le voyage en pyjama
"Le Voyage en pyjama" : Victor (Alexandre Lafaurie) décide de partir sur les routes de France pour revoir certaines de ses ex (©Numéro-7/Les Films Français/StudioCanal).

Sortie cinéma. Depuis un demi-siècle, aller voir un film de Pascal Thomas a le charme désuet d’une incursion nostalgique dans le passé. C’est exactement ce qui arrive au personnage principal de son dernier film, « LE VOYAGE EN PYJAMA » (ce mercredi 17 janvier sur les écrans), un enseignant qui décide de faire le tour des lieux de son passé pour y revoir ses anciennes compagnes.


« Le Voyage en pyjama » : un film de Pascal Thomas résolument joyeux, intimiste et badin, superficiel mais finalement sérieux dans sa vision des choses, des gens, de la vie


Victor (Alexandre Lafaurie), la quarantaine, professeur de lettres en congé sabbatique dans la région d’Angers et prévisionniste météo amateur, est un feu-follet un peu fantasque, un dilettante sympathique, qui se laisse vivre au gré du vent, aux côtés de sa compagne depuis 15 ans, Anne (Barbara Schulz), qui commence à s’en lasser.

Carte du Tendre

La suite, c’est Pascal Thomas qui la raconte: « Au petit matin, ce professeur est sorti de son lit par sa femme, pour qu’il l’accompagne à l’aéroport. N’ayant pas le temps de s’habiller, il enfile un imperméable sur son pyjama. Au bar de l’aéroport, il s’aperçoit que son épouse s’est envolée avec les clefs de la voiture et de la maison. Une rencontre, faite dans ce bar, va l’entraîner à effectuer une promenade dans cette région qu’il a parcourue dans sa jeunesse pour revoir ses anciennes petites amies. Une façon pour lui de redessiner sa «carte du Tendre» ».

Il rencontre en effet à l’aéroport une jeune femme, Sofia (Anouchka Delon), qui l’entraîne avec elle dans un voyage à vélo vers Compostelle. Mais très vite le versatile Victor pose sa bicyclette pour prendre le train et changer de direction. C’est aussi en scooter, en bateau sur les canaux ou à pied sur les chemins qu’il va continuer son périple, revoir ses ex et faire de nouvelles rencontres…

Petite musique bien à lui

Personnages, dialogues, situations: de ce film, qui prend la forme d’une chronique sentimentale passéiste, à la fois romantique et burlesque, se dégage la légèreté et l’optimisme de Pascal Thomas, sa petite musique bien à lui dans le cinéma français. Le réalisateur y filme le charme des villes de province, leurs ruelles pavées, leurs auberges et restaurants, leurs églises, leur calme et leur douceur de vivre.



Et surtout ça fourmille de personnages dans des petits rôles, comme dans la majorité de ses films: comme pour Claude Lelouch, de nombreux acteurs et actrices ont défilé devant sa caméra depuis un demi-siècle. « Depuis que je fais du cinéma, j’aime mettre du monde à l’écran », dit-il. « Ça offre une liberté folle pour écrire une histoire: on peut passer d’un caractère à l’autre, entrecroiser les histoires, les faire rebondir et créer ainsi constamment la surprise ».

Pierre Arditi et Anny Duperey savoureux

Ici Pierre Arditi et Anny Duperey dans des rôles savoureux, Barbara Schulz, Anouchka Delon, Louis-Do de Lencquesaing, Irène Jacob, Hippolyte Girardot, Christian Vadim viennent donner la réplique à Alexandre Lafaurie, acteur peu connu mais qui ne manque pas de charme et dont c’est le 7e film avec Pascal Thomas depuis 2000.

Ce VOYAGE EN PYJAMA est le 20e film du réalisateur depuis LES ZOZOS en 1972. Les couples, les maris et épouses, les amants et maîtresses, les familles nombreuses, les adolescents et les femmes ont été ses sujets d’intérêt dans ces films marqués par le marivaudage, les rencontres improbables, les imprévus du quotidien, la fantaisie, le romantisme et l’humour –dans notamment CELLES QU’ON N’A PAS EUES (1981), LES MARIS, LES FEMMES, LES AMANTS (1989), LA DILETTANTE (1999), le délicieux MERCREDI, FOLLE JOURNÉE! (2001), LE GRAND APPARTEMENT (2006).

Invitation à la désinvolture

Le titre du film lui-même est une invitation à la désinvolture et s’explique par le début de l’histoire, quand Victor se retrouve dehors en pyjama. « Le pyjama c’est l’uniforme de la grasse matinée. Et la vie doit être une longue grasse matinée », dit-il un peu plus tard dans le film.

Pascal Thomas, lui, ajoute une autre explication: « J’aime bien les pyjamas: pas tant pour leur confort que parce qu’ils sont depuis longtemps passés de mode et que cela m’enchante. Je ne suis peut-être pas dans le vent: j’aime ce qui est un peu désuet, un peu suranné ».

Péché mignon du réalisateur, le film est truffé de réflexions littéraires (et météorologiques) et de citations: Anny Duperey qui cite Jorge Luis Borges (« Le tango c’est une pensée triste qui se danse ») ou Auguste Renoir (« Il faut se laisser porter comme un bouchon à la surface de la rivière »), ou Alexandre Lafaurie qui dit, méfiant à l’égard des médecins: « Si je meurs, je n’en ferai pas une maladie ».


  • LE VOYAGE EN PYJAMA est inégal, avec des baisses de rythme et d’intérêt parfois

Des hauts et des bas

La carrière de Pascal Thomas a connu des hauts et des bas, et l’on espère que ce VOYAGE EN PYJAMA connaîtra un sort plus glorieux que son précédent film, À CAUSE DES FILLES…?, sorti en janvier 2019, qui a été un vrai flop (moins de 19.000 entrées) et n’est resté que deux semaines à l’affiche malgré une distribution étonnante (José Garcia, Barbara Schulz, Pierre Richard, Rossy de Palma, François Morel, Audrey Fleurot, Christian Vadim, Frédéric Beigbeder, Marie-Josée Croze, Irène Jacob, Laurent Lucas, Alexandra Stewart, Christian Morin, Louis-Do de Lencquesaing, Bernard Ménez…).



Comme tous ses films, LE VOYAGE EN PYJAMA est inégal, avec des baisses de rythme et d’intérêt parfois. Mais cela reste un film de Pascal Thomas, un vagabondage léger, une comédie agréable et atypique. Car « La comédie est son affaire », comme le titrait la rétrospective qui lui a été consacrée à la Cinémathèque en octobre 2023.

Résolument joyeux

Et si le film n’est certes pas un chef d’œuvre, il se veut résolument joyeux, intimiste et badin, superficiel mais finalement sérieux dans sa vision des choses, des gens, de la vie. Un film que le réalisateur résume parfaitement lui-même: « LE VOYAGE EN PYJAMA exhale plus le goût de vivre que la jérémiade, la pleurnicherie, la morosité et la tristesse, et il exalte plus le rire, la beauté des corps et la splendeur de la campagne française qu’il ne reflète la grisaille et l’individualisme de notre époque ».

Jean-Michel Comte

LA PHRASE : « Je me suis toujours demandé si la bouche est plus jolie quand elle dit oui ou quand elle dit non » (Alexandre Lafaurie).


  • A voir :« LE VOYAGE EN PYJAMA » (France, 1h29). Réalisation: Pascal Thomas; Avec Alexandre Lafaurie, Constance Labbé, Barbara Schulz (Sortie 17 janvier 2024)

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