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Rentrée littéraire: Philippe Djian publie "Double Nelson". Philippe Quaisse / Pasco

Livres We Culte. Pour cette rentrée littéraire, avec le 32ème roman de Philippe Djian, une étourdissante tragi-comédie. On enchaîne avec Jean-Claude Grumberg pour une éblouissante déclaration d’amour à sa femme disparue et avec Céline Minard pour un impeccable livre-monde. Et, enfin, un premier roman, celui tant attendu et signé par le réalisateur américain Quentin Tarantino. Quatre suggestions pour une belle semaine de lecture.


Rentrée littéraire : Djian, Grumberg, Minard,Tarantino, le quarté gagnant ! 


philippe djian double nelsonPHILIPPE DJIAN : « Double Nelson »

Ce pourrait être un « combat » sur un ring de catch. L’un des combattants anéantirait son adversaire d’une « double Nelson », cette prise implacable, cette prise de soumission qui fait abandonner l’autre. Mais là, on n’est pas sur un ring, on est dans le 32ème roman de Philippe Djian, simplement titré « Double Nelson ». N’en déplaise à quelques critiques qui sont persuadés que la littérature n’a pas existé avant eux, on a là un roman de la meilleure facture, délicieusement « djianesque ».

Avec « Double Nelson » comme souvent chez le romancier retiré à Biarritz, ça tourne autour de deux personnages. Luc, un écrivain un peu maudit, et Edith, une femme belle à damner bossant pour les forces spéciales d’intervention de l’armée. Tout commence par une séparation, ils se sont aimés, vont-ils s’aimer à nouveau ? Il y a aussi le voisin qui en pince pour l’instit’ de son fils… C’est formidablement tragi-comique, délicatement rythmé, d’une écriture aussi incisive que mordante avec, marque de fabrique de l’auteur, peu de descriptions mais nombre de dialogues. Au final, un ballet aussi cocasse que dramatique, toujours décalé et minimaliste lorgnant du côté de « Dogville », le film de Lars von Trier. Du grand Philippe Djian qui réussit, là, une belle prise !

« Double Nelson » de Philippe Djian. Flammarion, 240 pages, 20 €.


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rentrée littéraire 2021JEAN-CLAUDE GRUMBERG : « Jacqueline Jacqueline »

Un aveu : « C’est très frustrant d’écrire une histoire pour un lecteur qui ne pourra pas la lire mais qui connaît cette histoire et qui l’écrit avec moi… » Des mots de Jean-Claude Grumberg pour présenter son nouveau livre sobrement titré « Jacqueline Jacqueline ». Un beau et grand texte pour un hymne à l’amour. Alors qu’en 2019 il était honoré dans le monde pour la parution de « La Plus Précieuse des marchandises. Un conte », l’auteur perd Jacqueline, son épouse.

Pendant soixante ans, ils ont vécu ensemble ; elle fut sa compagne, son amante, sa complice, son inspiratrice, celle qui lui demandait de toujours, au théâtre, faire rire et pleurer en même temps… Elle est partie à jamais, il passe depuis par tous les états- incrédulité, révolte, colère… Alors, il écrit. A celle qui ne lira jamais ce texte, il offre ce livre « pour et avec » et dit, du moins essaie-t-il de confier tout ce qu’il n’a pas su, osé lui dire. Le flot du texte est aussi beau que le bruit d’une cascade, un petit matin. Il y a le réel, l’imaginaire. Dans « un livre pour parler la nuit, en silence, avec les mots des morts trop vite partis », dans les mots de Grumberg- et il le revendique, il n’y a pas place pour la raison, et si peu pour l’acceptation.

« Jacqueline Jacqueline » de Jean-Claude Grumberg. Seuil, 306 pages, 20 €.

rentrée littéraireCELINE MINARD : « Plasmas »

Une des voix les plus singulières des lettres françaises contemporaines, une voix qui, un jour pour définir son œuvre en cours, glissait : « Pas de début, pas de fin, que du milieu ». A 52 ans, Céline Minard publie son douzième roman, l’impeccable « Plasmas », après des textes essentiels comme « Faillir être flingué » (2013) et « Le Grand Jeu » (2016). L’éditeur nous promet « un univers renversant, où les espèces et les genres s’enchevêtrent, le réel et le virtuel communiquent par des fils ténus et invisibles »– c’est juste, et encore mieux que cela !

D’une écriture aussi dense qu’exigeante, en dix chapitres courts indépendants et en même temps indissociables les uns des autres, l’auteure jongle avec les descriptions, les mots techniques, les mots complexes, les situations peu habituelles et l’incertitude de l’achèvement. Au fil des pages et des histoires, une certitude à en croire Céline Minard : espèces et genres s’enchevêtrent, réel et virtuel communiquent par des fils ténus et invisibles. Avec Céline Minard, on est dans un monde post-humain- on y évoque des mesures sensorielles sur des acrobates, la conservation de la mémoire de la Terre après son extinction ou encore la création accidentelle d’un monstre génétique dans une écurie de chevaux sibérienne ! Bienvenue dans le livre-monde

« Plasmas » de Céline Minard. Rivages, 162 pages, 17 €.



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QUENTIN TARANTINO : « Il était une fois à Hollywood »

En 2019, Quentin Tarantino présentait son neuvième film, « Once upon a time… in Hollywood ». Il y racontait son Hollywood version 1969, avec Brad Pitt, Leonardo DiCaprio et Margot Robbie- ce fut son deuxième plus gros succès au box-office. A l’orée de la soixantaine, le réalisateur américain ne cesse de répéter qu’il bouclera sa carrière ciné avec son prochain dixième long-métrage. Et qu’il va passer à un autre art. Sûrement la littérature- il suffit, pour le croire, de lire son premier roman, « Il était une fois à Hollywood ».

Contrairement à ce que pratique si souvent, le réalisateur de « Pulp Fiction » et de « Kill Bill » n’a pas adapté un roman sur grand écran ni même « novellisé » un de ses films. Certes, il reprend la thématique et les personnages du long-métrage mais il va plus loin, et confie que, contrairement au ciné où il est coincé sur une durée de deux heures, dans un roman il jouit de toutes les libertés. Et avec ce premier récit, il s’en donne à cœur joie. Tel un gamin facétieux, il emmène le lecteur dans les pas d’un acteur ruiné qui ne joue que des crapules sans envergure, de sa doublure cascade, d’une star ciné qui vit dans une villa sur les collines de la ville et d’un taulard s’improvisant maître spirituel. Un roman follement décalé, décapant.

« Il était une fois à Hollywood » de Quentin Tarantino. Traduit par Isabelle Maillet. Fayard, 416 pages, 23 €.

Serge Bressan

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