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"La Verónica" : Femme de footballeur et mannequin célèbre, Verónica (Mariana Di Girolamo) fait des selfies en maillot de bain avec ses copines devant sa piscine, pour gagner des abonnés sur Instagram (©Moonlight Distribution).

Sortie cinéma. En Angleterre on les surnomme les WAGs (Wives And Girlfriends), les « épouses et petites amies » des sportifs célèbres, notamment les footballeurs. C’est le portrait satirique et sans concession de l’une d’elles, au Chili, que dresse le film « La Verónica », qui sort ce mercredi 17 août sur les écrans.


« La Verónica » : Femme de footballeur, mannequin et accro à Instagram


Après avoir vécu quatre ans à Dubaï, le footballeur chilien Javier Matamala, héros sportif national, et sa femme Verónica Lara (Mariana Di Girolamo), mannequin célèbre, sont de retour au pays.

Deux millions de followers

Mais Verónica ne se soucie pas de la carrière de son mari ou de l’éducation de leur bébé, une petite fille prénommée Amanda. Tout ce qui compte pour elle, c’est de développer sa notoriété sur les réseaux sociaux, et notamment Instagram.

Pour devenir l’égérie d’une marque de cosmétiques sur le point de sortir un nouveau rouge à lèvres, elle doit atteindre 2 millions de « followers », et fait tout pour cela. Elle multiplie les vidéos et les selfies d’elle et de ses amies en bikini au bord de la piscine. Elle veut poster sur Instagram une photo d’elle avec Amanda, susceptible de multiplier les clics, mais son mari ne veut pas.

Enquête

Elle a du mal à s’occuper de son bébé, et même à la supporter: quand elle pleure, quand elle ne pleure pas. Elle est jalouse de l’intérêt que porte son mari à cette enfant. Bref, elle n’a pas vraiment la fibre maternelle. D’ailleurs elle fait l’objet d’une enquête sur la mort de son premier enfant, quelques années auparavant, et est interrogée régulièrement par le procureur chargé de l’affaire.

Mais cela ne l’empêche pas de continuer à s’accrocher aux réseaux sociaux, de courir sans relâche derrière la notoriété, de chercher à augmenter son pouvoir d’influenceuse, de vouloir être plus célèbre que son footballeur de mari, d’être autre chose que « la Première Dame » du football chilien…



Plans-séquence fixes

C’est le 6e film du réalisateur chilien Leonardo Medel, 39 ans, mais le premier qui sort dans les salles françaises. Et il a choisi une réalisation très originale. Le film est composé de 53 plans-séquences fixes où l’on voit Verónica face caméra: interviews filmées, entretiens avec une journaliste amie qui écrit sa biographie autorisée, auditions pour une pub, interrogatoires par le procureur, dialogues avec son mari, selfies avec d’autres jeunes femmes (« Prends un air stupide, on va faire un selfie », dit-elle à l’une d’elles), vidéos au bord de la piscine, entretien d’embauche d’une nouvelle baby-sitter, échanges avec sa mère, disputes avec la gouvernante, clip pour une campagne en faveur des grands brûlés, séances photos en studio, émission de télévision, observation d’une éclipse du soleil avec sa famille équipée de lunettes spéciales, plaisanteries avec les jeunes neveux de son mari, etc.

Omniprésence

Verónica est parfois dans le cadre, parfois non, parfois sur les côtés, mais elle est de tous les plans, présente dans le film à 100% du début à la fin. Elle est odieuse et manipulatrice, ou fragile et désemparée, ou forte et sûre d’elle quand le procureur l’interroge, jalouse de son mari à qui elle offre quand même cinq prostituées et une voiture de course pour son anniversaire…

Ce découpage du film (dans un ordre anarchique) et l’omniprésence du personnage principal soulignent l’importance des dialogues et surtout la performance bluffante, dans ce rôle d’une Victoria Beckham chilienne, de l’actrice principale, Mariana Di Girolamo, révélée il y a deux ans dans EMA, le remarquable film du talentueux réalisateur chilien Pablo Larrain.

Frontière entre public et privé

Dans cette succession de scènes où s’étiolent les frontières entre public et privé, vérité et mensonge, éthique et immoralité, on apprend peu à peu à connaître cette Verónica, ce qu’elle veut vraiment, son caractère, ses forces et ses faiblesses, sa vie d’épouse et de mère, son histoire. Et le film déroule un vrai récit, avec un suspense inattendu dans le dernier quart d’heure.

Leonardo Medel, qui a exercé dans la pub et connaît bien les réseaux sociaux (sa femme a « travaillé » comme influenceuse sur le Net pendant quatre ans), explique avoir choisi ce procédé de filmer Verónica face caméra « en voyant le système de narration des «youtubeurs», des personnalités qui parlent directement à la caméra ».



Internet et réseaux sociaux, au Chili ou ailleurs

Bien sûr ce phénomène de présence quotidienne d’Internet et des réseaux sociaux dans la vie des gens n’a rien de nouveau et existe sur quasiment toute la planète. Mais le réalisateur a voulu insister sur l’importance que cela a pris désormais dans son pays:  » Verónica et Javier sont des personnages qui viennent des classes inférieures, comme beaucoup de footballeurs chiliens, et je pense que c’est une métaphore générale sur le Chili. C’est un pays humble qui, il y a 40 ans, était carrément pauvre et qui connaît aujourd’hui le problème de l’enrichissement subit », conclut-il.

Jean-Michel Comte

LA PHRASE : « Je suis une femme stupide. Et l’opinion publique ne souhaite pas me voir changer » (Verónica, à la journaliste qui écrit sa biographie).


« La Verónica » (Chili, 1h40). Réalisation: Leonardo Medel. Avec Mariana Di Girolamo, Antonia Giesen, Ariel Mateluna (Sortie 17 août 2022)

cinégong logoRetrouvez cette chronique ainsi que l’ensemble des sorties cinéma de Jean-Michel Comte sur le site Cinégong


 

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