Télé. Le film à voir, « Frantz » de François Ozon : chronique d’un mensonge

Télé. Dans « Frantz » François Ozon filme avec délicatesse une histoire d’amour en Allemagne, après la tuerie de 14-18. Une toute jeune femme qui a perdu son fiancé au front, se rend chaque jour sur sa tombe. Elle y rencontre un Français qui a connu son fiancé avant la guerre. Une relation va se nouer entre eux malgré un voisinage qui ne voit pas d’un bon œil l’intrusion de ce Français. La chronique d’un mensonge sur un sujet ardu, avec Pierre Niney et Paula Beer, à voir mercredi 10 mars sur Arte – 20:55

Un jour où Anna (Paula Beer) vient au cimetière de Quedlinbourg, en Allemagne, se recueillir devant le corps de son fiancé Frantz, mort au front, elle aperçoit un homme, Adrien (Pierre Niney) qui se tient près de la tombe. Il est Français et lui confie qu’avant, ils étaient amis. Plus tard, il se rend chez elle. Il est sur la réserve mais elle le questionne et il raconte par bribes, évoquant leur amitié, parle du disparu. Bientôt, elle a besoin de ces échanges qui rendent vivant celui qu’ils ont aimé. De plus, Adrien joue très bien du violon comme Frantz, ce qui les rapproche encore.

Ils vont nouer une relation faite d’élans et de tristesse, qui les poussent l’un vers l’autre. Ils sont aidés par les parents de Frantz, de braves gens très humains, heureux de connaître et d’entendre quelqu’un parler de leur fils, satisfaits qu’Anna revive. Mais Adrien dit-il toujours la vérité à propos de sa amitié avec Franz ? Il est parfois hésitant dans ses propos… Malgré des interrogations, des doutes, Anna va le trouver attirant. Jusqu’à ce qu’elle apprenne l’horrible supercherie : dans une lettre, Adrien avoue qu’il a tué Franz dans une tranchée…

François Ozon a réalisé avec « Frantz » un film formidable de délicatesse, sur un sujet ardu. Souvent là où on ne l’attend pas, le cinéaste  au travers de cette histoire dramatique, montre que le besoin de pardon est très fort, ne serait-ce que pour continuer de vivre, même avec des mensonges.

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Les deux personnages sont beaux, lumineux, bien que leurs sentiments soient  par moment trop en retrait. Sans doute comme l’étaient les jeunes Allemands au sortir de cette horreur qu’a été 14-18. Quant aux parents de Frantz, touchants, ils émeuvent davantage. Ils appartiennent à une génération, celle de l’après-guerre, qui optimise leur vie, heureux que la guerre soit terminée, car ils peuvent recommencer enfin.

Avec ce film plutôt optimiste sorti en 2016, François Ozon réussit bien plus qu’avec un discours politique, à nous faire comprendre que la vie l’emporte sur le ressentiment. Le scénario, qu’il a écrit, est inspiré d’un « remake » du film d’Ernst Lubitch « Broken lulaby » (1932), lui-même adapté d’une pièce de Maurice Rostand.

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Pierre Niney (ancien pensionnaire de la Comédie Française) est intense dans la peau d’Adrien et nous fait oublier son jeu un peu maniéré dans le biopic « Yves Saint-Laurent ». Quant à Paula Beer (Anna), c’est la nouvelle Romy Schneider. Sa fragilité apparente cache une vraie détermination. Elle a reçu le Prix Marcello Mastroïani du Meilleur espoir à la Mostra de Venise, en 2016. Elle n’avait que 22 ans. François Ozon prouve ici une fois de plus, qu’il aime infiniment le cinéma, ses comédiens. Il donne à ce film le souffle qu’on ne ressent que dans les grands romans.

Jane Hoffmann  

• Voir: « Frantz » de François Ozon avec Pierre Niney, Paula Beer, Cyrielle Clair, mercredi 10 mars sur Arte à 20 :55