pablo neruda
Pablo Nureda en train d'écrire, chez lui

Livre. Quand il assiste à l’emprisonnement dans des camps de concentration français de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, le poète Chilien Pablo Neruda doit agir. Le Winnipeg, un cargo des mers oublié, reprend du service et, en 1939, devient le bateau de la solidarité internationale, emportant à son bord ces naufragés vers une terre d’accueil et d’asile. Une aventure humaine qui résonne avec notre actualité, dont témoigne « Pablo Neruda. Non à l’humanité naufragée » de Bruno Doucey

Face à la détresse et à l’injustice humaine, Pablo Neruda veut, doit agir. Il sort des limbes obscures un cargo oublié, le Winnipeg, il sera le bateau de la solidarité internationale

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Pablo Nureda en train d’écriture, chez lui

La lecture commence en 1949. Pablo Neruda chemine sur les sentiers de contrebande dans la cordillère des Andes. Aux côtés de ses camarades, il quitte le Chili son pays de naissance, pour l’Argentine et si tout se passe sans encombres, pour l’Europe et l’Union soviétique. Avec l’arrivée au pouvoir en 1946 du dictateur Videla, le poète est en danger: « Videla, un fantoche qui bénéficie du soutien des États-Unis et persécute les communistes. » Dans « Pablo Neruda. Non à l’humanité naufragée », Bruno Doucey s’attache à un épisode particulier vécu par son héros des mots et des rimes, de la musique écrite qui relie silences et fureur du monde. Avec le poète, il raconte l’exil et l’entraide.

« Mes écrits sont une arme que redoute le pouvoir »

Ses compagnons le pressent de connaître l’histoire. Mais de quelle histoire s’agit-il ? Celle d’un sauvetage d’hommes, de femmes et d’enfants, échappés de l’arbitraire et des barbelés, de la faim, du froid, de la peur, de la mort. 26 avril 1937, le bombardement  de la ville de Guernica par la Légion Condor; 19 août 1936, son ami poète Federico Garcia Lorca exécuté sommairement entre Viznar et Alfacar par les milices franquistes, Pablo Neruda a vécu la violence fasciste dans sa  chair. En 1942, un autre poète espagnol aimé, Miguel Hernandez meurt au bagne d’Alicante de tuberculose. Sept ans plus tôt, l’ambassadeur du Chili lui refuse l’exil.

livre pablo neruda non a l'humanite naufrageeAh ! si seulement avec une goutte de poésie ou d’amour, nous pouvions apaiser la haine du monde !

À l’automne 1936, le Chilien s’installe à Paris. Rencontre avec Louis Aragon, Nancy Cunard, Paul Éluard. Dans la veine d’une internationale artistique, ils créent la revue « Les Poètes du monde défendent le peuple espagnol ». Retour dans la cordillère. Réunis autour d’un feu, Neruda entame son récit et le nom de Winnipeg revient sans cesse avec son lot de mystères et d’interrogations. Il poursuit. Février 1939, la Retirada (en castillan, retraite des troupes). Un épisode tragique de l’histoire contemporaine. Plus de 450 000 républicains franchissent la frontière franco-espagnole à la suite de la chute de la Seconde République espagnole. Le général Franco accède au pouvoir.
Les républicains sont considérés par l’Action française comme des « virus et des envahisseurs ». « L’inconnu devient vite un étranger et l’étranger  un indésirable. » En effet, et l’histoire le confirmera, l’autre différent, politiquement, socialement, cultuellement, est source de répression et d’oppression. Une menace à abattre ou pour le moins à rendre invisible. Argelès-sur-Mer, Barcarès, Saint-Cyprien, Septfonds, Gurs, des noms de stations balnéaires, mais où les terrains vagues se transforment en camps de concentration.

« Et je les ai mis sur mon bateau. C’était en plein jour et la France eut cette fois sa robe d’apparat »

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Pablo Neruda

Face à la détresse et à l’injustice humaine, Pablo Neruda veut, doit agir. Il sort des limbes obscures un cargo oublié, le Winnipeg, il sera le bateau de la solidarité internationale. 1939, sur le quai de Gurs, le poète salue ces voyageurs qui vont trouver une terre d’accueil et d’asile au Chili galvanisé par Le Front populaire. Encore une fois, une campagne odieuse éclate, le journal « La Estrella » (une étoile mortifère qui ne brille que par le rejet) titre : « Le bateau rouge : le bateau des pestiférés ». 3 septembre, arrivée à Valparaiso, la vallée du paradis. Mais ce que le poète apprendra en continuant son périple avec ses amis, c’est que leur passeur silencieux avait dix ans quand il embarqua avec sa famille sur le Winnipeg. « Aujourd’hui, dit Jorge, je suis le plus heureux des hommes puisque j’aide celui qui m’a aidé » et les deux hommes partagent un moment de communion unique.

« Le poète n’est pas une pierre éboulée. Il a deux devoir sacrés : partir et revenir »

L’exil est un combat contre les tenants d’un fascisme culturel. Un combat pour rester un homme débout et intègre. Pablo Neruda est de ceux-là. Et son combat résonne encore aujourd’hui à nos oreilles. La poésie survit aux bourreaux et aux dictateurs. Un chant inviolable.

Virginie Gatti
  • Lire: « Pablo Neruda. Non à l’humanité naufragée » de Bruno Doucey. Actes sud junior, 75 pages, 9 euros.

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