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Jean Mounicq : couverture de "Portraits", André Malraux

Livre. Disciple de Cartier-Bresson, Jean Mounicq est l’un des plus grands photographes de sa génération. Il publie « Portraits », une étonnante collection de visages des Trente Glorieuses, aux Editions de Juillet.


Jean Mounicq : « Quand je connais trop les gens, je ne peux plus les prendre en photo.Tous mes portraits sont des rencontres immédiates. Mon premier était celui de Jean Cocteau ! « 


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Jean Mounicq : Yves Montand et Simone Signoret (1959)

Photographe, topographe minutieux, ses points de vue sur Paris, Versailles, le Mont Saint-Michel ou encore Venise ont été publiés aux éditions de l’Imprimerie nationale. « Paris retraversé » a reçu l’une des plus prestigieuses récompenses de la profession, le prix Nadar en 1990.

Le grand public le connait aussi grâce à ses portraits publiés dans les magazines. Il en a compilé 80 dans ce douzième ouvrage. Un prodigieux recueil de visages qui ont marqué l’histoire : femmes et hommes d’Etat, écrivains, artistes : sculpteurs, chanteurs, compositeurs, danseurs, couturiers, illustrateurs, designers, metteurs en scènes, comédiens : les idoles de l’après-guerre qui sont aujourd’hui devenu des icônes.

Ces photos en noir et blanc captent immédiatement notre attention. L’humain est au centre. Le personnage est ordonnancé dans un décors rigoureux. Les contre-jours, les zones d’ombre, les reflets, rien n’est laissé au hasard. Tout semble écrit. « Pour moi, la photographie est une écriture. J’ai été marqué par le livre de Cartier Bresson, « D’une Chine à l’autre ». Ce fut comme une révélation. Il y avait dans cet ouvrage une écriture photographique. C’est d’ailleurs lui qui m’a mis le pied à l’étrier. Quand j’étais plus jeune, j’écrivais mieux que je ne photographiais Aujourd’hui, c’est le contraire » sourit Jean Mounicq, 91 ans.

Dans cet ouvrage, il commente chaque cliché. Comme celui de Simone Signoret et d’Yves Montand, réalisé en 1959 : « Derrière leur maison d’Autheuil-Authouillet, ils avaient aménagé un petit théâtre où Montand répétait ses spectacles. Il tiqua quand il vit que j’allais le photographier de dos » se rappelle le photographe.



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Jean Mounicq : Jean Cocteau (1959)

Faut-il entrer en empathie pour réussir un portrait ? « Je ne le pense pas. Il faut être poli mais pas timide. Je suis comme un chirurgien qui a devant lui un corps nu et anesthésié, dont il faut tirer le meilleur. Il n’y a pas de place pour l’onction. Quand je connais trop les gens, je ne peux plus les prendre en photo. A part Malraux que j’ai photographié plusieurs fois, je n’ai jamais fait deux séances avec la même personne. Tous mes portraits sont des rencontres immédiates. Mon premier était celui de Jean Cocteau ! » Précise Jean Mounicq qui en garde un souvenir précis : « C’était à Milly-la-Forêt. Il ne cessait de gonfler et parfaire l’ébouriffement de sa coiffure ! »

Il avoue avoir aimé être seul avec les peintres ou les sculpteurs. Pour les portraits d’écrivains, il préférait être accompagné d’un journaliste. « Il les occupait, s’adressait à leur égo. En 1970, j’ai photographié Joseph Kessel au bar de « La Belle Ferronnière » rue Pierre Charron. Il parlait avec Maurice Fabre, du magazine ELLE. Je ne suis même pas sûr qu’il ait fait attention à moi »

Autre souvenir, avec l’écrivain Céline à Meudon. « Il ne voulait pas se laisser photographier. Toutes les photographies ont été prises l’appareil coincé dans la ceinture avec un déclencheur souple entre les doigts et un objectif grand angle. Je pense qu’il n’a jamais été dupe, ou pas longtemps alors. Vous savez la séance pour faire un portrait est une comédie qui dure une heure ou deux. C’est du cinéma » minimise-t-il.

Dans cet ouvrage remarquable, le 12ème livre de photographies de Jean Mounicq, on croise aussi, entre autres : Juliette Gréco, Aimé Maeght, Truman Capote, César, Alexander Calder, François Mitterrand, Joan Miro, Hugues Aufray, Sami Frey, Karl Lagerfeld, Joséphine Baker, Elsa Triolet, Henry de Montherlant, Simone de Beauvoir, Zizi Jeanmaire, Henri-Georges Clouzot, Abel Gance et Johnny Hallyday, Paloma Picasso ou encore Pierre Mendès France …

Tous défilent devant nos yeux, nostalgiques d’une époque révolue.

Christian Panvert

  • A lire : Jean Mounicq : « Portraits » aux Editions de Juillet (172 pages, 81 photographies, Couverture cartonnée et toilée, Format : 200 x 260 mm)

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