Musique. Six ans après Panorama, Vincent Delerm signe son retour avec « La Fresque », un huitième album qui prolonge son art de la narration sensible et du détail évocateur. Fidèle à son style singulier, Delerm assemble ici quatorze morceaux comme autant de scènes qui composent une vaste toile émotionnelle, mêlant souvenirs, visages aimés, instants suspendus. Une fresque sensible et profondément humaine. Un récit musical à la fois personnel et collectif.
« La fresque » : un récit musical à la fois personnel et collectif
Le disque s’ouvre par une chanson-titre parlée, posée sur une texture électro-orchestrale. Une entrée en matière qui donne le ton : « La Fresque » est une œuvre pensée comme un générique, une traversée musicale et sentimentale qui explore les territoires chers à l’artiste — l’amour, le temps qui passe, la beauté discrète des choses simples.
Le projet, réalisé par Jean Sylvain Le Gouic (Juveniles), Paco Del Rosso et Rémy Galichet, fait la part belle aux arrangements soignés : cordes, cuivres, nappes électroniques, tout est pensé pour servir les textes, toujours précis, souvent mélancoliques. Delerm poursuit ici son travail de miniaturiste, en capturant des fragments de vie avec une grande justesse émotionnelle.
Mais « La Fresque » ne se limite pas à un seul registre. Certaines chansons abordent des sujets plus graves : un drame familial, une disparition, les attentats du 13 novembre. Delerm les traite avec pudeur, sans pathos, mais avec une intensité nouvelle dans son écriture. À l’inverse, d’autres titres célèbrent les solitaires, les moments de fête, la joie de vivre à deux ou à plusieurs. Le disque circule ainsi entre ombre et lumière, comme la vie elle-même.
Delerm explique avoir voulu composer une œuvre collective, un portrait de lui à travers les autres. Cela se retrouve jusque sur la pochette de l’album, où figurent les visages des gens qu’il aime : famille, amis, idoles. Une manière de dire que tout est lié, que notre identité se tisse à travers les liens que l’on entretient avec les autres.
Musicalement, « La Fresque » marque aussi une évolution. La collaboration avec de nouveaux arrangeurs donne au disque une ampleur inédite, sans trahir l’élégance discrète qui caractérise la musique de Delerm depuis ses débuts. On pense parfois à Rufus Wainwright ou Divine Comedy, pour cette capacité à mêler pop orchestrale et écriture personnelle.
La voix de Delerm, plus posée, plus incarnée, traverse les morceaux avec douceur et précision. Elle s’entoure parfois de chœurs discrets, comme des échos intimes qui renforcent l’impression de proximité.
« La Fresque » est un disque cohérent, touchant, où Vincent Delerm poursuit son travail d’orfèvre de l’intime. Sans révolutionner sa formule, il en approfondit les contours, y ajoute de nouvelles teintes, un peu plus de gravité parfois, mais toujours cette attention aux détails, ce regard tendre sur le monde.
Il présentera ce nouvel album sur scène à l’automne 2025, avec notamment deux séries de concerts à La Cigale, du 21 au 25 octobre puis du 18 au 22 novembre. Une nouvelle occasion de retrouver cette voix singulière, à la croisée de la chanson, du cinéma et du récit.
Victor Hache
- Album « La Fresque », Vincent Delerm. Tôt ou Tard.