Livre. L’Irlando-Américain Colum McCann nous emmène entre Israël et Palestine. C’est « Apeirogon », l’histoire vraie et fictionnée en mille et un fragments, l’histoire de deux pères qui tentent de survivre après la mort de leurs filles. Un roman-fleuve. Un roman vertigineux.
Le roman-fleuve de cette rentrée littéraire d’été 2020. Un texte au long cours- un peu plus de 500 pages, et un titre énigmatique venu du grec, c’est « Apeirogon » de l’Irlando-Américain Colum McCann. Un roman essentiel vertigineux qui a pour théâtre Israël et la Palestine
Le roman-fleuve de cette rentrée littéraire d’été 2020. Un texte au long cours- un peu plus de 500 pages, et un titre énigmatique venu du grec, c’est « Apeirogon » de l’Irlando-Américain Colum McCann. Un roman essentiel qui a pour théâtre Israël et la Palestine.
A 55 ans, McCann trimbale une œuvre aussi dense qu’impeccable avec, entre autres, trois recueils de nouvelles et six romans parmi lesquels « Et que le vaste monde poursuive sa course folle » récompensé par le National Book Award. Résonnant des mots de Jorge Luis Borges (1899- 1986) : « Etre avec toi ou ne pas être avec toi est la mesure de mon temps », « Apeirogon » (qui signifie, en grec, « figure géométrique au nombre infini de côtés ») conte l’histoire de deux pères– précision de McCann : « Les forces motrices qui sont au cœur de ce livre, Bassam Aramin et Rami Elhanan, existent pour de vrai. Par « vrai « , j’entends que leurs histoires- et celles de leurs filles, Abir Aramin et Smadar Elhanan- ont été bien décrites ».
Deux hommes, un Israélien, un Palestinien. L’un et l’autre essaient de survivre après la mort de leurs filles, l’une âgée de 10 ans en 2007 (« La balle qui tua Abir parcourut l’air sur quinze mètres avant de percuter l’arrière de sa tête- broyant les os du crâne comme ceux d’un petit ortolan. Elle était allée à l’épicerie, acheter des bonbons »), l’autre de 13 ans en 1997- tuée dans un attentat-suicide à Jérusalem (« Les articles de presse rapportèrent qu’une fille de quatorze ans avait été tuée dans un attentat-suicide à Jérusalem Ouest. Pour les uns, quatre personnes étaient mortes dans cette attaque. Pour d’autres, cinq. Il y avait deux terroristes d’après certains, trois d’après d’autres. Cinquante-huit blessés, soixante-dix sept, cent vingts. Les terroristes s’étaient habillés en juifs orthodoxes. C’était une faction du Hamas… »).
Bien sûr, Bassam Aramin et Rami Elhanan sont dévorés par le chagrin, le deuil, les souvenirs. Mais l’un comme l’autre, l’un avec l’autre, ils vont ensemble créer l’association « Combattants for Peace ». Les deux hommes existent, l’auteur les a rencontrés lors d’un séjour en Israël, leur a demandé l’autorisation de rapporter leur histoire tout en leur assurant qu’il ne leur garantissait pas la fidélité aux événements. Mieux : avec cette belle histoire rapportée en mille et un fragments (s’inspirant là des contes des « Mille et Une Nuits »), McCann a poussé au plus loin l’expérience littéraire, se référant au titre « Apeirogon », cette fameuse figure géométrique au nombre infini de côtés. Un roman vertigineux …
Serge Bressan
- À lire : « Apeirogon » de Colum McCann. Traduit par Clément Baude. Belfond, 514 pages, 23 €.
L’auteur
Né le 28 février 1965 à Dublin, Colum McCann vit depuis le milieu des années 1980 à New York. Lauréat des prestigieux prix de littérature irlandaise Hennessy (1992) et Rooney (1994) pour ses nouvelles, il est l’auteur de trois recueils (« La Rivière de l’exil »– 1994, « Ailleurs, en ce pays »– 2000, et « Treize façons de voir »– 2015) et de sept romans : « Le Chant du coyote » (1996), « Les Saisons de la nuit » (1998), » Danseur » (2003), « Zoli » (2006), « Et que le vaste monde poursuive sa course folle »- 2009, prix littéraire du Festival du cinéma américain de Deauville, élu Meilleur Livre de l’Année par le magazine « Lire » et lauréat du National Book Award-, « Transatlantic » (2013) et » Apeirogon » (2020) dont les droits pour une adaptation ciné ont été achetés, dès sa sortie outre-Atlantique, par la société de production de Steven Spielberg.
Il est aussi le maître d’œuvre d’« Etre un homme »(2014), qui rassemble 75 textes d’auteurs majeurs de la littérature internationale pour son association Narrative4, et d’un texte à dimension autobiographique, « Lettres à un jeune auteur » (2018). Traduits en 26 langues à travers le monde, tous les livres de Colum McCann sont parus en France chez Belfond et repris, en format poche, chez 10/18.