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Les livres de la semaine : Edith Bruck, Alfred Eibel, Maaza Mengiste

Livres We Culte. Pour cette semaine de lecture, trois suggestions : on commence le récit aussi étourdissant qu’éblouissant d’Edith Bruck, grande miraculée de la vie ; on enchaîne avec Alfred Eibel et un texte tout en élégance et intelligence pour entretenir la nostalgie, et on termine avec l’impeccable hommage de Maaza Mengiste à des femmes puissantes dans l’Ethiopie occupée par l’armée italienne fasciste dans les années 1930. 


Les livres de la semaine : Edith Bruck, Alfred Eibel et Maaza Mengiste


Les livres de la semaine edith bruck
Les livres de la semaine : Edith Bruck « Le pain perdu »

EDITH BRUCK : « Le Pain perdu »

L’un des livres-choc de cette rentrée littéraire d’hiver. Un des événements tout aussi étourdissant qu’éblouissant. Edith Bruck, 89 ans, nous envoie « Le Pain perdu »– le livre d’une vie d’une miraculée. Née dans un village de Hongrie, elle se retrouve à 13 ans, avec ses parents et ses cinq frères et sœurs, embarquée vers des camps nazis. Elle n’est alors qu’« une petite fille aux pieds nus », comme indiqué en tête du premier chapitre.

Avec force détails tout en pratiquant la concision, elle raconte la vie au village, cette vie de « gens de peu », le voyage dans des wagons à bestiaux, l’arrivée aux camps, la vie aux camps- très tôt, apprendre que c’est de là où s’échappe une fumée que la mère est morte, la mère qui n’a pas pu emmener le pain qu’elle venait de mettre à cuire quand la famille a été embarquée…Sauvée du camp avec une de ses sœurs, « Ditke »- le surnom de la narratrice, revient dans son village natal, le quitte, direction la Suisse puis Israël où elle retrouve sa sœur militante de la Terre Promise, enfin l’Italie où elle vit enfin l’amour avec le réalisateur Nelo Risi.

Et c’est ainsi qu’après avoir lu « Le Pain perdu », le pape François est allé, le 21 février 2021, visiter Edith Bruck en son domicile à Rome…

« Le Pain perdu » d’Edith Bruck. Traduit par René de Ceccatty. Editions du Sous-Sol, 178 pages, 16,50 €.


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Les livres de la semaine : Alfred Eibel « Souvenirs viennois »

ALFRED EIBEL : « Souvenirs viennois »

Voyageur du siècle (le 20ème), Alfred Eibel a pratiqué la mobilité. Né en 1932 à Vienne l’Autrichienne, il a fui le nazisme, s’est exilé à Bruxelles la Belge puis a fondé une maison d’édition à Lausanne la Suisse où il a publié Fernando Pessoa, Kenneth White ou encore Léo Malet. Il est venu à Paris où il a été directeur de collection et critique littéraire. Il écrit aussi- à preuve, son nouveau livre : « Souvenirs viennois ».

Le texte occupe deux tiers du livre complété par un autre, « Une cure à Baden ». Avec Eibel, homme d’élégance, on se retrouve dans la Vienne des années 1950, une ville déchirée avec ses quatre occupants. Une ville qui voudrait tant retrouver son charme passé tout en fééries. Les habitants se jettent dans le cinéma, le théâtre et l’opéra pour oublier le nazisme.

La flamboyance d’avant-guerre est bientôt de retour : dans les salons de thé, on y déguste à nouveau les Sachertörten en écoutant des opérettes de Lehar ou encore du Richard Strauss. Avec Alfred Eibel, on cultive avec élégance et intelligence la nostalgie en flânant du côté du parc de Schönbrunn. Avec « Souvenirs viennois », d’une écriture ciselée, Alfred Eibel nous emmène flâner du côté d’Arthur Schnitzler et Thomas Bernhard. C’est un bonheur…

« Souvenirs viennois » d’Alfred Eibel. Arthaud, 240 pages, 19,90 €.



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Les livres de la semaine : Maaza Mengiste « Le roi fantôme »

MAAZA MENGISTE : « Le roi fantôme »

Elle dit : « J’écris pour entrer dans une conversation qui a commencé il y a des millénaires » et ouvre son deuxième et nouveau roman avec une citation piochée dans « L’Iliade » d’Homère : « …afin que nous soyons, jusque dans l’avenir, célébrés par le chœur des hommes qui viendront ».

Née à Addis-Abeba (Ethiopie), à 4 ans, Maaza Mengiste a émigré avec sa famille fuyant la révolution locale, aux Etats-Unis. On l’a découverte en 2012 avec un premier roman, « Sous le regard du lion ». On la retrouve en ce cœur d’hiver avec « Le roi fantôme ». Un roman entre conte et épopée.

Un texte d’ampleur qui prend son début en 1935 quand Mussolini l’Italien, avec l’aide de soldats érythréens, envahit l’Ethiopie d’Haïlé Sélassié, le dernier Roi des Rois. Un roman simplement titré « Le roi fantôme » qui met en lumière Kidane- un chef de guerre glorieux, Aster- sa femme, et Hirut- une orpheline récemment devenue leur servante.

Kidane monte une armée pour lutter contre l’envahisseur- alors, les femmes refusent leur statut secondaire, prennent également les armes. L’espoir est de retour chez les rebelles. Texte de cœur et de violence, « Le roi fantôme », par la grâce d’écriture de Maaza Mengiste, rend aussi hommage à ces femmes qui ont tenu un rôle essentiel dans l’histoire de l’Ethiopie.

« Le roi fantôme » de Maaza Mengiste. Traduit par Serge Chauvin. Editions de L’Olivier, 466 pages, 24 €.

Serge Bressan

 

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