Bandes dessinées We Culte : nos trois coups de coeur du mois

Bandes dessinées We Culte. La folie rode toujours autour des hommes. La triste actualité l’a montré récemment. Mais la folie est aussi source d’espoir, d’amour et d’envie. Les trois bandes dessinées que nous vous proposons ce mois-ci ont un rapport avec cette notion subjective et pourtant si absolue. Folles expériences, art fou et folie des hommes. Les destins se croisent dans l’antichambre de nos consciences.

Bandes dessinées We Culte : nos trois coups de coeur du mois

« LE BAL DE FOLLES »

C’est une adaptation en BD du roman de Victoria MAS qui nous a bouleversé. L’histoire, à peine croyable est authentique et elle donne des frissons quand on prend le recul nécessaire.

Eugénie est une jeune fille de bonne famille. Son frère a un chemin tout tracé, il reprendra l’étude de Notaire de leur père. Quant à Eugénie, il faudrait qu’elle trouve un bon mari. Nous sommes à Paris, à la fin du 19^ème siècle.

Eugénie a un don, un pouvoir qu’elle ne maitrise pas. Elle peut dialoguer avec celles et ceux qui sont morts. Dans sa famille, on voit tout cela d’un mauvais œil. Le paroxysme survient alors que sa grand-mère est alitée. La jeune Eugénie, sur les conseils de feu son grand-père, indique où se trouve un médaillon égaré depuis bien longtemps. La famille doit réagir. Eugénie va être enfermée à La Salpêtrière, là ou sévit le Dr Charcot et ses méthodes inhabituelles.

L’embuscade dans laquelle tombe Eugénie la plonge dans une détresse profonde. Pourtant, elle arrive à établir un lien avec l’infirmière Geneviève qui pleure sa sœur Blandine aujourd’hui disparue.

Et le titre ? Me direz-vous. Il vient d’une pratique de cette époque. Le jour du mardi gras, toute la fine fleur parisienne se presse à cette manifestation où les notables côtoient les aliénées. Le temps d’une soirée, la musique est la seule à être endiablée. Les médecins, dont Charcot, pensaient que cela pouvait être un élément de guérison pour ces femmes perdues dans les limbes de leur tristesse. Pour Eugénie et Geneviève, ce bal offre d’autres perspectives.

NOTRE AVIS : 

Le graphisme de cet album en couleur directe propose des aquarelles pour chaque case. La douceur du trait n’efface pas la rudesse des situations. Mais ces couleurs, ce flou donnent à la lecture une fluidité rassurante. Le rythme est soutenu de page en page et l’aventure à laquelle nous sommes conviés nous redonnent confiance en l’être humain sensé et sensible.

• « Le Bal Des Folles », Arianna Melone – Véro Cazot- Victoria Mas / Albin Michel 136 pages couleur

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« UN MONDE D’ART BRUT »

Connaissez-vous l’art brut ? Sa définition ? Son origine ? Quelque soit votre réponse, ce livre répond à bien des zones floues qui demeurent en vous.

En effet, Oriol Mallet et Christian Berst nous proposent au travers de cette bande dessinée de parcourir l’histoire de cet art et d’en découvrir quelques artistes majeurs et leurs œuvres.

Loin d’un catalogue rébarbatif, le récit invite à suivre une jeune étudiante des Beaux-Arts qui vient visiter le musée d’art contemporain Kunsthalle à Berne en Suisse. Elle y fait la connaissance de trois fantômes qui vont l’accompagner pendant toute sa visite. Hans Prinzhorn, Jean Dubuffet et Harald Szeemann (ou plutôt leurs spectres) vont guider la jeune femme dans les différentes salles d’exposition.

Un dialogue savoureux s’installe entre elle qui croit à une visite théâtralisée et eux qui se sentent investis de la mission d’expliquer et de faire aimer l’art brut.

Ils lui apprennent que l’art brut est au départ l’art des fous. D’artistes enfermés en hôpitaux psychiatriques qui à travers des créations multiples et extravagantes vont créer, malgré eux, ce courant dans l’art contemporain. Au fil des pages, les explications précèdent ou suivent la découverte d’artistes tels que Carlo Zinelli ou encore Madge Gill.

NOTRE AVIS : 

Très richement documenté, les illustrations nous permettent d’entrapercevoir les œuvres et leur contexte. Car certains artistes ont utilisé les murs de leur prison sanitaire pour y faire éclore au grand jour leur talent.

Le graphisme réaliste et nerveux séduit par son dynamisme. La narration fluide et riche nous ouvre des horizons exceptionnels. Un beau cahier regroupe en fin d’album quelques œuvres majeures de ces artistes hors norme.

• « Un Monde d’Art Brut », Oriol Mallet – Christian Berst / Delcourt Encrages 120 pages couleur

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« LA FIANCÉE » –d’après la vie d’Odette Nilès, l’amoureuse de Guy Môquet

La folie des hommes a conduit certains à une deuxième guerre mondiale. A travers cette histoire sensible et romanesque, on mesure encore une fois les drames qui ont sali pour longtemps les esprits purs.

Odette est une jeune femme engagée. Elle milite aux « Jeunes filles de France », un mouvement proche du parti communiste français. Encouragée par son père et sa mère, elle est bien décidée à lutter contre l’envahisseur nazi. Elle prend des risques en manifestant et au cours d’une journée d’action, elle est arrêtée puis envoyée dans un camp à Choisel. Les espaces de rétention n’étant pas mixtes, c’est autour d’une barrière qu’elle a fait la connaissance du jeune Guy Môquet. Leurs espoirs, leur histoire et sa jeunesse s’étourdiront dans le ciel du 22 octobre 1941.

NOTRE AVIS :

Cet album en couleurs directes propose un graphisme très reposant, calme, serein. Cette grande opposition avec les évènements narrés redonne une force à la volonté des hommes et des femmes emprisonnés pour leurs idées. Dans une enveloppe à la fin de l’album est glissé un fac-similé de la lettre d’adieu que Guy a adressé à Odette. Quelques mots qui résonnent. Quelques mots d’amours.

• « La Fiancée » –d’après la vie d’Odette Nilès, l’amoureuse de Guy Môquet / Soleil-Noctambule 96 pages en couleur

Christophe Ravet