alina bronsky publie ma vie n'est pas un roman
La romancière Alina Bronsky, (cc) Christine Fenzl

#LivreJeunesse. Dans « Ma vie n’est pas un roman » de Alina Bronsky, une jeune fille découvre sa vie à l’intérieur d’un ouvrage et son existence en est bouleversée. Avec son amie, elles vont déjouer les règles de l’intrigue. Un roman d’apprentissage pour s’approcher de la fabrique d’un livre.

Sur un style enlevé, teinté d’humour et de douce gravité, Alina Bronsky dans « Ma vie n’est pas un roman« , évoque avec minutie les affres des petits riens qui peuplent le monde des personnes qui ne sont plus des enfants et pas encore adultes

alina bronsky publie ma vie n'est pas un roman« Ma vie n’est pas un roman »
Alina Bronsky, traduit de l’allemand par Véronique Minder
Actes Sud junior, 205 pages, 14,90 euros

C’est l’histoire d’une première fois, entrer dans une libraire, comme on pénètre en terre inconnue, acheter un livre, un objet non identifié. Lorsque la professeure d’allemand de la classe de Kim propose d’assister à une séance de lecture : « Une bibliothèque ! avons -nous gémi en chœur. Pfff ! Pour quoi faire ?  » est la réponse à l’unisson. Mais en écoutant l’auteure Leah Eriksson délivrer les mots de son roman, les Choses que tu ne vis jamais, Kim va faire une expérience qui s’apparente à une sidération, une cristallisation de l’instant vécu. Cette inconnue taciturne devant sa table ne fait rien d’autre que dévoiler à tous les élèves sa propre vie. Ses mots, ses pensées, ses désirs, elle fait parler sa mère avec ses expressions, détaille son régime alimentaire, décrit son appartement, le divorce de ses parents. Tétanisée, elle voudrait s’enfuir, disparaître au plus profond d’elle-même, devenir invisible.

Sur un style enlevé, teinté d’humour et de douce gravité, la romancière Alina Bronsky évoque avec minutie les affres des petits riens qui peuplent le monde des personnes qui ne sont plus des enfants et pas encore adultes, un entre-deux réel avec leurs préoccupations et leurs découvertes. Née en 1978, Alina Bronsky a grandi du côté asiatique de l’Oural. Elle est journaliste et vit à Francfort. La littérature pour jeunesse ne cesse de s’émanciper et passe allègrement des mains des enfants à celles des parents.  « Ma vie n’est pas un roman » est l’envers du décor de l’expression flaubertienne « Madame Bovary, c’est moi  » ; dans le cas présent, l’héroïne se retrouve au sein d’une intrigue, elle qui se croyait unique, là voilà prise pour modèle. C’est par un tiers – l’auteure lisant son livre –  qu’elle voit sa vie se lire devant ses yeux. Et les lecteur.ice.s de rentrer dans un ouvrage en train de se faire. La fabrique d’un roman.

« Leah me volait mon temps, j’en faisais une affaire personnelle. Elle s’emparait de ma vie « , s’insurge Kim. Vampirisée, la jeune fille va harceler Eriksson pour lui faire changer la fin de l’histoire. Non, Jasper, un de ses camarades ne doit pas mourir, elle a charge d’âme et toute sa vie en est bouleversée. Accolée à son amie d’enfance Petrovna, kirghiz par son père, turque par sa mère, un personnage littéraire à part entière fragile et complexe, dotée d’une intelligence hors normes, le duo va tenter de dévier le cours de l’histoire. Pour empêcher que le roman de Leah la regarde comme un miroir grossissant, Kim fait son éducation littéraire auprès de Petrovna, celle-ci  lui réécrit un dénouement.

Au fil des pages alertes, aux dialogues vifs et impertinents, les deux personnages vont vivre une dynamique de changement. Elles vont dire « je  » en dehors de la forme préétablie d’une écriture extérieure. Lire pour se construire, trouver une voix, une singularité. Leur amitié en sera modifiée, mais elles auront été des spécimens d’observation : faire le grand saut, une plongée réversible dans la fiction. D’un quotidien passif – le lycée, les parents, les amis –  elles deviennent actrices de leur devenir. Kim-Petrova, une entité inséparable qui peu à peu va grandir, se séparer et occuper tout l’espace et le territoire romanesques du récit. Une invite aux plus jeunes d’écrire leur vie rêvée.

la romancière alina bronskyAlina Bronsky, la bio:

Née en 1978 à Swerdlowsk, Alina Bronsky a grandi du côté asiatique de l’Oural. Elle est à présent journaliste et vit à Francfort-sur-le-Main. Après Scherbenpark(Kiepenheuer & Witsch, 2008, inédit en français), Cuisine tatare et descendanceest son deuxième roman. Ses deux livres ont été sur la liste du Deutschen Buchpreis et traduits dans plusieurs langues.
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