Sortie livres. Pour cette rentrée littéraire d’été 2023, 466 romans francophones et étrangers (34 de moins qu’en 2022) sont annoncés en parution d’ici la fin octobre. En toute subjectivité, We Culte a retenu le livre-coup de cœur de Hernan Diaz… et aussi Agnès Desarthe, Paolo Giordano, Robin Josserand, Piergiorgio Pulixi, Dimitri Rouchon-Borie et Gabrielle Zevin. Sept romans indispensables !
HERNAN DIAZ : « Trust »
Né en Argentine en 1973, il a vécu en Suède et à Londres, avant de s’installer à New York. Ecrivain américain, Hernan Diaz a publié son premier roman, « Au loin », en 2018- il fut finaliste du prix Pulitzer. Il nous revient en VF en cette rentrée d’été avec « Trust », récompensé par le Pulitzer de la fiction et une longue présence dans la liste des best-sellers du « New York Times ».
« New York enflait de l’optimisme tapageur de ceux qui croient avoir pris de vitesse le futur », lit-on au hasard des pages. Et nous voilà, lectrices et lecteurs embarqués à Wall Street dans les années 1930. La Grande Dépression a frappé. Toutefois, quelques malins ont su faire des affaires. Nombre d’Etats-Uniens ont vu leur fortune s’évaporer, d’autres ont prospéré.
Ainsi, cet héritier d’une famille d’industriels devenu magnat de la finance : lui et son épouse, fille d’aristocrates, forment un couple qui fait envie à la « high society » locale. Tous deux se tiennent à l’écart : aussi froid que calculateur, Benjamin Rask fait tourner l’entreprise et, fragile et mélancolique, Helen la maison et ses bonnes œuvres. Vu comme ça, tout tourne, tout roule… Ne pas se fier aux apparences. Le vernis va craquer.
Erudit modeste, Hernan Diaz, diablement maître du récit, lance un véritable jeu de pistes sur 400 pages vertigineuses. Tout y est, l’American Way of Life, les légendes américaines, le business, l’essence du libéralisme, l’argent qui, on l’oublie si souvent, n’est qu’un mirage… Notre roman coup de cœur de cette rentrée estivale…
- « Trust » de Hernan Diaz. Editions de l’Olivier, 400 pages, 23,50 €.
AGNES DESARTHE : « Le Château des Rentiers »
Une promenade, un jour, dans le 13ème arrondissement de Paris. La narratrice prénommée Agnès déambule Rue du Château des Rentiers, lève les yeux et voit l’appartement où vécurent Boris et Tsila Jampolski, ses grands-parents.
Enfant, elle leur rendait souvent visite. Juifs venus d’Europe centrale, ils avaient inventé une vie en communauté, un phalanstère comme le prônait au 19ème siècle l’utopiste Charles Fourier. La narratrice Agnès, c’est Agnès Desarthe, 56 ans aujourd’hui, écrivaine et traductrice, auteure de son quinzième roman, « Le Château des Rentiers ». Au fil des pages, elle parcourt les époques et les lieux, recompose le passé, visite le présent, envisage le futur. Pour une belle réflexion sur la vieillesse et la mort…
- « Le Château des Rentiers » d’Agnès Desarthe. Editions de l’Olivier, 224 pages, 19,50 €.
PAOLO GIORDANO : « Tasmania »
Lui l’écrivain, l’Italie le traite comme une rock star. A 26 ans, Paolo Giordano publiait en 2019 « La Solitude des nombres premiers » (2 millions d’exemplaires vendus dans son pays, 29 traductions dans le monde), et devint alors l’écrivain des ultramodernes solitudes. Il nous revient avec « Tasmania ».
Encore un texte furieusement vivant, terriblement contemporain. A la demande d’un journal, le narrateur, écrivain, vint à Paris en 2015 pour couvrir un sommet international sur le climat, dans une ambiance post-attentats. Il s’ennuie ferme pendant les conférences, croise un climatologue spécialiste des nuages qui va lui redonner un soupçon de goût à la vie. Dans le même temps, son couple avec Lorenza bat sérieusement de l’aile… C’est ample et magistral.
- « Tasmania » de Paolo Giordano. Le Bruit du Monde, 336 pages, 23 €.
ROBIN JOSSERAND : « Prélude à son absence »
Un premier roman- l’un des tout meilleurs de cette rentrée d’été 2023. Robin Josserand, 30 ans, originaire du Creusot (Saône-et-Loire) et grandi à Lyon, nous offre « Prélude à son absence », une autofiction qui se déjoue des règles de l’autofiction.
Le narrateur, 30 ans, travaille dans une bibliothèque. Un jour, il aperçoit Sven- jeune, il fait la manche assis sur un trottoir, et dans ce visage émacié, il croit voir le pianiste Glenn Gould fatigué. Le lendemain, Sven est là, le surlendemain il a disparu, et ainsi des jours suivants, il accepte l’hospitalité du narrateur pour fuir encore… Romantisme cru. Disparaître, revenir, prélude à l’absence et le narrateur plongé en mélancolie. Un jour, ils partent sur l’île de Groix. Les corps se rapprocheront-ils ?
- « Prélude à son absence » de Robin Josserand. Mercure de France, 168 pages, 17,50 €.
PIERGIORGIO PULIXI : « Le Chant des innocents »
Publié originellement en Italie en 2015, voici enfin la VF du maître transalpin dans l’art du « page turner ». C’est « Le Chant des innocents » de Piergiorgio Pulixi, 40 ans, né en Sardaigne ; c’est aussi la première enquête de Vito Strega, un temps suspendu suite à un accident. Peu avant, la police a été appelée- et découvre 85 coups de couteau et une gamine de 13 ans, elle n’est pas la victime mais la meurtrière.
Sur la scène, elle tient encore levé le poignard, sourire aux lèvres. Quelque temps plus tard, d’autres crimes sont commis par des adolescents. L’inspectrice Teresa Brusca demande à Vito Strega de l’accompagner pour l’enquête. Très vite, il a une intuition : ces jeunes sont liés par un secret. Mais Strega a aussi ses secrets… Un roman aussi noir que brillant.
- « Le Chant des innocents » de Piergiorgio Pulixi. Gallmeister, 336 pages, 23,80 €.
DIMITRI ROUCHON-BORIE : « Le Chien des étoiles »
Journaliste ès chronique judiciaire, Dimitri Rouchon-Borie avait éclaboussé le monde des livres avec « Le Démon de la colline aux loups », un livre-phénomène paru en 2021. Avec « Le Chien des étoiles », on retrouve la force brute et l’étrange poésie, marques de fabrique de l’auteur.
Il y a Gio, la vingtaine, un peu barré depuis qu’un lâche lui a vrillé un tournevis dans le crâne. Il revient dans son clan gitans mais annonce qu’il en refuse les lois et la violence. Il s’en va, emmène avec lui deux ami.e.s : un enfant sauvage, Papillon, et une mystérieuse fille, Dolores. Au fil des pages, défile le destin de trois miraculés cheminant dans le monde des humains. Et en poésie : « Les cimes souples des pins s’agitent, bras de vieillards tendus vers un butin trop beau pour eux »…
- « Le Chien des étoiles » de Dimitri Rouchon-Borie. Le Tripode, 240 pages, 19 €.
LIRE AUSSI : Rentrée littéraire d’été 2023 : sept romans à ne surtout pas manquer
GABRIELLE ZEVIN : « Demain et demain et demain »
D’une revue états-unienne, la promesse est fameuse : « Ce roman est celui que vous attendiez de lire ». L’éditeur français nous assure qu’il s’agit là d’« un livre qui ne ressemble à aucun autre », rappelant que « Demain et demain et demain » de Gabrielle Zevin a été livre de l’année, outre-Atlantique.
Avec une plongée dans l’univers des jeux video. Samson et Saddie se sont connus, enfants, à l’hôpital : l’un se remettait d’un accident, l’autre venait visiter sa sœur malade. Un jour de décembre, quelques années plus tard, ils se retrouvent sur un quai de métro. Et vont créer une société de jeux video, le succès vient vite. Les deux deviennent des stars, riches, célèbres, à peine 25 ans. Mais l’ambition et la jalousie feront leur (basse) œuvre…
- « Demain et demain et demain » de Gabrielle Zevin. Fleuve éditions, 528 p, 22,90 €.
Serge Bressan