[Télé/Cinéma]. Les films de Louis Jouvet sont rares à la télévision. Dans « Quai des orfèvres », il tient son meilleur rôle. Il y est un policier désabusé, méthodique, avare de paroles, mais charismatique, père d’un petit garçon qu’il élève seul. Dans l’enquête qu’il doit résoudre, il est partagé entre ces deux fonctions, ce qui ne lui facilite pas la tâche. Ce côté d’un homme déjà très moderne donne au film tout son intérêt. NOTRE AVIS (****). A voir dimanche 25 septembre sur C8 -21:10.
« Quai des Orfèvres » : magistral Louis Jouvet dans son meilleur rôle
L’HISTOIRE
Une jeune chanteuse de music-hall, ambitieuse, dont le nom de scène est Jenny Lamour (Suzy Delair), accepte l’invitation d’un souper chez Georges Brignon (Charles Dullin), très fortuné, qui pourrait faire avancer sa carrière. Son mari, Maurice Martineau (Bernard Blier) pianiste, jaloux, s’y oppose. Elle se rend tout de même chez son futur protecteur. Martineau, se croyant déjà trompé, court chez Brignon et découvre son cadavre. Un inspecteur de police, Antoine (Louis Jouvet) désabusé, méthodique, venu tout spécialement du quai des Orfèvres, va mener l’enquête. Martineau est son principal suspect, ayant auparavant menacé Brignon.
NOTRE AVIS (****)
« Quai des orfèvres » est l’adaptation du roman « Légitime défense » de Stanislas-André Steeman, auteur belge. Le film a gardé tout son intérêt depuis 65 ans et n’a pas vieilli. Il a inspiré nombre de réalisateurs français, en particulier Claude Miller et Olivier Marchal, grâce à un noir et blanc indémodable, à une intrigue serrée et à des suspects avec mobiles mais non coupables.
Dans cette réalisation parfaite d’Henri-Georges Clouzot, les femmes, comme toujours dans son cinéma, ont un rôle aussi important que celui des hommes. Ce sont eux les faire-valoir, Blier ici et même Jouvet, autant préoccupé par son fils seul à la maison, que par son enquête.
Louis Jouvet tient là son meilleur rôle et reste à ce jour un de nos plus grands acteurs. Il avait la voix, le phrasé parfait entre le personnage qu’il interprétait, un flic, et la vision humaine, qui plut beaucoup qui, encore aujourd’hui, en font un modèle du genre. Autant qu’Humphrey Bogart pour les Etats-Unis, il imposa un style : le chapeau, un regard et une décontraction qui ont influencé Godard et Belmondo, Melville et Delon.
Suzy Delair fit beaucoup pour rendre indispensable la parisienne gavroche, hardie, dans beaucoup de films, ceux de René Clément, Claude Autant-Lara, Marcel Carné et même Luchino Visconti… Ici, elle est la chanteuse débutante qui veut arriver, sa gouaille et ses fourrures en plus.
Simone Renant elle, promène sa classe, sa beauté et son chic dans presque tous ses films. Après « Quai des orfèvres », elle fit « Barry » (1949) avec Pierre Fresnay, « La Beauté du diable » (1950) de René Clair, « Les Grandes manœuvres » (1955) avec Gérard Philippe jusqu’à « Germinal » (1963) d’Yves Allégret et « L’Assassinat de Trosky » (1972) de Joseph Losey, avec Alain Delon et Richard Burton, elle n’en finit pas d’illuminer le cinéma français. Dans « Quai des orfèvres », elle est Dora, belle femme énigmatique, amoureuse passionnément de Jenny Lamour.
Jane Hoffmann
- A voir : « Quai des orfèvres » (1947) de Henri-Georges Clouzot avec Louis Jouvet, Suzy Delair, Bernard Blier, Simone Renant, Charles Dullin, musique de Francis Lopez sur C8, dimanche 25 septembre -20:55