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"Souterrain" : Après une explosion au fond de la mine, la cheffe des sauveteurs, Catherine (Catherine Trudeau), et Maxime (Joakim Robillard) ne sont pas d'accord sur l'évacuation des blessés (©Axia Films/Les Alchimistes).

Sortie cinéma. C’est un hommage à la solidarité des mineurs de fond que rend la jeune réalisatrice québécoise Sophie Dupuis dans son deuxième film, « Souterrain » (ce mercredi 26 janvier sur les écrans français), où s’entremêlent suspense poignant et drame psychologique.


Cinéma. « Souterrain » : un bel hommage aux mineurs de fond


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« Souterrain » : un film de la réalisatrice québécoise Sophie Dupuis

Le film commence par une explosion dans une mine d’or de Val d’Or, une petite ville industrielle de l’ouest du Québec. Cinq mineurs manquent à l’appel. On envoie une équipe de sauveteurs et l’on retrouve d’abord deux blessés, qu’on remonte à la surface.

Mais un différend surgit entre la cheffe des sauveteurs, Catherine (Catherine Trudeau), qui veut s’occuper en priorité des deux blessés, et le jeune Maxime (Joakim Robillard), qui veut à tout prix partir au secours des trois autres.

Le film fait alors un retour en arrière, deux mois plus tôt, afin d’expliquer ce qui anime Maxime. Celui-ci a une petite amie, qui multiplie les fausses couches, et pour le couple se pose la question de l’adoption.

État psychologique fragile

Cela perturbe Maxime, qui est déjà dans un état psychologique fragile: il ressent un fort sentiment de culpabilité après avoir été responsable d’un accident de la route, en état d’ivresse, qui a rendu handicapé un de ses meilleurs amis, Julien (Théodore Pellerin), mineur comme lui.



Maxime fait tout pour essayer de se racheter: il téléphone souvent à Julien, le sort, l’aide à chercher du travail, lui souhaite son anniversaire, essaye de lui remonter le moral. Mais le vieux Mario (James Hyndman), père de Julien et mineur lui aussi, ne pardonne pas à Maxime. « Tu as gâché ma vie », lui dit-il. Alors, quand survient l’explosion, Maxime veut tout faire pour sauver tout le monde…

Un premier film très remarqué

Le premier film de Sophie Dupuis,« Chien de Garde », avait été très remarqué par la critique au Québec et avait été sélectionné pour représenter le Canada dans la course aux Oscars 2018. Il s’agissait d’un drame social qui racontait le quotidien d’une famille à problèmes, dont les deux garçons étaient impliqués dans les milieux de la drogue.

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« Souterrain » : (photo) AXIA FILMS

Dans « Souterrain », la réalisatrice s’intéresse encore à la famille mais élargit son intérêt au monde des mineurs de fond, qu’elle connaît bien. « J’ai grandi dans la région minière et industrielle du Val d’Or », explique-t-elle. « Toute ma famille, grands-parents et cousins compris, ont travaillé dans les mines. Ma mère était infirmière pour une compagnie minière. C’était donc un environnement totalement banal pour moi et pour les habitants de cette région. Lorsque je suis arrivée à Montréal pour suivre des études de cinéma, les gens sur place étaient très curieux de ce monde qui leur paraissait très étrange. C’est à ce moment-là que je me suis aperçue que c’était un sujet à traiter ».

Tournage dans deux vraies mines

Elle a tourné les scènes souterraines dans deux vraies mines de la région, et la fin de son film installe un suspense entrevu au début. Mais entre les deux, elle dresse des portraits de personnages –Maxime et les autres– dans un style naturaliste, avec une mise en scène sobre mais très efficace, où l’intime prend le pas sur le spectaculaire.

C’est surtout la solidarité entre les mineurs, sous terre et dans la vie de tous les jours, sur laquelle elle voulait mettre l’accent. « Ce qui m’a finalement fait avancer (dans l’écriture du scénario), c’est lorsque j’ai réalisé que ce qui m’intéressait avant tout c’était la fraternité qui liait tous ces gens. La mine est leur deuxième famille. En bas il n’y a pas de collègues, il n’y a que des frères. Les différences d’âge et les origines ne comptent pas ».

La réplique la plus touchante

Ainsi, quand il constate au téléphone que Maxime n’a pas le moral, Julien, qui a des difficultés d’élocution, est là pour le soutenir à son tour: « Je parle pas vite, mais je peux t’écouter », lui dit-il, dans la plus touchante réplique du film.



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Sophie Dupuis, réalistrice du film « Souterrain »

Outre cette solidarité et le sentiment de culpabilité, la réalisatrice pose la question de la masculinité, dans un monde où les femmes sont peu nombreuses: Julien, handicapé, ne se sent plus un homme à part entière et a perdu sa petite amie; il est question de l’adoption pour ceux qui ne peuvent être pères, comme Maxime et un de ses collègues plus âgé; et, à la fin, après l’explosion, ces mineurs rugueux et virils ne cachent pas leur émotion et leurs larmes.

Mais si le film est âpre et sombre, le ton n’en est pas misérabiliste ou pessimiste. Les personnages sonnent vrai, ils ont dans le cœur la lueur qui leur manque quand ils sont sous terre, et malgré le drame psychologique qu’ils vivent, le film ne manque pas de bonne humeur, de moments légers et de motifs d’espoir –parsemés de jurons québécois qui, pour les spectateurs français, ont un parfum exotique: « aweille », « osti », « câlisse », « tabarnac »

Jean-Michel Comte

LA PHRASE

« Il manque cinq gars à l’appel » (un des responsables de la mine, au début du film, après l’explosion).


  • A voir : « Souterrain » (Canada, 1h37). Réalisation: Sophie Dupuis. Avec Joakim Robillard, Théodore Pellerin, James Hyndman (Sortie le 26 janvier 2022)

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