michel bouquet mort
Michel Bouquet en 1989. © MATTON YANN/SIPA

Disparition. Michel Bouquet s’est éteint à l’âge de 96 ans. Il fut un acteur complet, dont la voix grave et posée était reconnaissable entre toutes. Inoubliable interprète de « Le Roi se meurt » d’Eugène Ionesco, le comédien aura passé sa vie à servir les textes de pièces classiques ou contemporaines au théâtre, tout en tournant au cinéma avec les plus grands réalisateurs, de Claude Chabrol à François Truffaut.


Michel Bouquet : mort d’un immense acteur habité par le texte


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Michel Bouquet en 2019. Martin BUREAU / AFP

Monstre sacré du théâtre, comédien au jeu inoubliable empli de gravité et d’ambiguïté, Michel Bouquet aura joué pas moins de 800 fois « Le roi se meurt » d’Eugène Ionesco. Après 75 ans de carrière, sans doute rêvait-il de ne jamais s’arrêter de se produire, ne pouvant se passer des planches. Géant de la scène, il fut un « Avare » légendaire : « Le texte, il n’y a que le texte. Tout vient de l’auteur » disait-il d’une voix posée : « L’acteur n’est là que pour prendre la main du spectateur et lui faire serrer le cœur de l’auteur »

Il aimait passer du théâtre au grand écran. On le vit ainsi dans le rôle de l’ancien président Mitterrand dans « Le Promeneur du Champs-de-Mars » de Robert Guédiguian (2004) et incarna un magistral Javert dans « Les Misérables » de Robert Hossein (1982) : « Je suis amoureux de la pensée des autres, il n’est pas utile que l’acteur soit encombré de sa propre pensée » confiait le comédien.

Aussi discret dans la vie qu’énigmatique et troublant dans ses compositions, il reçut de nombreuses récompenses, dont deux César du meilleur acteur, en 2002 pour le film d’Anne Fontaine « Comment j’ai tué mon père », puis en 2006 pour « Le Promeneur du Champs-de-Mars ».



Né le 6 novembre 1925 à Paris, fils d’un officier, il tomba rapidement amoureux du spectacle, grâce à sa mère qui l’emmenait régulièrement à l’Opéra-Comique :« A chaque fois que le rideau se levait, il n’y avait plus l’horreur de la guerre, il n’y avait plus les Allemands autour (…), le monde irréel dépassait de très loin le monde réel. Ça a été le meilleur enseignement de ma vie » se souvenait celui qui fut d’abord apprenti pâtissier, mécanicien dentiste, manutentionnaire durant sa jeunesse, avant d’intégrer le conservatoire de Paris, en même temps que Gérard Philippe.

Il monta sur les planches dès 1944 et n’atteindra la notoriété qu’à partir de 1960, grâce notamment aux films de Claude Chabrol (« La femme infidèle », « Poulet au vinaigre »…) avec lequel il entretiendra une longue complicité

Il joua également pour François Truffaut dans « La mariée était en noir », en 1967, et « La Sirène du Mississippi » en 1968 et triompha sur scène avec « Le roi se meurt », qu’il interpréta dès 1994 puis quasiment en continu de 2004 à 2014.

Jouer fut pour lui une nécessité absolue, tout comme servir le texte des auteurs qu’il aimait faire vivre à travers ses interprétations de pièces classiques ou contemporaines. La scène ? « C’est une angoisse affreuse » observait-il « Mais c’est intéressant. Pour vivre quelque chose que l’on ne vivrait pas autrement. On ne risque rien, sauf de se casser la figure ». Et d’ajouter : « Le savoir d’un acteur, c’est de ne connaître rien et d’espérer être accompagné d’une vérité qui est dans le texte, mais ne pas savoir si on y parvient. Etre acteur, c’est endosser quelque chose qu’on n’est pas digne de recevoir et puis essayer de compenser. L’acteur, c’est un objet comme un autre, c’est une outrecuidance ».

We Culte (avec Afp)

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