Avignon In : « Hécube, pas Hécube » : la tragédie de la mère et l’enfant

Avignon In. Hécube est une tragédie grecque d’Euripide créée en 424 avant Jésus Christ. Hécube est la femme de Priam, roi de Troie. Après la victoire des grecs d’Agammemnon,  elle devient leur esclave. Son fils est assassiné alors qu’il avait été confié à son oncle, Polymestor roi des Thraces. Hécube réclame justice. Cette tragédie sert de point de départ à « Hécube, pas Hécube », le spectacle du directeur du festival d’Avignon Tiago Rodrigues, qu’il a monté avec des acteurs de la Comédie Française. Il l’a présenté dans le magnifique site de la Carrière Boulbon et a pu être admiré par 16 000 spectateurs, la pièce la plus regardée du In cette année.

Avignon In : « Hécube, pas Hécube » repose sur une mise en scène très fluide et totalement maîtrisée de Tiago Rodriges qui nous fait changer d’époque avec une incroyable virtuosité 

Il y a dans ce spectacle au moins trois dimensions. D’abord un texte d’Euripide qui a 2500 ans. Puis un groupe de comédiens qui travaille et répète cette pièce. Et enfin une histoire contemporaine, celle d’une des actrices dont le fils autiste a été victime de maltraitance dans un centre spécialisé.

Pour ceux qui l’ignorait, le théâtre est une vieille histoire. Et il est toujours étonnant de retrouver dans des textes aussi anciens des thèmes qu’on a pu retrouver en cours de scolarité dans les œuvres de Racine ou de Corneille. A travers quelques séquences de répétition les acteurs nous rappellent, avec toute la force de leur expression scénique, ce texte impressionnant d’Euripide.

Tiago Rodrigues ajoute une dimension supplémentaire en nous montrant comment des acteurs travaillent sur ce texte et l’interroge en fonction des idées qui sont celles d’aujourd’hui. C’est fait avec beaucoup d’humour et cette distance prise avec l’écrit d’Euripide nous le fait apprécier encore mieux.

Vient ensuite une histoire vécue, un fait divers sur lequel Tiago Rodrigues a fait un vrai travail de recherche documentaire et scientifique. Nadia, l’actrice qui joue Hécube se replonge alors dans son quotidien de mère, révoltée par ce qu’elle découvre que son fils autiste a été victime de maltraitance au centre d’accueil où est pris en charge. Tiago Rodriges nous fait découvrir de façon très éclairante l’interaction entre ce que vit quotidiennement l’actrice et son engagement dans le jeu de comédienne.

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La relation entre l’histoire d’Hécube et ce fait divers contemporain ne paraît pas tout de suite évident. Mais plus on avance dans le spectacle et plus on approche cette relation entre deux drames, ceux d’une mère qui ne comprend pas et n’accepte pas ce qu’on a pu faire subir à son fils.

Tout ce spectacle repose sur une mise en scène très fluide et totalement maîtrisée de Tiago Rodriges qui nous fait changer d’époque avec une incroyable virtuosité. Il peut s’appuyer sur un magnifique groupe d’acteurs de la Comédie Française. Denis Podalydès en Agamemnon chez Euripide et en procureur contemporain est évidemment impressionnant de justesse et de maîtrise. Il n’impose pas sa présence à ses partenaires tous aussi talentueux.

On doit mentionner tout particulièrement l’extraordinaire performance d’Elsa Lepoivre dans le rôle de Nadia et  celle de Loïc Corbery qui est Polymnestor, roi de Thrace chez Euripide et un secrétaire d’Etat dans l’affaire des maltraitances de l’enfant autiste.

Ce spectacle part  maintenant en tournée internationale et il sera présenté plus près de nous à Genève, Toulouse, Antibes, La Rochelle et à la Comédie-Française.

Yves Le Pape

• La tournée d’« Hécube, pas Hécube ». Toutes les informations ICI

• Tiago Rodrigues présente « Hécube, pas Hécube » ICI