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"Un été comme ça" : Pause détente sur le lac pour Eugénie (Laure Giappiconi, à gauche) et Geisha (Aude Mathieu), deux des trois participantes au stage d'été destiné à évoquer leur hypersexualité (©Shellac Films).

Sortie cinéma. Obsessions sexuelles, démon de midi, désir physique omniprésent, recherche permanente du plaisir, besoin de moments de jouissance nombreux et réguliers: cela ne concerne pas que les hommes, les femmes aussi peuvent ressentir ces pulsions irrésistibles. C’est le cas des trois personnages principaux du film « Un été comme ça » du réalisateur québécois Denis Côté, qui sort ce mercredi 27 sur les écrans français.


« Un été comme ça » : hypersexualité et obsessions érotiques au féminin


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« Un été comme ça » : un film du réalisateur québécois Denis Côté – ©Shellac Films

Autrefois on qualifiait ces femmes de « nymphomanes ». Depuis quelques années, la science et la médecine préfèrent parler d' »hypersexualité », qui peut s’appliquer aux hommes comme aux femmes.

Stage de 26 jours

Cela peut se soigner, mais ce n’est pas le but immédiat des trois jeunes femmes qui, dans le film, viennent passer un stage d’été de 26 jours dans une propriété de l’Université de Montréal, une villa au milieu d’un vaste parc avec un lac. « Vous êtes ici de votre plein gré. Vous n’êtes pas ici pour vous faire soigner. Vous n’êtes pas malades », leur dit la directrice du centre en les accueillant. « Voyez cela comme des vacances, dans le grand chaos qu’est probablement votre vie ».

Pendant ces « vacances », les trois jeunes femmes, âgées d’une trentaine d’années, vont être encadrées par une cuisinière, une psychiatre allemande venue pour s’entretenir avec elles, Octavia (Anne Ratte-Polle), et un assistant social algérien de 51 ans, Sami (Samir Guesmi), bienveillant et calme, chargé de leur sécurité et du bon déroulement du stage.



Les trois femmes sont, comme dit l’une d’elles, « des paumées du cul », mais ont des profils et un passé différents.

Geisha

La première, la plus jeune, Gaëlle, qui se fait appeler Geisha (Aude Mathieu), crâne rasé, anneau sur la lèvre inférieure, trois piercings à l’oreille droite, est une fan des sex-toys et trouve normal de multiplier les rapports sexuels avec les hommes, et notamment tarifés. Elle allume Sami dès le premier jour, mais il résiste à ses avances. Du coup, elle va traîner autour d’un terrain de foot où jouent deux équipes, et fait des fellations à la plupart des joueurs derrière les buissons.

Léonie

Il y a aussi la sombre Léonie (Larissa Corriveau) qui, dit-elle, n’éprouve « pas de sentiment » dans son existence. Elle fait régulièrement des cauchemars, raconte avoir été agressée sexuellement par son père de 3 à 13 ans, a eu à 18 ans des rapports sexuels avec 15 hommes en même temps –et a recommencé. Elle explique qu’elle a besoin qu’on éjacule sur son corps. Elle semble la plus fragile des trois.

Eugénie

La troisième, Eugénie (Laure Giappiconi), a le dossier le plus lourd, avec « imagination spectaculaire et pensées intrusives », selon la psy. « J’ai besoin des hommes », dit-elle, avouant coucher notamment avec son dentiste. Elle fait des dessins macabres, est victime d’hallucinations, de crises d’angoisse et de vertiges et a, dit-elle, « des centaines de pensées dégueulasses chaque jour ». Addict aux vidéos pornos, elle se coupe les poils du pubis avant de se masturber sur son lit.

Toutes les trois vont profiter de ces 26 jours pour se reposer, profiter d’un break dans leur existence (90 minutes de téléphone autorisées par jour), faire du cheval et du canoë, manger des huîtres et des homards. Mais aussi raconter leur histoire, explorer leurs malaises sexuels, tenter d’apprivoiser leurs démons intimes. Quand elles en parlent avec Octavia, des larmes coulent discrètement sur leurs joues…

Démons du sexe

Le réalisateur explique avoir voulu décrire, côté féminin, « les démons du sexe, le manque, l’envie, la célébration d’une sexualité décomplexée puis son désabusement, sans jugement, sans fameux message ni conscientisation morale ». Mais, ajoute-t-il, « il n’était pas question non plus de faire l’apologie des «déviances» pour servir un film «cool» ou subversif ».

Dès les premières images, on voit que c’est un film d’auteur, la caméra bouge et les gros plans sur les visages sont fréquents: un film à festivals, comme la plupart des films de Denis Côté, 48 ans, depuis 2005. « UN ÉTÉ COMME ÇA » était en compétition au dernier Festival de Berlin en février dernier.

Sujet difficile mais intéressant

Le film explore un sujet difficile mais intéressant. Il est un peu bavard et traîne parfois en longueur (deux  heures et quart), avec par exemple une interminable séance de bondage avec corde et suspension pour Léonie pendant la journée libre à l’extérieur.



Mais, malgré le sujet délicat, le réalisateur, servi par trois actrices impressionnantes, ne cède pas à la facilité, au voyeurisme ou à l’intellectualisme. Il a pris conseil auprès de nombreuses femmes et explique avoir « délibérément choisi avec mes collaboratrices de ne pas victimiser les personnages, de ne pas parler de maladie, de ne pas faire un film thérapeutique qui cherche ce qui est bien et moins bien pour la santé sexuelle d’une personne ».

« Le film parle avant tout et par-dessus tout d’amour, d’estime de soi et de contact, de ce qui brouille notre nature véritable », conclut-il.

Jean-Michel Comte

LA PHRASE : « Si je veux baiser toute la vie, on s’en fout, non? Ça ne fait de mal à personne » (Geisha).


  • A voir : « Un été comme ça « (Canada, 2h17) Réalisation: Denis Côté. Avec Larissa Corriveau, Aude Mathieu, Laure Giappiconi (Sortie 27 juillet 2022)

cinégong logoRetrouvez cette chronique ainsi que l’ensemble des sorties cinéma de Jean-Michel Comte sur le site Cinégong


 

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