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Ahamada Smis : "éveilleur de conscience" et passeur d'émotions (c) Pauline Garraud

Interview. D’origine comorienne et marseillais d’adoption, Ahamada Smis a débuté dans le rap avant de renouer avec la culture de ses jeunes années. Le 26 novembre dernier, il a sorti sur son propre label la version vinyle de l’album « Air » . Des chansons sensibles et engagées contre l’injustice et l’oppression, sur des rythmes de danses traditionnelles de l’Ocean Indien.


Ahamada Smis : « éveilleur de conscience » et passeur d’émotions


Lors de son récent concert au 360 Music Factory à Paris, cet artiste franco-comorien a séduit le public avec les chansons de son bel album « Air« , sorti le 15 octobre dernier et le 26 novembre en version vinyle sur son propre label (Colombe Records). Des textes sensibles et engagés contre l’injustice et l’oppression, sur des rythmes de danses traditionnelles de son archipel et des îles voisines. Sur scène, ce musicien autodidacte joue aussi de la harpe comorienne, du luth gaboussi… Installé  à Marseille, Ahamada Smis a débuté dans le rap avant de renouer avec la culture de son enfance. Rencontre avec un passeur…

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Ahmada Smis : des textes sensibles et engagés contre l’injustice et l’oppression, sur des rythmes de danses traditionnelles de l’Océan indien

– Dans certains articles, on vous appelle « l’éveilleur de conscience ». Vous vous reconnaissez dans ce surnom ?

Pas vraiment. Je ne me considère pas comme un porte-parole. C’est vrai que j’ai exprimé mon opinion en ce qui concerne la dictature aux Comores, parce qu’il faut savoir dire non, mais je ne porte rien pour les autres. Je suis juste un artiste qui dit des choses.

– Vous dites de bien jolies choses sur les femmes dans la chanson « Mon oxygène« ?  

J’ai été élevé par des femmes. Aux Comores, on pratique le matriarcat. Il y a une part féminine en moi que j’assume totalement, comme la sensibilité. Je suis sans concession lorsqu’il s’agit du respect que l’on doit aux femmes. J’ai une fille et j’essaie de l’accompagner au mieux.

– Parallèlement à vos concerts, vous menez des actions culturelles notamment auprès du jeune public ?

Je travaille dans les prisons, j’anime des ateliers et je monte en effet des spectacles pour les enfants. Ils sont un peu mes directeurs artistiques ! Je suis dix fois plus exigeant lorsque je travaille pour eux. Ils décrochent vite si quelque chose ne leur plaît pas. Il faut arriver à les émerveiller chaque seconde. Ce qui me touche le plus ce sont les nouvelles générations qui écoutent les histoires et les font ensuite découvrir à leurs enfants. J’aime passer le relais.



– Comment avez-vous appris à jouer des instruments traditionnels des Comores ?

Je suis totalement autodidacte. Lorsque j’ai commencé dans le rap, j’ai appris à composer parce que je n’arrivais pas à exprimer ce que j’avais dans la tête. Pour les instruments traditionnels, j’ai regardé sur internet ! J’ai composé l’album « Air » à partir des musiques de danses traditionnelles de l’Océan Indien car je voulais les faire découvrir au public.

Il y a un autre comorien célèbre qui vit à Marseille. Vous le croisez parfois ?

Marseille c’est un village. On se connaît tous. Soprano est parti vers la variété mais dans le milieu du rap, c’est quelqu’un de précieux. Grâce à la culture hip hop, nous avons cessé de baisser la tête pour prendre la parole. Cela a été une vraie chance pour nous. A un moment donné, j’ai eu envie de me tourner vers ma culture.

– Dans des textes comme « A nos héros » ou « Mon Capitaine« , vous évoquez l’oppression mais vous parlez aussi d’humanisme, d’amour et de lumière de l’âme ?

Parce que c’est important de mettre en avant ceux qui se battent pour la paix. Très tôt, j’ai décidé que dans mes textes, il n’y aurait ni sexe, ni drogue, ni violence.



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Ahamada Smis : « J’ai vécu aux Comores jusqu’à l’âge de 10 ans et j’étais déjà indépendant » (c) Céline Porro

– Vous avez aussi créé votre propre label qui porte le nom symbolique de Colombe Records ?

Je fonctionne comme une compagnie. Avec l’album « Origines« , par exemple, je suis parti avec mon équipe pour faire le tour des îles de mon archipel. Nous avons fait 80 concerts en deux ans. Je ne pense pas qu’un producteur aurait accepté cette démarche. J’ai vu comment ça se passait quand un label te lâche. J’ai vécu aux Comores jusqu’à l’âge de 10 ans et j’étais déjà indépendant. Là-bas, au niveau de la maturité, c’est comme si tu avais 15/16 ans.

– Dans le livret, vous indiquez la signification de certaines danses comme le chigoma, une danse comorienne pratiquée par des hommes ?

C’est essentiel pour comprendre. Je l’avais déjà fait pour l’album précédent « Afrosoul« . J’explique toujours…

Entretien réalisé par Annie Grandjanin


  • Album « Air » (Colombe Records/Baco Music), disponible depuis le 15 octobre et en version vinyle le 26 novembre 2021.

Retrouvez l’ensemble des chroniques culturelles d’Annie Grandjanin sur : annieallmusic.blogspot.com


 

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