BD. «Capitaine Bligh», roman graphique dessiné par un auteur de talent, Fabrice Le Hénanff, est l’histoire vraie des rébellions qu’a vécues au 18e siècle un officier de la Marine Royale anglaise, racontées à un chroniqueur du «Times». Suite à plusieurs révoltes de marins dans les ports anglais, le gouvernement s’est inquiété de tels mouvements sociaux simultanés et les journaux souhaitaient donner des réponses à leurs lecteurs. «Bligh» restera comme l’officier de toutes les mutineries.
« Capitaine Bligh » est une BD à l’ancienne avec de beaux dessins hyperréalistes. Les teintes anthracite ajoutent du mystère aux scènes et les personnages dont les visages sont montrés en gros plan comme au cinéma, évoluent dans une sorte de flou, un halo baignant chaque image
Quel adolescent n’a pas rêvé de voiliers et de pirates après la lecture de «L’Ile au trésor» de Robert L. Stevenson, ou «Un Cyclone à la Jamaïque» de Richard Hughes ? «Capitaine Bligh» (1), roman graphique de Fabrice Le Hénanff (2) ne manquera pas de répondre à leurs désirs d’aventure.
La BD nous plonge au cœur de la Royal Navy, considérée comme la meilleure marine du monde à la fin du 18ème siècle. L’histoire commence en Février 1797, en Angleterre où le mécontentement des équipages qui couvait depuis 1653 ici et là dans les ports du sud, éclate. Tous ou presque sont touchés. La Royal Navy peut-elle y faire face ? Pourquoi un tel mouvement en même temps ? Y a-t-il complot ? Fomenté par qui, les «Méthodistes», les «Irlandais unis» ou les idées révolutionnaires importées de France ?
Trois mois plus tard, le grand quotidien «The Times» envoie un chroniqueur, Monsieur De Moreau, rencontrer Sir William Bligh, capitaine du «HMS Director», afin d’en savoir plus sur un mouvement social qui ne cesse de s’amplifier.
BD. «Capitaine Bligh» : l’officier de toutes les mutineries
Le capitaine Bligh a été victime en 1789 d’une mutinerie restée tristement célèbre, sur le navire «La Bounty». A la demande du journaliste sur la façon dont elle s’est déroulée, Bligh ne cesse de parler. Le passage du Cap Horn, mythique point invisible sur les cartes où des marins aguerris ont flanché. Son arrivée à Tahiti accompagné de Christian Fletcher, a qui il a donné le rang de lieutenant suppléant, au détriment de son second Fryer. Cette décision et les rapports tendus entre officiers et matelots, dus à une mauvaise nourriture, ajoutée aux brimades diverses, plus la longueur du périple, ont conduit les hommes à la mutinerie. Christian Fletcher en est l’instigateur.
Le capitaine Bligh, héros de cette BD auquel l’auteur rend un bel hommage, a réellement vécu tout ce qu’il raconte au journaliste. Il narre ainsi la terrible traversée dans une chaloupe de 7 mètres avec le reste de l’équipage (18 personnes) les fidèles au Roi qui ont refusé de suivre les mutins, restés avec leur chef Fletcher. Comment ces dix-huit marins furent les premiers occidentaux à traverser les Fidji, à sortir du dédale de la Grande Barrière de corail, jusqu’à leur arrivée à Coupang, sur la côte du Timor, après avoir parcouru plus de 6 500 kilomètres… Ces faits incroyables sont avérés.
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Voici une BD à l’ancienne avec de beaux dessins hyperréalistes (on dirait presque de la photographie). Les teintes anthracite ajoutent du mystère aux scènes et les personnages dont les visages sont montrés en gros plan, comme au cinéma, évoluent dans une sorte de flou, un halo baignant chaque image. L’histoire contée en dessins est passionnante, davantage destinée à de grands adolescents qui apprécieront les scènes d’action et les textes des «bulles».
La période décrite est très politique et fait penser à certaines luttes sociales en France… Fabrice Le Hénanff sait mettre en lumière ses personnages. Les dernières images du volume, où Bligh passant sous les gibets remarque l’absence du corps de Fletcher, appellent sans doute une suite…. Merci à l’auteur de savoir nous faire rêver.
Jane Hoffmann
- «Capitaine Bligh», de Fabrice Le Hénanff, éditions Robinson, 14,95 €
(1) Le Capitaine Bligh a réellement existé et a connu trois mutineries sur «La Bounty», « La Nore» et une dernière en Galles du Sud (Australie) à la fin de sa carrière.
(2) Fabrice Le Hénanff est licencié en Arts plastiques de l’Université de Rennes. Adepte de scénarios historiques, sa technique hyperréaliste est bluffante.
