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Thomas Dutronc. Photo Yann Orhan

Musique. Cinq ans après « Eternels, jusqu’à demain », le chanteur-guitariste Thomas Dutronc revient avec « Frenchy ». Un album très swing dans lequel il revisite des standards français iconiques d’une voix douce, dans des ambiances jazz cheek to cheek. Des chansons qui ont fait le tour du monde, telles « Les Feuilles mortes », « Ne me quitte pas », « Petite fleur », « C’est si bon » qu’il interprète avec Iggy Pop et Diana Krall ou encore « La Vie en rose » d’Edith Piaf qu’il reprend avec Billy Gibbons, le guitariste barbu de ZZ Top.


Thomas Dutronc : « Ça été génial de chanter « C’est si bon » avec Iggy Pop et Diana Krall, qui a tenu à m’appeler ensuite pour me dire que le titre swinguait, groovait… Il y a eu beaucoup de chaleur humaine avec tous les artistes qui ont participé à l’album, comme Billy Gibbons ou Jeff Goldblum. Le plus beau des voyages, c’est la rencontre avec l’autre… »


thomas dutronc frenchyLa musique de Django Reinhardt lui a donné envie de jouer de la guitare. Il avait alors 18 ans. Depuis la note bleue n’a pas cessé de fasciner Thomas Dutronc qui en quatre albums, a su explorer l’univers jazz-manouche en lui apportant une touche d’humour et de nonchalance. A 46 ans, le fils de Françoise Hardy et de Jacques Dutronc, revient avec « Frenchy ». Un album très cheeck to cheek, où il se glisse dans les habits de crooner et reprend des chansons iconiques qui ont fait le tour du monde. A L’image de « La Vie en rose » (Edith Piaf), « La Belle vie » (Sacha Distel), « Les Feuilles mortes » (Prevert/Kosma), « La mer » (Charles Trenet), « Ne me quitte pas » (Jacques Brel), « Petite Fleur » (composée en France par Sidney Bechet), ou encore « C’est si bon » (écrite par Henri Betti, pianiste de Maurice Chevalier, et le parolier André Hornez), qu’il interprète avec Iggy Pop et Diana Krall. Un casting de choix pour le chanteur-guitariste qui s’est également entouré de l’acteur et musicien de jazz Jeff Goldblum, Stacey Kent ou Billy Gibbons, le guitariste barbu de ZZ Top avec qui il chante « La vie en rose ».

Un disque de 14 standards français, des chansons qui ont connu une résonance internationale et voyagé outre-Atlantique, aux Etats-Unis, où elles ont été interprétées par Franck Sinatra, Dean Martin, Louis Armstrong, Tony Bennett, Nat King Cole ou encore Nina Simone. Des pépites que le chanteur revisite d’une voix douce sur des arrangements jazzy. On y trouve également des morceaux inattendus de la nouvelle génération, comme « Get Lucky » de Daft Punk ou « Playground love » de Air, arrangés en guitare-voix. « Frenchy » est un album aux ambiances tamisées. C’est élégant, ça swingue, et on se sent immédiatement bien au cœur de ces chansons intemporelles auxquelles Thomas Dutronc redonne des couleurs nouvelles, entre tendresse et nostalgie.

Vous revenez avec un album composé essentiellement de standards français. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?

Thomas Dutronc : J’ai hésité avant de m’attaquer à ce projet. Une des choses qui m’a convaincue a  été la réaction de mon vieil ami Rocky Gresset, qui joue de la guitare sur le disque. Je l’ai connu quand il avait 15 ans, il est d’origine manouche et a un style incroyable. Quand je lui ai parlé du projet, il m’a dit « ce sont des chansons que  j’écoute depuis que je suis né, c’est la musique que j’aime. Si on joue ensemble, ne t’inquiète pas, on va faire ça aux petits oignons…(rires) ». Cela m’a mis en confiance car je me disais à quoi bon reprendre des chansons qui ont été chantées par Elvis Presley, Sinatra ou Armstrong. Ça ne sert à rien de faire une version de plus. Quand Rocky a fait une espèce d’intro à la guitare sur la chanson « La vie en rose », ça m’a immédiatement donné envie d’apporter des éclairages avec mes amis musiciens.

Reprendre le patrimoine des aînés, c’est aussi une question de transmission ?

Thomas Dutronc : A la base, on cherchait un projet qui ait une résonance internationale, parce qu’on avait envie de voyager et de ne pas tourner uniquement dans les pays francophones. Avec tout ce qui se passe avec le coronavirus, ça tombe mal, car le disque devait sortir aux Etats-Unis sur le label Verve Records . Ce n’est pas annulé, c’est repoussé. Pour sortir un disque à l’étranger, il faut y aller, être présent physiquement pour donner des interviews, faire des concerts. Avec ce projet, l’idée était de trouver quelque chose de typiquement français. Les Américains, que l’on copie beaucoup, aiment ce que nous avons d’original. C’est comme ça qu’on a pensé à introduire de la guitare typiquement Django, de l’accordéon. On s’est bien amusés. Ça été génial de chanter « C’est si bon » avec Iggy Pop et Diana Krall, qui a tenu à m’appeler ensuite pour me dire que le titre swinguait, groovait… Il y a eu beaucoup de chaleur humaine avec tous les artistes qui ont participé à l’album, comme Billy Gibbons ou Jeff Goldblum. Le plus beau des voyages, c’est la rencontre avec l’autre…

Comment expliquez-vous que des chansons comme « La Vie en rose », « C’est si bon », « Comme d’habitude », qui représentent la culture et le charme de la France, aient pu à ce point connaître une résonance internationale ?

Thomas Dutronc : La chanson, qui dans le monde entier, a rapporté le plus de droit au monde, c’est « Comme d’habitude », loin devant « Yesterday », « Imagine » ou n’importe quel titre des Beatles, « Thriller » ou « Billie Jean » de Michael Jackson. Est-ce qu’on peut parler d’un âge d’or de la chanson française ? Je ne crois pas, puisqu’on a Air et Daft Punk qui ont fait des choses magnifiques. Aujourd’hui, la musique a changé, c’est devenu une grosse industrie. L’argent de la musique est généré par les ados et les enfants, à qui elle s’adresse de plus en plus. En même temps, en France, on a des super compositeurs et des chansons intemporelles qui peuvent faire le tour du monde. On ne les a pas toutes mises dans l’album, mais on a facilement de quoi faire un volume 2 bien fourni, avec par exemple des titres de Michel Legrand, de Charles Aznavour et d’autres…On aurait pu mettre également des titres des Gipsy King, qui est le groupe français qui a duré le plus longtemps  dans les charts aux Etats-Unis, ou encore des morceaux du groupe pop-rock Phoenix, qui a cartonné là-bas, même si les mélodies sont moins adaptables en jazz.



Toutes ces chansons, vous les écoutiez quand vous étiez enfant?

Thomas Dutronc : Pas tellement. J’aime bien la version de « My Way » par Sinatra et Elvis. Je ne suis pas hyper fan de « Comme d’habitude », qui est géniale, mais que je trouve un peu datée. C’est la mélodie qui est forte. Ma chanson préférée est « Que reste-t-il de nos amours » de Charles Trenet, qu’on a enregistrée. Elle est super, mais j’avais envie qu’elle soit encore mieux. Du coup, on l’a gardée pour un volume 2 (rires). « C’est si bon », je l’ai souvent écoutée en version instrumentale par Bireli Lagrène sur « Standards », un album qui fait référence dans le milieu de la guitare-jazz manouche. J’ai aussi beaucoup aimé la version qu’en a fait Louis Armstrong.

Etes-vous nostalgique de cette époque ?

Thomas Dutronc : Oui et non. Les gens que je préfère et que je vénère sont plutôt de cette époque. Ils avaient l’air beaucoup plus civilisés, courtois, cultivés. Il y avait moins de violence, j’ai l’impression. En même temps, quand on regarde historiquement ce qui se passait, les deux guerres mondiales, la guerre d’Algérie, la Shoah…c’était épouvantable.

Diriez-vous qu’il y a un côté rétro chez vous ?

Thomas Dutronc : Je ne crois pas. Quelqu’un qui joue du Mozart ou du Chopin, on ne dit pas qu’il est rétro. Jouer du Django, c’est pareil. C’est du niveau des plus grands musiciens. Au niveau du talent, du génie, c’est fou comme il plane très loin au-dessus de tout le monde encore aujourd’hui, dans sa manière d’improviser, de faire chanter chaque note.

Avec et album, vous n’avez pas jamais été autant crooner dans votre interprétation, non ?

Thomas Dutronc : Je n’ai pas voulu être spécialement crooner, j’ai cherché l’émotion. A la différence du chanteur d’opéra ou lyrique qui peut chanter très fort, le crooner chante plus doucement dans le micro, façon Dean Martin. J’ai surtout cherché à faire quelque chose de sincère. C’est se mettre à nu, ne pas se cacher. On ne voulait pas faire une imitation de ce que font les Américains et jouer les mecs de jazz super à l’aise, ambiance big band. On voulait faire quelque chose de fin, de romantique…

Comment avez-vous vécu le confinement ?

Thomas Dutronc : Je ne suis vraiment pas à plaindre par rapport à tous les gens qui ont eu à vivre cela d’une manière terrible, comme les soignants ou les malades. J’étais planqué à la campagne. De manière générale, je suis pour me planquer un maximum ! (rires). J’étais inquiet pour mes parents et la situation dans le monde. L’album allait sortir, on avait prévu une promo d’enfer et tout a été annulé. C’était un peu angoissant. J’ai donné des cours de guitare en direct sur Facebook live pendant 48 jours d’affilés. Et j’ai commencé à travailler pour mon prochain album de chansons originales. Ça été un plaisir, mais j’ai hâte de retrouver la scène, un endroit où on a vraiment l’impression d’exister et où on s’éclate.

Entretien réalisé par Victor Hache

 

 

 

 

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