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Festival d'Avignon 2023 : une édition exceptionnelle et de belles découvertes (c) DR

Théâtre. Le In et le Off du Festival d’Avignon sont maintenant terminés. Une édition exceptionnelle pour le In où plus de 120 000 entrées payantes ont été enregistrées ce qui représente un taux de fréquentation de 94 %. On peut y ajouter les 300 000 spectateurs des retransmissions télévisées. On compte 15% du public qui se rendait pour la première fois au Festival et 17% de spectateurs étrangers, ce qui valide le choix de mettre en valeur une langue lors de chaque édition du Festival. Tiago Rodrigues a donc tout lieu d’être satisfait de sa première programmation. Retour sur quelques spectacles vus au cours de la dernière semaine.

On danse bien sûr à Avignon

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Festival d’Avignon : The Romeo (c) Raynaud de Lage

Retour d’abord dans le In avec le second spectacle de la cour d’honneur, The Romeo de Trajall Harrell, chorégraphe et danseur américain qui dirige le Schauspielhaus Zürich Dance Ensemble. Lors du spectacle de Philippe Quesne on cherchait les traces du Jardin des Délices de Jérôme Bosch qui donnait son nom au spectacle de la carrière Boulbon. Ici on cherche le Roméo de Juliette.

Un effort assez vain car tel n’est pas le sujet de la soirée. On découvre d’abord un style de danse, dont on apprend qu’il s’inspire du voguing, une ancienne forme de danse urbaine américaine qui s’inspire des mouvements des mannequins lors des défilés de mode.

Avec un regard de néophyte on peut trouver ce style plutôt répétitif et on prend plaisir à admirer les costumes déstructurés des danseuses et danseurs et à découvrir une superbe bande son qui nous surprend avec du Satie ou une musique utilisée en d’autres temps au cinéma par Jean-Jacques Beineix.

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Festival d’Avignon : »Pokemon Crew » (c) DR

Dans le Off on s’est régalé avec la jeunesse de Pokemon Crew. Ces champions du hip-hop qui ont débuté dans la rue devant l’Opéra de Lyon. Après une belle carrière internationale très sportive, ils ont pris la voie de la chorégraphie sous l’impulsion de leur directeur artistique Riyad Fghani.

Au moment où leur danse entre dans le programme des Jeux Olympiques de Paris, ils ont choisi de créer De la rue aux Jeux Olympiques, un spectacle qui raconte avec brio et une belle énergie l’histoire de leur danse. C’est réjouissant, créatif et on (re)découvre une pratique urbaine qui irrigue désormais brillamment la danse contemporaine en France.

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Festival d’Avignon : « Le Syndrome de Stendhal » (c) Riccardo Olerhead

Sur les scènes de théâtre

Les hasards du bouche à oreille nous ont conduit vers trois spectacles du Off : Pannonica baronne du jazz, Le syndrome de Stendhal et le Huitième ciel.

Pannonica baronne du jazz, c’est une pièce d’Olivia Elkaïm, mise en scène Christophe Gand qui nous raconte la vie de la baronne Pannonica de Koenigswarter, dite Nica de Koenigswarter, née Rothschild le 10 décembre 1913. Elle est incarnée par la grande actrice Natacha Régnier, prix d’interprétation féminine à Cannes en 1999.

Accompagnée du musicien Raphaël Sanchez, elle nous raconte avec passion la vie de Pannonica, cette femme qui se libère de ses origines sociales et s’engage courageusement pendant la seconde guerre mondiale. C’est le jazz qui va devenir ensuite l’aventure de sa vie. Très proche de Thelonious Monk pendant trois décennies, elle va soutenir très activement des musiciens qui vont devenir des grands du jazz et lui rendront hommage par des morceaux qui lui sont dédiés. C’est ce destin si étonnant que Natacha Régnier réussit pleinement à rendre très attachant.



On change ensuite d’univers pour découvrir Le syndrome de Stendhal, une performance théâtrale de la compagnie Brut Montage, un spectacle qui « dessine une forme comique, poétique et satirique autour du monde de l’art contemporain, de sa définition à ses abus ».

Matthieu Welterlin, qui a beaucoup travaillé dans les galeries de peinture et fréquenté sûrement beaucoup de vernissages, a conçu et mis en scène ce spectacle. On sent bien qu’il sait de quoi il parle.

C’est souvent drôle, parfois surprenant et ce spectacle devient passionnant quand il propose une sorte d’interview où l’actrice Sibylle Margueron fait appel à un texte très solide de la sociologue Nathalie Heinich, une experte en matière d’art contemporain. Un spectacle savant et drôle qui a été joué aussi dans des galeries et a déjà été apprécié par beaucoup de professionnels de ce secteur.

Jean-Philippe Daguerre tient une place éminente dans le Off d’Avignon. On se souvient de Mr Haffman et du Petit coiffeur qui a conquis un vaste public lors des éditions précédentes ; Cette année il nous propose son Huitième ciel qu’il a écrit et met en scène avec en tête d’affiche l’actrice Florence Pernel qui a une immense carrière au cinéma, à la télévision et au théâtre.

On peut hésiter au premier abord à se passionner pour des personnages de la grande bourgeoisie dont les problèmes ne nous concernent pas directement. Et progressivement on sent le vernis social s’effriter au contact de réfugiés démunis et tellement attachants. La fable se fait plus sensible et on peut se laisser emporter et émouvoir finalement par le formidable jeu de Florence Pernel.

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Festival d’Avignon : Annick Cisaruk et l’accordéoniste David Venitucci revisitent les poèmes d’Aragon en chansons

Les chansons d’Avignon

La scène française de la chanson est bien présente à Avignon. On y retrouve des artistes passionnés porteurs de textes forts et de belle poésie.

Ces chansons d’auteurs, on a pu les apprécier avec Gwen Soli et Mr G et leurs chansons joyeusement féministes portées par une talentueuse interprète. Mr G est à l’origine de l’essentiel du répertoire pour les textes comme pour la musique. Il a mis aussi en musique quelques chansons que lui a proposé Garance, une belle artiste qui se trouvait elle aussi sur une scène d’Avignon cette année.

Nous y étions le jour ou Gwen Soli et Mr G partageaient leur 100ème concert, un duo maintenant bien en place dont on a pu admirer le professionnalisme et la sympathique créativité.

De son côté c’est Aragon qu’a choisi de chanter Annick Cisaruk, des poèmes dont la plupart sont mis en musique pour la première fois par le grand accordéoniste David Venitucci  qui était lui aussi sur la scène d’Avignon.

Annick Cisaruk nous rappelle parfois Juliette Greco, d’autre fois Léo Ferré. Mais elle est aussi comédienne et interprète chaque chanson comme si c’était une tirade de théâtre. C’est intense et profond.

On prend un grand plaisir à retrouver un texte chanté par Jean Ferrat entièrement renouvelé par la musique de Venitucci. Mais les deux artistes nous font surtout découvrir un Aragon moins connu. Un immense poète, un formidable accordéoniste, une excellente interprète… un très beau spectacle.

Yves Le Pape

  • Festival d’Avignon 2023 : plus d’informations ICI

 

 

 

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