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Martin Luminet : "La scène, c'est un raz-de-marée émotionnel" (photo) Chloé Nicosia

Interview/Découverte. Nouveau talent de la scène française, Martin Luminet a fait sensation cet été aux Francofolies de La Rochelle. L’occasion de rencontrer le chanteur originaire de Lyon, qui nous parle de « Monstre ». Un premier EP sorti en juin, témoin de sa vision d’une chanson teintée de spoken word intimiste, qui pour lui, est autant une manière de mettre des mots (maux) sur ce qu’il ne parvient pas à dire dans la vie, que de «canaliser ses émotions». Entretien.

Nouvelle voix de la scène française, Martin Luminet, 30 ans, est arrivé à pas de velours dans le paysage de la chanson. Il y a eu quelques coups d’essais, comme « Garçon » (2018) ou « Mauvais lions » (2019), chansons à fleur de peau, imprégnées de mots sensibles et de mélodies qui déjà touchaient au cœur. De quoi se faire remarquer par Le Chantier des Francos, outil de repérage de jeunes artistes, qui a su mettre en lumière son talent. Et il y a eu une série de singles « Cœur », « Magnifique » ou encore « Monde », préludes à son premier EP « Monstre », sorti en juin, qui lui a permis d’imposer son nom et de partager son répertoire teinté de spoken word aussi intime que tourmenté. Depuis, le chanteur originaire de Lyon pour qui la vie « est un joli film d’erreurs» enchaîne les concerts et les festivals, comme aux Francofolies de La Rochelle cet été, salle Verdière, où il n’a pas manqué de faire sensation.


Martin Luminet : « La scène, c’est un raz-de-marée émotionnel »


Comment vivez-vous les retrouvailles avec la scène, après ces périodes de confinement qu’on a vécues ?

Martin Luminet : C’est un raz-de-marée émotionnel. Les artistes et les spectateurs viennent, parce qu’il s’y joue quelque chose d’intime. Pendant un an et demi, on a été bloqué chez nous, un truc inédit et un véritable arrêt cardiaque du monde. On avait tous des émotions et on ne savait pas quoi en faire. C’est à ça que servent les salles de cinéma, de spectacles ou de sport. On avait besoin de retrouver ce moment, voir comment les émotions se mélangeaient avec les gens, ce sentiment indescriptible que l’être humain arriver à créer lors d’un concert. C’est un organe vital dont on nous avait coupé et là, avec la réouverture des festivals, il s’est réactivé.

Cela fait penser à votre chanson « Cœur », qui parle d’émotion qu’on n’arrive pas à canaliser…

Martin Luminet : C’est vrai que le cœur est à la fois un organe distrayant, déconcertant et fabuleux. Il y a des moments où je me demande si c’est vraiment moi qui pilote mon cœur, ou si ce n’est pas lui qui me gouverne. Lequel a le pouvoir sur l’autre ? Toutes mes chansons naissent de cela, d’une émotion qui n’arrive pas à trouver sa place dans une société où on nous demande d’être calme.

Vous mêlez chanson et spoken word. Pourquoi avoir choisi cette manière particulière de vous exprimer au travers de textes parlés ?

Martin Luminet : Mes chansons, c’est de la matière vécue. C’est toutes les choses que j’aurais aimé dire en vrai. Je ne les ferais pas si j’avais assez de courage. Le spoken word, est proche d’une langue du quotidien. C’est du parler et en même temps il y a des envolées, parce que j’ai le corps qui s’investit sur scène, où j’implique le chant.


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Il y a un côté intime, personnel et de presque vital, dans votre univers…Vos chansons sont-elles le reflet de votre vie ?

Martin Luminet : En fait, l’enjeu des chansons, c’est l’envie de faire quelque chose de cette intimité. C’est tout ce qu’on traverse, comment une phrase peut nous dévaster ou nous faire changer de vie. Je ne cherche pas à créer de la fiction. J’écris, avec ce que j’ai sous les yeux. Cela m’aide en tant qu’être humain à être plus attentif aux autres. Je me suis rendu compte qu’en laissant parler mon instinct, j’étais beaucoup plus heureux, plus moi-même.

Parlez-nous du titre « Monde », où vous dites « nous sommes un joli film d’erreurs»  

Martin Luminet : Peut-être que le fait d’être sensible fait que je vis tout très fort. Je suis très enthousiaste sur les belles choses. En même temps, j’ai des sentiments d’injustice profonds, des colères contre le monde entier. J’ai l’impression que même en écrivant sur l’intime, il y a l’espoir qu’on puisse se parler si on ne s’est pas compris, avant que les mots ne se transforment en violence.

Et qu’on arrête de mettre des  » murs dans les têtes  « 

Martin Luminet : Je suis un adepte de la déconstruction. Déconstruction sociale, des schémas du couple, de l’amour, de ce qu’est être un garçon, une femme. On ne peut pas entrer dans la vie sans s’interroger là-dessus. Chaque génération a le devoir de déconstruire ce que la précédente a fait pour en garder le meilleur et aussi pour corriger les choses, en le faisant à tâtons, car on n’a pas la science infuse. Et j’aimerais que d’autres générations après, puissent s’emparer de cela également, avec l’idée de toujours améliorer.

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Y a-t-il un «Monstre » en vous, comme le suggère le titre de votre album ?

Martin Luminet : Sûrement ! (rires). Ce mot « Monstre », m’est venu tout de suite. J’ai senti qu’il résonnait en moi parce que j’ai sans doute eu des réactions ou des comportements et de penser : « mais, tu es un monstre de faire ça, ce n’est pas possible de s’exprimer comme ça». Plutôt que de m’évertuer à être le gars sympa, je me dit qu’il faut que j’assume, de montrer le « monstre » avant, et qu’ensuite si on doit mettre du beau là-dessus, on ira le chercher. Parfois, le monstre peut être le héros du film. Il faut assumer ses paradoxes et ses côtés sombres, pour les corriger et se réinventer en mieux. On a tous été amoureux, on a tous été déçus et dépassés par quelque chose. C’est là, où on a le plus à se dire. On est des humains et c’est une très bonne nouvelle ! (rires).

Entretien réalisé par Victor Hache


  • EP : « Monstre » de Martin Luminet – Production La Percée
  • Tournée : 29 août, Hope Sound Festival (Fleurieux-sur-l’Arbresle – 69), 10 novembre, Atria Hotel Mercure (Toulouse- 31), 16 mai 2022, Festival Paroles et Musiques, (La Comète, Saint-Etienne – 42)

 

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