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Terrenoire, le duo stéphanois formé de Raphaël et Théo Herrerias. (Photo) Élisa Baudoin

Interview. Le duo stéphanois Terrenoire, qui conjugue à merveille intime et social, est l’une des plus belles sensations de ces dernières années. Nommé dans la catégorie Révélation Masculine de l’année aux 37e Victoires de la musique (le 11 février 2022 à 21h10 en direct sur France 2), il fait figure de favori.


Terrenoire : « La scène reste l’espace privilégié du sensible »


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Terrenoire : Raphaël et Théo Herrerias. (Photo) Élisa Baudoin

Leur premier album « Les Forces Contraires » était un étonnant voyage poétique au cœur des émotions. Le deuxième volume est un nouvel aboutissement. Durant le troisième confinement, en avril dernier, Raphaël et Théo Herrerias ont imaginé sept chansons plus lumineuses et dansantes que les précédentes. Ils affirment leur attachement au quartier populaire de Terrenoire à Saint-Étienne dans « 60 falaises » qui ouvre l’opus.

Le duo magnifie le quotidien grâce à la poésie mais aussi, cette fois, en faisant danser sur « L’alcool et la fumée » ou le presque funky « Se Revoir ». Terrenoire renoue avec sa fibre sociale, voire politique sur « Je veux du courage », « Misère » ou encore « L’infini ». Avec « Les météores », Théo et Raphaël se dévoilent sans artifice, en version dépouillée guitare-voix. Ces sept titres originaux donnent au duo, une nouvelle dimension scénique.

« Les Forces contraires » est sorti en 2020. Quel est le concept de ce second volume sous-titré « La mort et la lumière » ?

Raphaël Herrerias : On ne voulait pas faire une simple réédition, rajouter deux titres, faire une reprise. Ce « volume 2 » est le verso du disque. Il est plus scénique, plus physique. Nous habitons les chansons de manière plus funky.

Théo Herrerias : Nos parents et notre oncle nous ont fait découvrir Prince et la musique noire américaine. Au début, nous ne proposions que des chansons pops, électroniques, plutôt planantes. Mais au fil de la tournée, la confiance aidant, nous avons voulu explorer d’autres genres musicaux. La danse est un formidable moyen de communier.

Raphaël Herrerias : Au début, nous voulions rester dans une esthétique très précise. Mais nous aimons de plus en plus nous transformer, rebattre les cartes. Nous ne voulons pas rabâcher la même chose. Ce disque regarde plus vers l’extérieur. Avec « 60 falaises », nous avons envie de dire aux gens que nous comprenons ce qu’ils ressentent. Dans un monde qui s’individualise de manière inquiétante, on a tendance à oublier celui qui souffre. On regarde trop le winner, le champion, le prophète. On méprise celui qui n’a pas de vues et pas de « like » sur les réseaux sociaux.



Le titre « Jusqu’à mon dernier souffle » a totalisé plus d’un million de vues. Comment avez-vous vécu ce succès ?

Raphaël Herrerias : Il est difficile de ressentir des chiffres. Un nombre important de vues génère un sentiment de satisfaction lointain mais pas un état de joie profonde. Rien ne remplace l’émotion d’un concert. La scène reste l’espace privilégié du sensible. Le souvenir d’un concert peut demeurer une cicatrice heureuse, un souvenir merveilleux.



Quelle a été votre réaction quand « Jusqu’à mon dernier souffle » a été choisi par une enseigne française de grande distribution ?

Raphaël Herrerias : Ça a été vraiment un moment bizarre. En plein milieu d’une pandémie, la chanson, la plus intime, qu’on a failli ne pas mettre sur notre disque, est choisie pour être diffusée en intégralité pour un clip publicitaire à la télévision qui résonnait avec notre vie. Une famille qui attend un homme malade. Nous venions de perdre notre père. On connait ces allers et retours à l’hôpital. Ça a permis à notre chanson pure, notre petite histoire de quartier, d’aller dans tous les foyers au milieu d’une pandémie. La télé peut tout salir, mais elle a un côté démocratique, et peut permettre aussi de faire de belle chose. Il faut accepter qu’une chanson vive. On l’a faite. On l’a posée dans le lit d’une rivière et elle est partie.

Comment vivez-vous votre nomination aux Victoires de la musique ?

Raphaël Herrerias : C’était un objectif que nous nous étions fixé. Quand nous avons signé avec notre label, en 2017, nous avions même fait ce pari avec le directeur artistique : « En 2021 ou 2022, nous aurons une Victoire de la musique ! » Peut-être qu’on ne l’aura pas. Peu importe. Nous avons déjà beaucoup de chance de faire un métier qui n’en est pas un, un métier fait d’imaginaire et de jeu.

Entretien réalisé par Christian Panvert

  • Album « Les Forces contraires, la mort et la lumière » Virgin Records

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