Le book club de We Culte/10 livres audio. Et si vous partiez en vacances avec une voix dans vos oreilles ? Que vous soyez dans le train, sur la plage ou en balade, profitez-en pour (re)découvrir ce format. Voici dix livres audio pour faire de vos vacances une bibliothèque en mouvement.
- Fabrice Caro ouvre le bal avec Fort Alamo, satire douce-amère d’un homme persuadé de provoquer la mort autour de lui dès qu’il ressent de l’irritation. Cyril, prof de lycée anodin, croit détenir un pouvoir maudit. Alors qu’approche Noël, l’absurde côtoie la mélancolie dans cette comédie sur fond d’effondrement personnel. Thomas VDB, tout en retenue, donne à entendre avec une précision comique millimétrée les glissements du quotidien vers l’étrangeté, et redonne à la voix ce qu’elle a parfois perdu à force de performance : une humanité légère, un grain d’ironie.
- Plus terrien, Les Bouchères de Sophie Demange donne la parole à quatre jeunes femmes formées en CAP boucherie, décidées à reprendre une boucherie artisanale. Ici, la viande est affaire de gestes, d’amitié, de labeur et de fierté, mais aussi de vengeance. On coupe, on désosse, on vend. Le quotidien des bouchères devient ode à la solidarité et au travail bien fait. Rachel Arditi, avec son timbre ferme et généreux, restitue avec bonheur les saveurs, les sons et les odeurs de cet univers à la fois brut et joyeux.
- Avec Du même bois, Marion Fayolle compose une chronique rurale presque intemporelle. Dans une ferme isolée de montagne, trois générations cohabitent au rythme des saisons, des bêtes, des tâches répétitives et du silence. Peu de dialogues, mais une tension continue entre ce que l’on dit et ce que l’on tait. Alice de Lencquesaing prête sa voix au récit avec une douceur grave, qui épouse le relief des paysages, les silences obstinés, les gestes mille fois répétés. On entend les pas dans la neige, les portières qui claquent, la respiration du bois.
- Pierre Lemaître, dans Un avenir radieux – qui constitue le troisième volet de sa fresque familiale mais peut très bien se lire et s’écouter sans les deux premiers – propulse les Pelletier dans les années 1960, entre affaires familiales, traumatismes d’enfance et mission d’espionnage à Prague en pleine Guerre froide. Roman choral, vif et ironique, où les ambitions croisent les failles intimes. Philippe Sollier en donne une lecture sobre et nuancée, épousant les tensions souterraines et les éclats de comédie noire avec une discrétion expressive parfaitement ajustée.
- Dans L’inconnue du portrait, Camille de Peretti explore les ramifications d’une histoire familiale à travers la redécouverte d’un tableau. Un récit qui court de Vienne à New York, entre identité effacée, mémoire enfouie et secrets d’alcôve. Mathieu Buscatto, narrateur du livre, incarne à merveille cette ambiance feutrée, aristocratique, pleine de retenue et d’émotion rentrée. Il parle comme on chuchote dans un musée : avec respect, mais sans solennité.
- Avec Fragrancia, Paul Richardot propose un roman d’une originalité rare : une enquête sur une substance olfactive capable de réveiller les souvenirs les plus enfouis. Les odeurs deviennent la clé d’une intrigue sensorielle et intime, entre thriller et méditation. Anatole de Bodinat fait des merveilles avec sa voix calme, presque hypnotique. Il lit comme on inspire : en laissant au silence sa part d’évocation, en donnant aux phrases des effluves qui flottent encore après qu’elles se sont tues.
- D’or et de jungle de Jean-Christophe Rufin nous entraîne au sultanat de Brunei où une agence privée se propose de mettre la main sur l’État afin d’offrir aux maîtres de la tech la souveraineté qui leur manque pour pouvoir développer leurs technologies les plus folles. C’est l’auteur lui-même qui lit son roman, lui donnant une dimension documentaire, en parfait connaisseur des lieux. Une lecture à la première personne du réel.
- Dans Célèbre, Maud Ventura dissèque la soif de reconnaissance d’une jeune femme prête à tout pour exister dans le regard des autres, et surtout des réseaux sociaux. Un récit à la fois grinçant, ludique et cruel, sur les injonctions à la visibilité. Suzanne Jouannet lit ce texte avec une intensité froide, presque clinique, comme si la narratrice devenait elle-même l’algorithme qu’elle cherche à dompter. Une lecture coupante, comme un selfie trop cadré.
- Leïla Slimani, avec J’emporterai le feu – également le troisième tome de sa trilogie familiale –compose une fresque marocaine en deux temps : deux générations de femmes, deux récits imbriqués de désir d’émancipation, d’appartenance, de filiation. Il y est question de langue, de mémoire, de silence aussi. Suliane Brahim offre à cette histoire une voix vibrante de justesse, douce et ferme, capable de porter l’indignation comme la tendresse. Un feu intérieur à la hauteur du titre.
- Enfin, La ballerine de Kiev de Stéphanie Perez confronte un couple de danseurs de Kiev à la guerre. L’art comme ultime refuge, la grâce comme résistance. Le texte mêle récit intime, tension géopolitique et délicatesse chorégraphique. Maia Baran prête sa voix à cette héroïne debout sur les ruines avec une précision émotionnelle saisissante : la légèreté d’un pas d’arabesque, la gravité d’un missile.
Il ne vous reste plus qu’à choisir votre point de départ. Une route de campagne, une chaise longue ou un quai de gare feront parfaitement l’affaire. Branchez vos écouteurs, respirez. Cet été, la voix fait tout le reste.
Henri-Charles Dahlem
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