patrice giorda portraits et figures lyon
Patrice Giorda expose ses portraits et figures à la Fondation Renaud au fort de Vaise à Lyon (c) Progrès /Joël PHILIPPON

Exposition/Peinture. Le peintre Patrice Giorda expose son travail sur le portrait et la figure à la Fondation Renaud au fort de Vaise de Lyon. Cette exposition est une sorte de bilan qui porte sur plusieurs décennies et rassemble plus de 150 dessins et tableaux. On y découvre notamment une série d’autoportraits, des figures inspirées par une longue confrontation avec Diégo Vélasquez et des portraits réalisés dans les prisons lyonnaises. Le catalogue de l’exposition bénéficie des contributions très éclairantes de Gérard Mordillat et Alexis Jenni que Patrice Gioda va retrouver pour une table-ronde à la Fondation le 6 décembre prochain. L’occasion pour We Culte d’aller à la rencontre de l’artsite lyonnais qui nous parle de cette exposition qu’il a récemment présentée à la libraire Descours de Lyon.


Patrice Giorda : « Si mes portraits ont de l’intérêt, c’est par le témoignage d’humanité qu’ils restituent »


patrice giorda le pape rose
Patrice Giorda : « Le Pape rose »

 

Pourquoi vous êtes-vous intéressé au portrait ?

Patrice Giorda Chacun de nous est unique et j’essaye de m’approcher de cette unicité dans le silence et par le dessin. L’autre demeure chaque fois pour moi un mystère, insondable peut-être. C’est comme un puits sans fond. Il faut donc commencer par regarder correctement le visage et en même temps ressentir des choses. Je ne peux pas faire un portrait à partir d’une photo. C’est une expérience de vie et j’ai besoin que l’autre soit présent. Cela passe par la ressemblance, mais cela va plus loin. C’est une présence qui a une certaine énergie. Et il y a le risque d’échouer. Soit parce que je ne suis pas bon, soit parce que le modèle se bloque et ne me laisse pas entrer. L’enjeu n’est donc pas la ressemblance, mais la présence de l’autre.

Que vous apporte la confrontation aux « grands maîtres » comme Vélasquez ?

Patrice Giorda : Au début, quand j’ai commencé avec Vélasquez, je ne savais pas ce que je cherchais. Je me suis aperçu que dans les premiers tableaux il y avait une sorte d’autoportrait et je me suis dit que je parlais de moi. C’était l’humanité des personnages de Vélasquez qui me permettait de descendre en moi. Comme je ne cherchais pas à recopier les tableaux, je laissais la place à des figures subjectives qui étaient en moi et pouvaient surgir dans les personnages de Vélasquez. C’est une sorte d’introspection qui a duré un an et demi. Dans un exercice de peinture comme celui là, il y a toujours la difficulté d’articuler le dessin et la peinture.

patrice giorda auto-portrait
Patrice Giorda, auto-portrait -Musée Paul Dini

Quelle difficulté y-a-t-il pour articuler le dessin et la peinture dans un portrait ?

Patrice Giorda : Dessiner quelqu’un, je n’ai aucun problème. Le peindre c’est plus compliqué, car ça devient un tableau. Dès que ça devint un tableau c’est la peinture qui prend le dessus. La dimension psychologique du dessin qui doit être gardée entre en conflit avec la peinture qui cherche l’espace et la lumière. Pour chercher la lumière je suis obligé de détruire le dessin. Pour moi il y a donc un combat entre dessin et peinture dans le portrait.

Comment s’est passée votre expérience dans les prisons lyonnaises ?

Patrice Giorda : J’ai été contacté dans les années 90 pour le projet « Complicités d’évasion » qui réunissait 40 artistes invités à entrer dans les prisons pour y faire ce qu’ils ressentaient. La liberté était totale et on avait carte blanche pendant un an et demi. J’ai décidé de faire des portraits.

Je suis allé dans les trois prisons lyonnaises deux fois par semaine pendant neuf mois. C’était intéressant pour moi, car cela me confrontait à mon propre enfermement. L’univers carcéral faisait ressurgir des souvenirs de mon pensionnat chez les Lazaristes. Eux ont aimé, car ils se sentaient vraiment regardé dans leur souffrance. Cela leur redonnait une dignité me disaient-ils. Je portais sur eux un regard bienveillant et profond. Ils me disaient que je les regardais de l’intérieur ou que je montrais leurs souffrances. Leur regard sur mes portraits a été assez positif et ça a été pour moi un moment fondateur.

patrice giorda affiche

Peut-on être novateur dans le portrait autant que dans la peinture ?

Patrice Giorda : En peinture, dans les clairs-obscurs et dans le travail de la couleur, je touche en moi quelque chose qui est original. Dans le dessin je reste très classique et, si mes portraits ont de l’intérêt, c’est par le témoignage d’humanité qu’ils restituent.

Entretien réalisé par Yves Le Pape

  • A voir : « Giorda, Portraits et figures », jusqu’au 23 décembre à la Fondation Renaud du Fort de Vaise, 27 Bd Antoine de Saint-Exupéry, 69009 Lyon. Tél : 04 78 47 10 82
  • Table-ronde Patrice Giorda, Gérard Mordillat et Alexis Jenni le mardi 6 décembre à 19h au Fort de Vaise 

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