l'innocence
"L'Innocence" : Le jeune Minato (Soya Kurokawa, à droite) a noué un fort lien d'amitié avec son camarade de classe Yori (Hinata Hiiragi) (©Monster Film Committee/Le Pacte)

Sortie cinéma/« L’Innocence ». On croit qu’il s’agit d’une histoire de harcèlement scolaire dans une école du Japon, mais c’est plus compliqué que cela. « L’INNOCENCE » (ce mercredi 27 décembre sur les écrans) est un film riche qui a valu à sa construction et à son récit le Prix du scénario au dernier Festival de Cannes.


« L’INNOCENCE » : un film à la fois simple et touffu, remarquablement intelligent


En classe de CM2, le jeune Minato (Soya Kurokawa) a un comportement de plus en plus préoccupant, à la fois à l’école et chez lui. Sa mère, Saori (Sakura Andô), qui travaille dans une blanchisserie, l’élève seule depuis la mort de son mari.

Face à un mur

Elle s’inquiète des sautes d’humeur de son fils, qui lui raconte que son instituteur le harcèle et lui aurait notamment dit que son cerveau avait été remplacé par celui d’un porc. Elle demande des explications à la directrice de l’école, à ses adjoints et à l’instituteur, mais se heurte à un mur d’incompréhension. « Est-ce que je parle à des êtres humains? », les accuse-t-elle.

L’instituteur va timidement reconnaître avoir brutalisé Minato, mais il accuse celui-ci de comportement violent dans la classe, de harcèlement à l’encontre de ses camarades et de possession d’un couteau. Qui est responsable de cette situation tendue entre le maître et l’élève? Pas si simple…

Palme d’or en 2018

Comme dans la plupart de ses précédents films, le réalisateur Hirokazu Kore-eda s’intéresse ici aux enfants et à leurs relations avec les adultes, dans le cadre de la famille, de l’école, de la société. C’est l’un des cinéastes japonais actuels les plus connus, notamment grâce au Festival de Cannes qui a présenté nombre de ses films en compétition comme NOBODY KNOWS (2004), TEL PÈRE TEL FILS (Prix du Jury en 2013), NOTRE PETITE SOEUR (2015), LES BONNES ÉTOILES (2022) et surtout UNE AFFAIRE DE FAMILLE, Palme d’or en 2018.

Pour L’INNOCENCE, il a collaboré pour la première fois avec le scénariste Yuji Sakamoto, qui s’est inspiré d’une histoire vraie: « Il s’agit d’un incident survenu dans une petite école, au fin fond du Japon, qui concerne des enfants, et des petites étincelles qui creusent un gouffre immense entre les habitants de la région », explique-t-il.

Trois parties

« L’INNOCENCE » est une suite de récits qui se contredisent et apportent à chaque fois des éléments nouveaux. Il comporte trois parties, dans lesquelles on voit successivement le point de vue de la mère, puis celui de l’instituteur, puis celui du jeune garçon. Avec des retours en arrière et des mêmes scènes vues sous un angle différent.



D’abord on assiste à la confrontation entre l’énergie de cette mère célibataire et la langue de bois du corps enseignant. Puis on comprend mieux la vision des choses de l’instituteur. Et enfin on découvre le petit secret du gamin et son amitié très forte avec un de ses camarades de classe –une dernière partie qui fait la force émotionnelle du film.

Remarquablement intelligent

Le film est à la fois simple et touffu, remarquablement intelligent, et vire même peu à peu au thriller à suspense. Il y a des incendies mystérieux et des glissements de terrain, des rumeurs qui courent (et pas seulement sur les réseaux sociaux) sur l’instituteur qui fréquenterait les bars à hôtesses, sur la directrice qui aurait menti pour protéger son mari après un accident. Il y a la cruauté collective des enfants à l’école, il y a les rigidités de la société japonaise…

En anglais, le titre du film est MONSTER« C’est qui le monstre? », chantent à la fin Minato et son copain Yori, résumant l’ambiguïté de l’histoire. Les deux enfants (ici à Cannes avec le réalisateur) sont remarquables. Tout comme l’interprète de la mère, Sakura Andô, dans ce film d’une subtilité évidente, qui émeut autant qu’il fait réfléchir.

Jean-Michel Comte

LA PHRASE : « Ce qui s’est réellement passé n’a aucune importance » (la directrice d’école à l’instituteur, en préparant sa défense).


  • A voir : « L’INNOCENCE » (« Kaibutsu »/ »Monster ») (Japon, 2h04). Réalisation: Hirokazu Kore-eda. Avec Sakura Andô, Eita Nagayama, Soya Kurokawa (Sortie 27 décembre 2023)

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