Exposition. À l’occasion du 250e anniversaire de la mort du peintre François Boucher (1703-1770), le Musée Cognacq-Jay à Paris explore le thème de l’Amour au siècle des Lumières. Intitulée «L’empire des sens», l’exposition témoigne de l’histoire du désir, des premiers émois à l’assouvissement des passions, au travers d’une centaine d’œuvres les plus audacieuses de Boucher, mais aussi de Watteau, Pater, Greuze ou Fragonard. Des tableaux et dessins libertins provenant de prestigieuses collections internationales, pour certains présentés pour la première fois en France.
Le 18ème siècle est celui du plaisir des sens. L’exposition « L’empire des sens » décline ainsi le temps des gestes amoureux, celui du plaisir charnel et démontre magistralement qu’en peinture, tout est permis, comme en littérature…
Le Musée Cognacq-Jay rouvre ses portes et donne aux visiteurs l’occasion de (re)découvrir les œuvres libertines du 18ème siècle à l’occasion d’une exposition baptisée «L’Empire des sens». De François Boucher (1703-1770) à Jean-Baptiste Greuze (1725-1805), l’art «libertin» est foisonnant. La Commissaire, directrice du musée, Annick Lemoine, assistée de Sixtine de Saint-Léger, a rassemblé des tableaux signés Fragonard, Greuze, Boucher, Watteau et beaucoup d’autres, qui donnent une certaine idée de l’érotisme au temps du roi Louis XV dit le «Bien Aimé» (1710-1774).
L’exposition nous «embarque pour Cythère», l’île de l’Amour au temps des Grecs, titre d’un célèbre tableau de Boucher, au travers d’une centaine de peintures provenant pour certaines de particuliers ou prêtées comme «Hercule et Omphale» par le Musée Pouchkine de Moscou…. Des tableaux, des estampes, des objets de curiosité, qui traitent du désir et de ce qui le suscite. Des chefs-d’œuvre pour certains présentés pour la première fois en France.
Le 18ème siècle est celui du plaisir des sens. Les guerres sont terminées, pour un temps. C’est un peu l’équivalent des «années folles» qui suivirent 1918. Les romanciers, les auteurs dramatiques, les artistes peintres investissent le thème de la passion amoureuse. Les alcôves où s’égarent «le corps et l’esprit», les boudoirs, les scènes bucoliques, sont peints avec force détails. Figure centrale de ce mouvement, François Boucher est l’auteur d’œuvres à la charge érotique saisissante. Chez lui, la femme s’abandonne, lascive et consentante.
L’exposition décline ainsi le temps des gestes amoureux, celui du plaisir jusqu’à l’assouvissement des passions et démontre magistralement qu’en peinture, tout est permis, comme en littérature. Pourtant, au-delà du plaisir charnel et de l’amour consenti, quelques toiles font état de l’amour non voulu. Deux peintures «La Belle cuisinière» de Boucher et «La Cruche cassée» de Greuze invitent à réfléchir sur la violence du désir. La toute jeune fille désemparée peinte par ce dernier, qui serre sur son ventre ses jupes, son gilet déchiré, sa poitrine dénudée, garde ainsi les traces de l’amour non désiré, ni accepté.
Le parcours sur huit salles s’achève par la découverte d’un cabinet d’érotica du siècle des Lumières. Une collection secrète d’estampes, de miniatures, de boîtes, à caractère pornographique dévoilant l’imaginaire érotique, décline les mille et un égarements de la passion. Leur production était clandestine, elles ont été souvent détruites et ce qu’il en reste est particulièrement rare.
Quelques années plus tard, le temps de la légèreté est passé et a laissé place à la pudibonderie. Aussi aujourd’hui, on s’étonne que l’affiche de cette magnifique exposition – «l’Odalisque brune» de Boucher – ne montre que les jambes de la jeune femme allongée sur le ventre, alors que la peinture la représente en entier, mutine et coquine, offrant aux regards ses fesses roses et rebondies. «Cachez ce « fessier » que je ne saurais voir» aurait pu dire Tartuffe. Et pourtant, comme l’indique la Commissaire et Mickaël Szanto dans le catalogue de l’exposition : «Le tableau est une invitation aux plaisirs des sens et un hymne à la délectation du regard… Tout y est désordre et beauté, luxe, couleurs et volupté. Rarement peintre n’aura osé une telle licence.»
Jane Hoffmann
- Exposition : «L’Empire des sens» au Musée Cognacq-Jay – 8 rue Elzévir Paris 3ème – Tél. 01 40 27 07 21 – de 10 :00 à 18 :00 jusqu’au 18 juillet, ouvert mercredi 14 juillet.