Exposition/Cinéma. Quarante ans après sa disparition, la Cinémathèque Française redonne chair et voix à Orson Welles, réalisateur, acteur, producteur et prodige insaisissable qui fit du cinéma un art total. À travers plus de quatre cents œuvres — films, archives, dessins et installations —, l’exposition « My Name is Orson Welles » retrace le parcours flamboyant d’un créateur visionnaire, tour à tour poète, illusionniste et rebelle. Un voyage au cœur d’un esprit incandescent qui n’a jamais cessé de défier le réel.
Orson Welles : Tout au long de sa vie, le réalisateur, acteur et prodige insaisissable a résisté à l’ordre établi, refusant les contraintes du cinéma d’Hollywood.
Quarante ans après sa disparition, Orson Welles revient hanter la lumière des projecteurs. La Cinémathèque Française lui consacre une exposition magistrale, « My Name is Orson Welles », déployée du 8 octobre 2025 au 11 janvier 2026, comme un vaste miroir tendu à l’un des créateurs les plus fascinants du XXᵉ siècle.
Plus de 400 œuvres, archives, extraits de films, installations et documents inédits, dessinent le portrait kaléidoscopique d’un homme qui fut tout à la fois : réalisateur, acteur, écrivain, metteur en scène, sculpteur et conteur de mondes.
Le démiurge de l’image
Dès l’entrée, le visiteur est saisi par l’ombre et la voix. Celle, grave et envoûtante, qui fit trembler l’Amérique lors de La Guerre des mondes en 1938, et qui ouvrit à Welles les portes d’Hollywood. Là, à seulement vingt-six ans, il compose son premier chef-d’œuvre, Citizen Kane, film-somme, film-monstre, où le cinéma semble se réinventer à chaque plan. Profondeur de champ, plan-séquence, montage éclaté : Welles manipule le langage de l’image comme un illusionniste sa lanterne magique. Ce jeune homme à la silhouette massive et au regard perçant n’a qu’une obsession — repousser les frontières de la création.
L’homme aux mille visages
L’exposition se déploie en cinq grandes séquences, mêlant chronologie et thèmes, comme une mosaïque où l’on suit Welles du théâtre de ses débuts jusqu’aux ombres du mythe. On y croise le prodige de quinze ans, metteur en scène d’un Jules César visionnaire ; l’exilé romantique, séjournant à Séville, fasciné par la corrida au point de vouloir reposer à Ronda ; le conteur radiophonique qui, en une nuit d’Halloween, fit croire à l’invasion des Martiens.
Puis vient le cinéaste, enfiévré, solitaire, réinventant Shakespeare et Kafka, sculptant la lumière dans Macbeth, Othello, Falstaff ou Le Procès, et signant La Soif du mal, chef-d’œuvre noir et labyrinthique.
Le combat pour la liberté
Tout au long de sa vie, Welles a résisté à l’ordre établi, refusant les contraintes d’Hollywood, préférant l’errance européenne à la compromission. Ses films sont des cathédrales inachevées, des rêves capturés sur pellicule, où se mêlent vérité et mensonge, grandeur et chute, illusion et désenchantement.
Son dernier film, Vérité et mensonge, interroge d’ailleurs l’essence même de la création : qu’est-ce que la vérité dans l’art, sinon la plus belle des impostures ?
Un mythe vivant
La Cinémathèque rend justice à cette figure indomptable en orchestrant une immersion totale dans son univers. Les archives côtoient les extraits projetés sur grand écran, les esquisses se mêlent aux visages filmés, les mots à la lumière.
On redécouvre l’homme derrière la légende : un poète de l’image, un aventurier de la pensée, un démiurge souvent incompris mais toujours libre. Comme le disait Martin Scorsese : « Voyez les films d’Orson Welles, parce qu’il est à lui seul le cinéma. »
Jane Hoffmann
- Exposition « My name is Orson Welles ». Du 8 octobre au 11 janvier 2026 à la Cinémathèque Française : 51 rue de Bercy, Paris 12e.