Ancien leader du mythique groupe Carte de Séjour, Rachid Taha est mort d’une crise cardiaque, dans la nuit de mardi à mercredi, à son domicile parisien. Il avait 59 ans.
Figure du rock des années 1980 et de la génération black-blanc-beur, Rachid Taha incarnait à la fois la culture algérienne et le rock anglo-saxon. Avec Carte de Séjour, il avait chanté « Douce France » de Charles Trenet, de manière un brin ironique: « cher pays de mon enfance ».
Né non loin d’Oran, il était arrivé avec ses parents à l’âge de dix ans en Alsace à Sainte-Marie aux mines. Epoque où il apprend à écrire l’arabe et à parler l’arabe littéraire en écoutant à la maison Oum Kalthoum. Plus tard, il s’installe à Lyon où il fait la connaissance de Mokhtar et Mohamed Amini avec lesquels il forme en 1981 Carte de Séjour. Grâce à un mélange de rock et de raï, le groupe connait Le succès en 1986 avec la reprise aux ambiances orientales de « Douce France » qui se moquait de la soi-disant intégration après la marche des Beurs et la création de SOS Racisme. En plein débat sur le code de la nationalité, Rachid Taha et ses musiciens vont alors distribuer un exemplaire du disque dans les couloirs de l’Assemblée Nationale.
La carrière de Carte de Séjour pris fin en 1899 après un maxi 45 Tours et deux albums « Rhorhomanie » produit par l’anglais Steve Hillage et « eux et demi » qui le révèlent au grand public.
Rachid Taha chantait en français et en arabe, sa langue maternelle, qui était pour lui une manière de revendiquer sa culture
A partir de 1991, il mène une carrière solo qui lui permet d’explorer un monde fait de métissages sonores. Le tout interprété en français et en arabe, sa langue maternelle, qui était pour lui une manière de revendiquer sa culture : «Au début, chanter en arabe était un acte militant, maintenant c’est un acte artistique » nous avait-il confié en 2009 au moment de la sortie de son album « Bonjour » « Peut-être qu’un jour je parviendrai à un style “francarabe” où, disons, je chanterai le français de droite à gauche. ». Rachid Taha aimait ainsi créer des ponts entre les deux rives de la Méditerranée, sur fond de rythmes dansants, de textes sentimentaux (« Ecoute-moi camarade ») ou engagés.
A l’image de « Voilà Voilà » titre contenu dans l’album portant son nom (1993) où il dénonce le racisme, plaidant pour une France multiculturelle : « Partout partout et sur la douce France, il avancent/Partout les discours sont les mêmes/ La leçon n’a pas suffi /Faut dire qu’à la mémoire on a choisi l’oubli /Partout, partout, les discours sont les mêmes/ Etranger, tu es la cause de nos problèmes/ Moi je croyais qu’c’était fini/ Mais non, mais non, ce n’était qu’un répit/ » Chanson aujourd’hui plus que jamais d’actualité !
Un parcours marqué par huit albums créatifs et non formatés (Barbès, Olé Olé, Carte Blanche, Diwan 1 et 2, Made in médina, Tekitoi, Bonjour, Zoom) mêlant rock, électro et musique orientale, témoins de sa liberté artistique.
Rachid Taha qui avait une passion pour le rock collabora avec Brian Eno, Rodolphe Burger, Mick Jones, Damon Albarn, Robert Plant…
Il participa également au spectacle 1,2,3 Soleil à Bercy avec Khaled et Faudel en 1998. Période où résonne notamment Ya-Rayah, classique de la chanson algérienne composée par le chanteur de chââbi Dahmane El Harrachi, que Rachid Taha popularisa en France.
On n’oubliera pas non plus sa magnifique reprise « Rock the Kasbah » de The Clash, extraite du disque « Tekitoi », ni « Barra barra » interprétée dans le film La Chute du faucon noir de Ridley Scott, à la BO signée Hans Zimmer.
Ambassadeur de la diversité musicale, artiste attachant, Rachid Taha aimait brouiller les pistes à l’envi
Rachid Taha ne connaissait aucune frontière musicale célébrant aussi bien le rock, le raï, le chââbi que la chanson française. A la croisée d’un univers aux mille influences, il était de toutes les cultures. Avec une passion jamais démentie pour le rock où il collabora avec Brian Eno, Rodolphe Burger, Mick Jones, Damon Albarn, Robert Plant et beaucoup d’autres.
Ambassadeur de la diversité musicale, artiste attachant, il aimait brouiller les pistes à l’envi. Il avait très tôt mis du punk dans sa world, de la chanson dans son raï. Sa façon authentique et provoc de s’amuser de l’existence par amour d’une musique voyageuse : « Franck Zappa a dit un jour : “Il n’y a que ceux qui ont goûté au couscous qui peuvent comprendre ma musique.” souriait-il. « Eh bien ma musique, c’est un peu le couscous. Un tout, où l’on trouve Paris, mes rencontres, mes voyages, l’Amérique, l’Afrique. »
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