il y a beaucoup de délicatesse dans ses textes et une grande sensibilité. Mais aussi de l’engagement quand il affirme « sache que le monde
appartient à ceux pour qui tu te lèves tôt »
. Un spectacle qui amuse autant qu’il donne à réfléchir au croisement de Raymond Devos et de Grand Corps Malade.

  • HK : « Le jour où j’ai rencontré Brel« 
Théâtre, musiques… HK

Sous le nom de HK, Kaddour Hadadi est le héros des grandes manifestations populaires des deux dernières décennies qui reprennent régulièrement cette hymne de l’engagement, « On lâche rien« , sa chanson. On a connu HK avec le groupe Ministère des affaires populaires puis il est devenu HK et les Saltimbanks. A côté deson propre répertoire il a souvent puisé dans le patrimoine par exemple avec son album de reprises HK présente les déserteurs, un bel album de chansons de Ferré, Nougaro, Piaf, Vian et bien d’autres dont Jacques Brel.

Et c’est autour de sa relation au Grand Jacques qu’il a construit un spectacle émouvant où il évoque pour nous toutes les rencontres qu’il a pu faire avec les chansons de Brel tout au long de son parcours dans la musique jusqu’à son propre Olympia de novembre 2023. HK chante Brel superbement et sa version du Plat pays est une merveille. Il est accompagné au piano par Thibault Delbart et le violoncelle de la géniale Adrienne Auclair donne à ce concert une dimension tout à fait exceptionnelle.


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Nous avions déjà admiré en avant-première Celle que vous croyez la nouvelle création de la compagnie lyonnaise des Asphodèles du Colibri et d’Albane Laquet qui adaptait là un
roman de Camille Laurens.

La compagnie reprend également Le Village de l’Allemand ou le journal des frères Schiller qui est également l’adaptation d’un roman, en l’occurrence celui que Boualem Sansal publiait en 2008. Ce spectacle avait été créé en 2023. Il est repris cette année alors même l’écrivain est maintenant condamné et emprisonné en Algérie.

Ce texte est basé sur l’histoire vrai d’un combattant nazi qui, au terme d’un parcours sinueux refait sa vie dans un village algérien isolé où il devient une personnalité respectée. Le roman raconte son assassinat pendant la guerre que les islamistes du GIA ont mené contre le gouvernement algérien.

Les fils de cet homme qui vivent en France vont découvrir à sa mort le passé nazi de leur père. Dans le foisonnement du roman de Sansal c’est ce thème qui est privilégié par Thierry Auzer, le directeur des Asphodèles, et Luca Franceshi qui met en scène le spectacle. C’est donc la dimension la plus universelle du roman qu’ils ont retenue : comment vivre la découverte d’un passé familiale aussi scandaleux. Toute la troupe des Asphodèles fait vivre avec passion ce texte magnifique et en font un hommage essentiel à l’écrivain emprisonné.

Théâtre, musiques… Mayra Andrade dans la Cour d’Honneur (c)Raynaud de Lage

Mayra Andrade est née à Cuba mais c’est au Cap Vert qu’elle a vécu son enfance et qu’elle a
commencé à chanter. Elle est restée ensuite longtemps à Paris et parle un excellent français qui lui
permet de belles transitions entre ses chansons. Elle vit aujourd’hui au Portugal.

Elle dispose d’une discographie impressionnante qu’elle a voulu revisiter pour en présenter une sélection dans un format très sobre avec l’accompagnement d’une seule guitare, celle du guitariste capverdien Djodje Almeida, un instrumentiste exceptionnel.

Ce duo occupe avec aisance l’espace immense de la Cour d’Honneur. Par sa voix, sa gestuelle, son aura Mayra Andrade réussit à entraîner avec elle un public très rapidement conquis.  Elle le fait participer très activement et la barrière de la voix disparaît dans l’intensité du chant. Toute la Cour d’Honneur s’enthousiasme dans une unanimité rare.

Yves Le Pape


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