Musique/Interview. Un an après la sortie de son troisième album électro-pop « Arbre de vie », Louis Arlette est de retour avec « 5 ». Un nouvel EP marqué par une renaissance au monde et une forte pulsion de vie après des mois de période troublée, dans lequel le chanteur revisite les titres phare de ses précédents disques, dans des ambiances acoustiques. Un opus aux arrangements épurés qui donnent des airs de chanson française à son univers, mettant en lumière la poésie de ses textes teintés de mélancolie et d’onirisme.
Louis Arlette : « Je crois dans l’art qui a le pouvoir de nous élever »
Faire de sa vie une œuvre d’art, échapper au réel et voir la beauté en toute chose. Tel est le mantra de Louis Arlette, qui depuis ses débuts invente un monde qui lui est propre. Un univers singulier où se croisent onirisme et poésie, qu’il livre avec sincérité. Après un premier EP « Jeux d’Or » et trois albums marqués par une certaine urgence électro-pop, «Sourire Carnivore », «Des ruines et des poèmes » et « Arbre de vie », il revient avec « 5 ». Un nouvel EP qui fait écho aux 5 ans de sa jeune carrière, où il revisite les titres phares de ses précédents opus dans des ambiances acoustiques, sur fond de piano, guitares, violon, contrebasse et batterie.
Des arragements plus épurés qui offrent une autre dimension, peut-être plus poétiques encore à ses textes qui parlent de corps mêlés et de violence du désir. A l’image de « La Rage » qui ouvre son opus de 5 morceaux, où l’on voyage entre rêverie chamanique (« Arbre de vie »), regard introspectif mélancolique («Le Refuge »), fantasme tokyoïte (« Tokyo ») et mélodie instrumentale jouée aux claviers (« Berceuse »).
Un monde où Louis Arlette trace son sillon à la manière d’un peintre sonore, regard tourné vers la chanson française, qu’il a de plus en plus envie d’explorer. Rencontre.
Vous revenez avec un EP aux ambiances acoustiques. Envie de faire découvrir une autre facette de votre univers ?
Louis Arlette : On a souvent parlé de mes influences new wave, à cause de l’utilisation des synthétiseurs, qui fait partie de moi. Mais personnellement, je me sens très peu influencé par ce genre musical et les années 1980 encore moins. Je viens du classique et du jazz, que j’ai pratiqué en jouant du violon. J’ai voulu, un peu comme un jocker, inscrire cela sur mon CV (rires), en tout cas, avoir cette carte-là pour montrer que ça pouvait être aussi cela ma musique. Dans mes précédents albums, il y a beaucoup d’expériences acoustiques. La fin de la pandémie a réveillé en moi quelque chose de positif. J’ai vraiment eu l’envie de me retrouver en studio, de jouer en live avec des musiciens, que l’on s’amuse et que ce soit énergique, sensuel, avec l’idée de sortir un EP rapidement sans passer des mois à enregistrer, pour que la musique revive.
Vous revendiquez une forme d’intranquillité dans votre musique. « 5 », que vous avez entièrement réalisé et mixé, est plus apaisé. Faut-il y voir un désir de refuge dans une société tellement troublée ?
Louis Arlette : L’album est né de l’envie de ce retour à la vie, avec un sentiment de libération. C’est un opus ouvert, un peu chamanique, sans que je sois mystique ou croyant. J’aime ce côté conjuration du mauvais sort. Je crois dans l’art qui a le pouvoir de nous élever. Dans cet album, il y un aspect magie blanche, magie noire, pentagramme. C’est un disque de fin de souffrance et de début d’une nouvelle période.
A travers cet EP et ses arrangements épurés, les textes semblent prendre une autre dimension, comme si c’était de nouvelles chansons encore plus poétiques, littéraires et peut-être plus mélancoliques…
Louis Arlette : Il y a clairement un aspect introspectif dans mes chansons. Je continue de chercher en essayant de ne pas me répéter. Les textes sont à la base de ce que je fais, c’est le point de départ, même si la musique est très importante. C’est simplement que dans le processus d’écriture d’un morceau, la création de la musique se fait d’une manière plus transparente, pour moi. Pour le texte, je creuse vraiment, je pose des questions, je doute. J’y accorde une importance. La musique, je sais qu’elle viendra, même si je peux passer des mois dessus. Mais, je ne me fais pas de souci, si je suis content du texte, je sais que le morceau sera là. Du coup, les textes ressortent plus dans cet EP, peut-être à cause de l’approche plus classique dans les arrangements…
Lesquels sonnent plus chanson française…
Louis Arlette : Tout à fait. J’aime bien aller dans cette direction-là. Je repense aux arrangements des albums de Brel qui sont devenus classiques tout en gardant leur modernité, avec des aspects répétitifs qui sont presque comme des sample, mais si ce sont des instruments qui sont joués. Cela me parle énormémenti. Je suis heureux, pour la première fois, de m’essayer à ce challenge. Cela me plaît de me rapprocher de quelques chose de plus chanson française. Le fait d’être dans des arrangements dépouillés, vocalement cela met à nu et force à faire un vrai travail sur soi en tant que chanteur. Je pense que je n’aurais pas eu ces capacités lors des mes précédents albums, qui m’ont permis d’apprendre vocalement.
Dans «La Rage », vous évoquez la violence du désir physique. L’amour, c’est un combat ?
Louis Arlette : Je crois qu’il y a une forme de violence dans le désir et l’acte sexuel. Il y a quelque chose d’animal qui dépasse cet espèce de côté cérébral qu’on peut avoir dans les relations. Cette énergie primitive que l’on retrouve dans « La Rage », une rage brillante qui est comme une pulsion de vie. Cela coïncide avec cet EP qui témoigne d’une envie de chaleur, de sensualité.
«Arbre de vie », c’est un appel à la nature ?
Louis Arlette : Ce morceau a un côté mantra. Dans la première version, il y avait une explosion de couleurs. Mais, il y avait la possibilité d’une double lecture, que j’ai voulu explorer. Tous les titres qui sont présents dans l’album, sont des chansons dans lesquelles j’avais encore envie de dire autre chose, grâce aux arrangements nouveaux qui ont permis d’exprimer différemment mon ressenti.
Il y a aussi la vision onirique et urbaine de Tokyo, que vous connaissez bien. Le voyage est-il une source d’inspiration ?
Louis Arlette : Complètement. Quand je voyage, c’est pour aller voir quelque chose. J’aime beaucoup visiter les musées. Je peux parcourir des centaines de kilomètres pour aller voir des tableaux. Au terme des voyages, on apprend énormément de choses, ont voit le monde autrement. C’est un grand contraste car j’ai tendance à beaucoup travailler chez moi, en studio, à m’isoler. C’est intéressant, mais il faut sortir parfois, pour se confronter à une certaine réalité, casser ses codes. C’est ce contraste-là qui compte, se retrouver dans un univers autre, où on se défait de toutes ses habitudes qui peuvent devenir des manies dangereuses. J’adore la peinture, la déco ou l’architecture. C’est ce qui me pousse à partir de chez moi. J’ai vu qu’il y allait y avoir une exposition des trois Pietà de Michel-Ange au musée dell’Opera del Duomo à Florence, réunies pour la première fois et c’est sûr que j’irai. C’est un sentiment que je veux connaître dans ma vie, ce côté mystique. Je ne veux pas mourir sans avoir vu cela.
Entretien réalisé par Victor Hache
- EP « 5 ». ©️2022 Le Bruit Blanc. Plus d’infos : https://www.facebook.com/louisarlette