Robert Redford : un immense acteur, passeur du cinéma américain

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Robert Redford dans "Les Trois jours du Condor" (c) Production Folamour, TCM

Cinéma/Hommage. Il avait ce charme lumineux qui a marqué l’âge d’or du cinéma américain, mais il fut bien plus qu’un acteur adulé. Robert Redford, disparu à 89 ans, laisse derrière lui une œuvre qui conjugue élégance et engagement. Héros de L’Arnaque, Out of Africa ou Les Trois jours du Condor, réalisateur oscarisé de Des gens comme les autres, fondateur du Sundance Institute, il fut un artiste moderne, militant de l’environnement et ardent défenseur du cinéma indépendant. Son sourire restera dans les mémoires, tout comme son combat pour que l’art, la nature et la liberté demeurent indissociables.

Il avait ce sourire éclatant, presque juvénile, qui éclairait l’écran et faisait chavirer les spectateurs. Mais derrière cette beauté solaire se cachait un artiste d’une rare profondeur, habité par une exigence éthique et esthétique qui n’a jamais faibli. Robert Redford s’est éteint à 89 ans, laissant derrière lui une œuvre immense, un héritage de cinéma et d’engagement.

Dès la fin des années 60, il s’impose comme l’un des visages les plus fascinants d’Hollywood. Dans Butch Cassidy et le Kid (1969), il incarne le hors-la-loi Sundance aux côtés de Paul Newman, duo mythique qui marquera une génération. Quelques années plus tard, il retrouve Newman dans L’Arnaque (1973), film d’arnaque virtuose couronné par l’Oscar du meilleur film. Sa carrière s’affirme alors : il est Jay Gatsby dans Gatsby le Magnifique (1974), journaliste opiniâtre dans Les Hommes du président (1976), espion traqué dans Les Trois jours du Condor (1975), cavalier moderne et désabusé dans Le Cavalier électrique (1979).



L’acteur sait aussi se réinventer par la réalisation. Dès son premier film, Des gens comme les autres (1980), qui obtient l’Oscar du meilleur film et du meilleur réalisateur, il choisit un sujet intime et douloureux : une famille en morceaux. Plus tard, avec Et au milieu coule une rivière (1992), il sublime la nature et la transmission. Avec L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux (1998), il signe un récit de guérison et d’humanité, tandis que Out of Africa (1985), chef-d’œuvre de Sydney Pollack dans lequel il partage l’affiche avec Meryl Streep, lui offre l’un de ses rôles les plus romantiques et mémorables.

Au-delà de sa carrière d’acteur et de réalisateur, Redford fut un passeur et un militant. En 1981, il fonde le Sundance Institute, destiné à soutenir le cinéma indépendant. Pour lui, le cinéma devait rester un espace de liberté, d’expérimentation et de sincérité : « Tout est toujours une question d’histoire. » aimait-t-il dire : « La technologie disponible pour faire des films est incroyable, mais je crois profondément que tout repose sur le récit. »

Ces convictions se prolongent dans son combat politique et écologique. Robert Redford fut l’un des premiers acteurs hollywoodiens à utiliser sa notoriété pour défendre l’environnement. Dès les années 70, il milite contre l’exploitation du Grand Canyon et pour la protection des espaces naturels américains. Il prête sa voix à de nombreuses campagnes, témoignant devant le Congrès, collaborant avec le Natural Resources Defense Council. Il était persuadé que l’art, la nature et la démocratie formaient un même écosystème fragile.



Sur le terrain des libertés civiles, son engagement est tout aussi fort. Dans Les Hommes du président, il incarne le journaliste Bob Woodward, figure du Watergate : un rôle emblématique de son attachement à la vérité et à la transparence. À travers Sundance, il donne la parole à des auteurs qui explorent les marges, la diversité, la critique sociale, loin des standards imposés par les grands studios.

Jusqu’à la fin, Redford a su se dépouiller de son image de star pour renouer avec l’essence du jeu. Dans All Is Lost (Seul en mer, 2013), il affronte la solitude et l’océan, presque sans paroles. Enfin, dans The Old Man & the Gun (2018), il tire sa révérence avec élégance, en gentleman cambrioleur, comme s’il quittait la scène sur un sourire.

Aujourd’hui, sa disparition laisse un vide immense. Mais son héritage reste incandescent. Robert Redford aura prouvé qu’on pouvait être star et poète, acteur et citoyen, séducteur et conscience. Son sourire, sa voix, ses paysages intérieurs continueront longtemps de hanter nos mémoires. Et son cinéma, fidèle à sa propre devise, nous rappelle que tout commence et tout finit par une histoire — tant qu’elle est racontée avec vérité.

Victor Hache

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