Interview. Le festival Europavox qui a lieu chaque année à Clermont-Ferrand et dans six capitales européennes, vient de se doter d’un nouveau média en ligne multilingue, Europavox.com, disponible en trois langues (français, anglais, allemand). Une évolution qui lui permet aujourd’hui de toucher un large public européen fan de musiques actuelles. L’occasion pour We Culte de rencontrer François Missonnier, fondateur et directeur d’Europavox, dont la prochaine édition aura lieu du 25 au 27 juin dans un nouveau format, tenant compte des règles sanitaires annoncées récemment par le gouvernement.
« Un festival dure trois ou quatre jours et après, on se remet au travail sur l’édition suivante. C’est comme ça qu’est née l’idée de créer Europavox.com, qui est le premier média dédié à la diversité musicale européenne, pour mettre en valeur ces créations artistiques tout au long de l’année »- François Missonnier, fondateur et directeur du festival Europavox
Europavox est l’un des plus importants festivals de musiques actuelles qui a lieu chaque année à Clermont-Ferrand, et dans six capitales européennes (Bucarest, Vienne, Vilnius, Zagreb, Bologne, Bruxelles). Mais Europavox, c’est aussi un média en ligne gratuit (Europavox.com) dédié aux musiques européennes qui, après quatre ans d’existence, devient aujourd’hui multilingue, disponible en trois langues (français, anglais, allemand). Une évolution notable qui a été rendue possible grâce au programme Europavox Project porté par les sept villes partenaires en réseau, qui a été sélectionné en juin 2020 par la Commission européenne, dans le cadre du fonds de soutien culturel Europe creative, en tant que projet de coopération à grande échelle. Un projet dédié à la diversité musicale européenne, qui propose des festivals, un média en ligne et un programme de soutien à la mobilité pour les artistes, dont nous parle François Missonnier, fondateur et directeur d’Europavox.
Lancé en 2017 Europavox.com rencontre un beau succès, au point de devenir aujourd’hui un média en ligne multilingue. Pourquoi cette évolution ?
François Missonnier : Le projet Europavox est né sous la forme d’un festival il y a quinze ans. L’objectif était double, à savoir aider les artistes européens dans le champ des musiques actuelles à sortir de leurs frontières et une fois qu’ils commencent à avoir un succès, une base de public sur leur territoire, les accompagner afin qu’ils puissent faire découvrir leur création dans d’autres pays. Parce que la réalité, qui est toujours existante, fait que cette circulation des artistes et des œuvres, n’est pas facile. D’un autre côté, l’idée était de pouvoir proposer des projets singuliers et originaux aux fans de musique un peu partout en Europe. C’est-à-dire qu’en dehors des artistes nationaux et anglo-saxons qui continuent à dominer très largement ce secteur, c’était de montrer qu’il existe des artistes de talent, dans les pays d’à côté, qui méritent d’être découverts. Cette mise en relation des artistes avec le public, on l’a initiée avec la création d’un festival à Clermont-Ferrand, qui a grossi et voyagé. La création du média Europavox.com est venue d’une frustration du fait qu’un festival dure trois ou quatre jours et après, on se remet au travail sur l’édition suivante. C’est comme ça qu’est née l’idée de créer un site, qui est le premier média dédié à cette diversité musicale européenne, pour mettre en valeur ces créations artistiques tout au long de l’année.
Cinq journalistes travaillent sur Europavox.com, une équipe qui gère une vingtaine de pigistes européens chargés de rédiger les articles. Une structure qui ressemble à un vrai journal !
François Missonnier : C’est exactement ça (rires), même si on reste modestes parce qu’on n’a pas tout à fait les moyens. On a une vingtaine de collaborateurs réguliers, avec une organisation qui s’est rôdée au fil des années. Nous avons des journalistes qui nous proposent des sujets et des articles en permanence. En même temps, connaissant bien maintenant les goûts et la sensibilité de notre équipe éditoriale, nous sollicitons des journalistes pour écrire des papiers et rédiger des piges en fonction des artistes qu’on choisi de mettre en avant. A chaque fois, nous veillons à avoir une représentation qui soit la plus diversifiée culturellement et intéresse le plus possible de pays au sein de l’Europe. C’est passionnant de voir comment tel projet lithuanien, espagnol ou islandais peut résonner de manière enrichissante sur d’autres territoires. C’est vraiment notre équipe de journalistes qui témoignent de cet aspect-là, de par leurs choix éditoriaux.
Parlez-nous du fonds de soutien européen pour la culture, Europe creative, pour lequel vous avez été sélectionné, grâce au programme Europe project porté par Europavox…
François Missonnier : Europe creative est un nouveau programme de soutien à la culture piloté par la Commission européenne. On y a répondu sur un projet qui défend les objectifs que l’on poursuit depuis nos débuts : faire la promotion de la jeune scène musicale européenne au travers de festivals, dont le vaisseau amiral reste Clermont-Ferrand, avec des éditions dans six autres pays et le déploiement du média Europavox.com Avec ces projets européens, on entre en compétition avec les opérateurs des 27 pays, tous champs artistiques confondus, la danse, le livre, le cinéma, le théâtre etc… Sur une vingtaine de projets qui ont été retenus à l’échelle de l’Europe, Europavox est le seul lauréat de musiques actuelles, ce qui nous a rendus fiers (rires). D’autant que cette heureuse nouvelle est tombée au moment de l’annulation du festival de l’an dernier à cause du Covid. Cela nous a redonné de l’énergie.
Quel modèle économique envisagez-vous pour le média Europavox ?
François Missonnier : Il y a plusieurs pistes que nous poursuivons en parallèle depuis quatre ans. On envisage des modèles de partenariats. Cela reste assez récent, mais notre activité de publications est complètement gratuite. L’idée serait d’offrir nos services comme un studio pour des opérateurs qui souhaiteraient disposer de notre expertise, à la fois sur le champ européen et sur le champ musical. On a une activité de studio, une activité événementielle. Et on est en train de développer une activité de services à destination des professionnels européens, qui peuvent avoir besoin de coups de main pour s’implanter sur tel ou tel territoire. Que ce soit dans le monde du live, en matière de communication, d’édition, ce sont des conseils qu’on est en mesure d’apporter.
« Vidéo de la semaine », « groupe du jour », « bandroulette », « playlists », « interviews », « Top 10 »… le contenu du site a beaucoup évolué depuis la première version…
François Missonnier : Auparavant, tout cela existait très partiellement. On a beaucoup appris, peaufiné et développé les contenus que l’on propose, ainsi que leur régularité. Il y a par exemple dans le Top 10, dix groupes qui sont retenus par notre jury cosmopolite, lequel fait sa sélection sur une logique de diversités musicales, qui sont mises à l’honneur sur le site. On a ainsi mis en avant récemment Yendry, une jeune artiste italienne, un groupe de metal, Hania Rani, une polonaise qui joue du classique, Pom Poko, des Norvégiens qui font du rock…On essaie d’avoir une palette la plus large de styles musicaux, sans même se priver parfois d’aller sur des projets de niche. Et on travaille évidemment la diversité géographique, avec des artistes qui viennent de toute l’Europe, y compris des pays les plus petits, qui peuvent parfois cacher des supers pépites. On a diffusé ainsi une « vidéo du jour » avec Kadebostany et Valeria Stoica, une jeune artiste moldave qu’on a découverte l’an dernier, dont l’album est absolument sublime.
Au regard de la crise sanitaire, comment prévoyez-vous d’organiser la prochaine édition clermontoise du festival Europavox ?
François Missonnier : Le festival aura lieu du 25 au 27 juin et se déroulera selon ce qu’on aura la possibilité de faire. On s’inscrit dans un cadre et des logiques d’autorisations qui sont dictées par le gouvernement en fonction de l’évolution de la situation sanitaire. Le format du festival, c’est 15 000 personnes debout par jour. On a bien compris que ce serait difficile de l’organiser dans ces conditions. La décision que l’on a prise, car on tenait absolument à renouer le fil avec notre public et ne pas revivre une année blanche, est de travailler sur un autre projet, qui sera plus qu’une adaptation. Ce sera un Europavox qui va rentrer dans ces critères-là, avec une configuration de 5000 personnes assises, sur laquelle on se projette, en espérant que la situation permette d’assouplir un peu les règles et que l’on puisse accueillir plus de monde, avec pourquoi pas une partie du public debout. En fait, on part de la base et on se laisse la possibilité d’élargir, si les conditions le permettent.
Côté programmation, il y aura sûrement moins d’artistes européens, étant donné les contraintes de circulation dues au Covid…
François Missonnier : Nous sommes obligés de tenir compte des réalités. Le line up d’un festival comme Europavox, c’est une cinquantaine d’artistes venant d’une vingtaine de pays différents. Comme la situation varie d’un territoire à l’autre et que la situation est malheureusement extrêmement complexe et incertaine, on va se concentrer sur une programmation plutôt nationale, où d’artistes européens qui sont installés en France, dans un premier temps. Et on ne s’interdit pas de proposer plus tard dans l’année – car on peut espérer qu’à la fin de l’été et de l’automne cela ira mieux – un autre rendez-vous et d’accueillir sur Clermont une programmation aussi cosmopolite que d’habitude. On réfléchit à ces deux aspects-là, avec l’espoir d’un retour à la normale pour 2022.
Entretien réalisé par Victor Hache
- Voir : Europavox.com , média en ligne multilingue dédié aux musiques actuelles européennes
- Site du festival Europavox