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Malgré des parcours différents, Mikuan (Sharon Fontaine-Ishpatao, à gauche) et Shaniss (Yamie Grégoire) sont meilleures-amies-pour-la-vie (©Les Alchimistes).

Cinéma. Partir ou rester? Deux jeunes femmes, meilleures amies du monde depuis l’enfance, se posent la question dans le film québécois KUESSIPAN. Elles font partie de la communauté des Innus, peuple indigène d’Amérique du Nord qui tente de préserver sa culture et ses origines au sein d’une société qui avale, dissout, élimine tout particularisme local et historique.


Le titre Kuessipan signifie «À toi», «À ton tour». Deuxième long-métrage de la réalisatrice québécoise Myriam Verreault, le film est tiré d’un livre en grande partie autobiographique de Naomi Fontaine, autochtone de la communauté innue, paru en 2011


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Malgré des parcours différents, Mikuan (Sharon Fontaine-Ishpatao, à gauche) et Shaniss (Yamie Grégoire) sont meilleures-amies-pour-la-vie (©Les Alchimistes).

Les Innus (ne pas confondre avec les Inuits), communauté de l’est du Canada (Labrador et Québec), sont aujourd’hui environ 18.000, répartis dans 11 réserves ethniques. Dans la région de Sept-Iles, dans le Sud-Est du Québec, sur la rive nord de l’estuaire du fleuve Saint-Laurent, Mikuan et Shaniss sont deux amies inséparables, qui se connaissent depuis l’enfance.

Choix différents

Mais à l’âge adulte, elles font des choix différents. Shaniss a vite arrêté les études et vit avec Greg, membre de la communauté, brave garçon mais petit délinquant, un peu violent parfois. Ils ont un bébé. Shaniss n’a pas de famille, sauf une tante alcoolique. C’est la famille de Mikuan qui l’accueille souvent et s’occupe d’elle.

Car Mikuan peut compter sur les siens, unis et bienveillants: grand-mère, parents, grand frère, petite sœur. Les Innus ne se mélangent pas trop aux Québécois, les « Blancs ». Mais Mikuan, contrairement à Shaniss, a des rêves d’ailleurs et veut continuer ses études. Elle s’inscrit à un atelier d’écriture à Québec et tombe amoureuse d’un « Blanc », Francis, qui partage ses aspirations.

Partir ou rester? Jalousie et tension vont venir polluer la belle amitié entre Shaniss et Mikuan. Qui, parfois se rapprochent, parfois s’opposent. Elles ont grandi, ne sont plus les deux gamines inséparables de jadis. « Des fois, j’ai l’impression qu’on est déjà vieilles », dit Shaniss à Mikuan…


Cinéma. « Kuessipan » honore la communauté innue au Nord du Québec


Communauté innue

Deuxième long-métrage de la réalisatrice québécoise Myriam Verreault, le film est tiré d’un livre en grande partie autobiographique de Naomi Fontaine, autochtone de la communauté innue, paru en 2011. Le titre Kuessipan signifie « À toi », « À ton tour ».

L’écrivaine et la réalisatrice décrivent donc cette communauté des Sept-Iles, que Mikuan décrit dans le film par ces mots, en voix off: « Mon centre du monde se situe dans une baie. Une baie de sable, recouverte de neige six mois par année ».

La vraie vie des gens

« Le mot «réserve» possède une connotation négative, mais au fond, qu’est-ce qui fait la réserve? Ce sont les gens. Et moi, je voulais montrer ce lieu à travers la vraie vie des gens… », explique Myriam Verreault.

Naomi Fontaine a participé à la fabrication du film, que raconte Myriam Verreault: « On voulait montrer la vie des Innus à travers le regard d’une fille (Mikuan), mais en même temps créer une histoire qui pouvait se passer ailleurs. Dire «voici une Innue», c’est différent de dire «voici tous les Innus», ce qui est impossible et pas forcément intéressant sur le plan dramatique. À partir d’impressions recueillies là-bas et des images fortes du livre, on a imaginé ces deux amies, Mikuan et Shaniss, qui portent en elles deux forces qui s’opposent et se nourrissent: partir, rester ».


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Comédiens débutants

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«Kuessipan», réalisé par Myriam Verreault

Pour cela, la réalisatrice a pu compter sur des comédiens pratiquement tous membres de la communauté des Innus, pour qui c’était la toute première expérience professionnelle devant une caméra. C’est le cas de Yamie Grégoire (qui joue Shanniss) et surtout de Sharon Fontaine-Ishpatao (Mikuan), omniprésente, forte et émouvante, alter ego à l’écran de Naomi Fontaine.

Le film est délicat, les personnages attachants : on les aime, on ne veut pas qu’il leur arrive des choses tristes ou graves –mais cela ne se passera pas vraiment comme ça. La fin est très joliment tournée et, pour résumer le dilemme Partir/Rester, la plus belle phrase est prononcée par Mikuan –allez, tant pis, on spoile: « Si mes pieds se laissent attirer par l’ailleurs, si ma tête ne se lasse pas d’explorer l’horizon, je saurai toujours où mon cœur est attaché. C’est peut-être un peu cela, la liberté ».

Jean-Michel Comte

LA PHRASE

« Dans ma langue maternelle, le mot «liberté» au sens large n’existe pas. Il n’y avait pas de limites, il n’y en a jamais eu » (Mikuan).


cinégong logo A voir : « KUESSIPAN »  (Canada, 1h57). Réalisation: Myriam Verreault. (Sortie le 7 juillet 2021)

  • Retrouvez cette chronique ainsi que l’ensemble des sorties cinéma de Jean-Michel Comte sur le site Cinégong

 

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