Toutes les musiques de We Culte. Quarante ans après avoir marqué l’avant-garde new wave, le goupe Martin Dupont revient avec une grâce étonnamment contemporaine. Leur nouvel album, You Smile When It Hurts, prolonge l’esthétique singulière qui fit leur légende : une musique décalée, inventive, où synthés analogiques, voix fiévreuses et orchestrations délicates composent un clair-obscur vibrant. Alors que le groupe s’apprête à envoûter les Trans Musicales de Rennes le 4 décembre 2025, c’est l’occasion parfaite de (re)découvrir cet univers sensible et audacieux, entre modernité trouble et poésie électronique.
On pensait le groupe dissous dans les brumes de la cold wave française, figé dans la mémoire magnétique des cassettes et dans la chaleur poussiéreuse des clubs d’autrefois. Et puis, comme si le temps n’était qu’un matériau parmi d’autres, voilà que Martin Dupont revient, intensément présent, avec un album neuf You Smile When It Hurts qui sonne moins comme un retour que comme une respiration retrouvée.
Un passé qui n’a jamais cessé de battre
Né à Marseille au début des années 80, le groupe Martin Dupont s’est imposé à contre-courant, avec cette manière si particulière de conjuguer la froideur synthétique à une forme de sensualité retenue. Leur musique, à l’époque, semblait flotter entre deux battements : l’un mécanique, l’autre presque animal. On les rapprochait de Depeche Mode ou de New Order, mais ils avançaient en réalité sur une ligne parallèle, artisanale, d’une précision fragile.
Cette sensibilité créative, c’était le cœur du projet d’Alain Seghir et de Beverley Jane Crew. Trois albums sortiront qui, en à peine quatre ans, ont suffi à définir un univers. Puis le silence est tombé, aussi abrupt que leur musique était subtile.
Pendant que le groupe se tenait à distance, leurs morceaux continuaient de voyager, d’être samplés, détournés, réemployés. Des producteurs de hip-hop aux DJs techno, des réalisateurs aux maisons de couture, tous semblaient entendre chez Martin Dupont une vibration moderne : quelque chose d’oblique, de simple et de profondément humain.
Un nouvel élan, sans nostalgie
Avec You Smile When It Hurts, le groupe réapparaît sans renier son histoire, mais en refusant le musée. À Seghir et Crew se joignent aujourd’hui Sandy Casado, Thierry Sintoni et Ollivier Leroy : des musiciens qui ne viennent pas réchauffer les braises, mais y souffler un air neuf.
Résultat, un disque où se croisent synthétiseurs analogiques et orchestrations classiques qui ajoutent une profondeur inattendue, une respiration plus ample. Les voix se répondent, se glissent dans les interstices, éclairent des zones d’ombre. On navigue d’un morceau à l’autre comme on passerait d’une pièce obscure à un patio baigné d’une lumière pâle.
Une esthétique du clair-obscur
Ce nouvel album cultive l’art du décalage, celui des angles légèrement brisés. Rien n’est frontal : les émotions se devinent, se déposent comme une poussière fine. Martin Dupont, aujourd’hui, prolongent simplement un fil qu’ils n’avaient jamais vraiment rompu, fait d’une cold wave qui reste identifiable, sans se ternir.
Les Trans Musicales : une nuit à ne pas manquer
On pourra s’en rendre compte par soi-même le jeudi 4 décembre 2025, aux Trans Musicales de Rennes. C’est là, dans ce festival qui aime les trajectoires singulières et les renaissances, que Martin Dupont dévoilera sur scène ce clair-obscur musical. Il y a fort à parier que leur univers, minimal, mélancolique, mais étonnamment moderne, prendra alors une ampleur nouvelle.
Victor Hache
- Album You Smile When It Hurts, Martin Dupont (Label Caravan / L’Autre Distribution).
- En concert: le 4 décembre aux Trans Musicales de Rennes (35), Parc Expo Hall 44; Le 13 décembre, au Bal Chavaux, Montreuil (93)





