collection emil bürhle
Amedeo Modigliani Nu couché ,1916 huile sur toile. Collection Emil Bürhle.

#Exposition. Attention les yeux ! Le Musée Maillol, à Paris, accueille pour la première fois en France 57 chefs-d’oeuvre issus d’une des collections les plus prestigieuses au monde : celle du Suisse-Allemand Emil Bührle. Manet, Monet, Van Gogh, Gauguin, Cézanne, Lautrec, Bonnard, Vuillard, Modigliani, Picasso, Braque, Derain… pas un maître ne manque à l’appel ! Un ensemble exceptionnel à découvrir jusqu’au 21 juillet.

Grand amateur d’impressionnisme, Emil Bürhle a tout au long de sa vie, eu à cœur de rassembler les grands noms de ce courant pictural. En témoigne sa prestigieuse collection présentée par le Musée Maillol, à Paris. 

En attendant son emménagement dans la nouvelle extension du Kunsthaus de Zurich, la collection Emil Bührle s’offre une tournée internationale. Après la Suisse en 2017 et le Japon en 2018, la France a l’honneur d’accueillir 57 des 630 chefs-d’oeuvre rassemblés entre 1936 et 1956. Impossible cependant d’apprécier cet ensemble exceptionnel présenté au Musée Maillol jusqu’au 21 juillet, sans se pencher sur le collectionneur iconoclaste qui se cache derrière ces toiles de maître. Né en Allemagne en 1890 et naturalisé Suisse en 1937, Emil Bürhle a fait fortune pendant la seconde guerre mondiale en vendant des armes et munitions à l’armée allemande. Dire qu’il est “controversé” relève de l’euphémisme. Les Alliés l’ont d’ailleurs fait figurer sur leur “liste noire” en 1945. S’il est difficile d’occulter ce passé obscur, on ne peut, en revanche, remettre en cause sa bonne foi dans le domaine de l’art, y compris durant les pages les plus sombres de l’Histoire : à la fin de la guerre, Emil Bührle découvre que 13 de ses œuvres achetées en toute confiance à des marchands d’art ont été spoliées par les Nazis. A aucun moment pourtant, il ne proteste. Cet amateur respecte trop la peinture pour se l’accaparer. Il les restitue donc avec une idée en tête : les racheter. “Neuf d’entre elles retourneront dans sa collection après un second rachat, entre 1948 et 1951”, précise Lukas Gloor, commissaire de l’exposition. Le musée Maillol propose aujourd’hui d’en découvrir quatre : “La liseuse” (Corot), “Avant de départ” (Degas), “Danseuses” (Degas) et  “L’été à Bougival” (Sisley).

Tout au long de sa vie, cet amateur d’impressionnisme a eu à cœur de rassembler les grands noms de ce courant pictural. Mais son génie réside dans le fait d’avoir su les resituer dans leur contexte historique. Son ensemble englobe les toiles de peintres précurseurs (Cuyp, Delacroix, Guardi,…), mais aussi et surtout celles des héritiers de Monet et consorts (Cézanne, Van Gogh, Gauguin, Les Nabis,…). “Le collectionneur se caractérise par la qualité de son choix et par la réunion judicieuse des œuvres d’art”, justifie-t-il le 14 juin 1954, lors d’un discours à l’université de Zurich.

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Vincent van Gogh – Les Ponts d’Asnières, 1887 huile sur toile. Collection Emil Bürhle

Il aurait pu s’arrêter là ; circonscrire le noyau de sa collection à ces quelques maîtres sans que personne ne trouve rien à y redire. C’est mal connaître l’homme qui voit dans la peinture du début du 20ème siècle un héritage du post-impressionnisme. A la fin de sa vie, sa collection s’est donc enrichie des chefs de fil de l’art moderne parmi lesquels Picasso, Braque et Derain. “Longtemps, Picasso n’a pas eu sa place dans la collection de Bührle, raconte Lukas Gloor. Tout a changé en 1953, après la visite d’une exposition à Milan au retentissement énorme. A partir de là, il a compris qu’il ne pouvait plus se passer de ce peintre en pleine ascension. Il a acheté deux de ses toiles (présentées au musée Maillol) : “L’ItaliennepuisNature morte avec fleurs et citrons”, oeuvre la plus récente de sa collection.

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Vincent van Gogh – Branches de marronniers en fleur 1890, huile sur toile. Collection Emil Bûrhle

Passionné, Bührle l’est assurément. Mais en collectionneur avisé, il comprend que pour apprécier la trajectoire d’un artiste, il faut posséder les œuvres qui l’ont façonné avant de se transformer en maître. “Emil Bührle s’intéresse à la musique de chambre comme à la grande symphonie !”, plaisante Lukas Gloor. Ses chefs-d’oeuvre côtoient donc des toiles moins emblématiques qui racontent notamment les débuts de Van Gogh et de Cézanne (artiste que Bührle considérait comme “le plus important”). Collectionneur insatiable, il s’est employé à rassembler tous les sujets qui ont occupé ses peintres fétiches. De Degas par exemple, il possède un portrait (“La Petite Irène”), des  ballerines (“Danseuses au foyer”), une scène de courses hippique (“Avant le départ”) et, beaucoup plus original pour cet artiste qui ne peignait que des scènes d’intérieur, une toile représentant un père posant avec ses enfants devant leur maison (“Ludovic Lepic et ses filles”). “Dans ce tableau, Degas s’essaie aux reflets du soleil et distingue des parties totalement abouties comme le visage de la jeune fille du reste qui demeure imprécis. Rien d’étonnant donc à ce qu’Emile Bührle ait souhaité acquérir cette oeuvre singulière”, commente le commissaire de l’exposition.

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Claude Monet, Champ de coquelicots près de Vétheuil.

Bührle est décédé brutalement en 1956 d’une crise cardiaque, juste avant d’avoir pu réviser l’ensemble de sa collection. Qu’aurait-il gardé, qu’aurait-il vendu, qu’aurait-il acheté ? Sa réponse l’a accompagné dans sa tombe. Lukas Gloor a néanmoins sa petite idée. “Il aurait sans doute enrichi sa collection d’autres Picasso, mais il avait ses limites. Emile Bührle allait vers le cubisme, laissant le surréalisme à part. Je pense par ailleurs qu’il aurait acquis de nouvelles toiles de maîtres du 19ème”, conclut ce spécialiste avant de reconnaître qu’il ne s’agit évidemment que de pures supputations !

 

 

 

 

 

 

 

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