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Louis Arlette : " "Arbre de vie", c’est moins un refuge qu’une ouverture vers le ciel, une connexion qui, un peu comme un arbre, permet de s’ouvrir au monde" ©Yann_Orhan

Interview. Une voix aux contours romantiques, des textes baudelairiens teintés de spleen et une pop-électro addictive plus lumineuse que dans ses précédents opus…Deux ans après «Des ruines et des poèmes», Louis Arlette est de retour avec un troisième album dansant joliment baptisé «Arbre de vie». Un disque qui marque son ouverture au monde, porté par un single solaire «Blanc et bleu» inspiré d’un voyage en Crète.

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Louis Arlette. ©Yann_Orhan

Il y a quelque chose d’envoûtant dans la musique de Louis Arlette. Un univers qui nous aspire, porté par une énergie aussi mélancolique qu’onirique, menant vers des espaces de rêverie infinie. Deux ans après «Des Ruines et des poèmes», celui qui depuis son premier disque «Sourire carnivore» creuse un sillon singulier dans le paysage des musiques actuelles, revient avec «Arbre de vie». Un album très bien produit, au son pop ample et percutant qu’il a voulu «coloré et vivant», où il se fait plus lyrique et solaire que dans ses précédents opus. Sa voix aux contours romantiques, qu’il a construite comme «on bâti un mur», y résonne en un feu de joie contagieux. Le chanteur se fait ici moins underground et s’ouvre au monde, regard tourné vers le «Blanc et bleu» du ciel, chanson inspirée d’un voyage en Crète, berceau de l’Antiquité qu’il chérit. Un opus lumineux aux textes baudelairiens souvent teintés de spleen, qui permet à Louis Arlette d’aborder une nouvelle page de sa créativité, entre amour, sensualité, promenade solitaire, désirs faits de rage, de vie, de mort. Un souffle nouveau au tempo très dansant mêlé de boucles électros addictives, qui méritait un entretien avec son auteur.


Louis Arlette: « J’ai toujours cherché à exprimer des émotions variées, je n’ai jamais voulu rester cantonné dans un schéma, un style. Je suis content d’avoir réussi avec « Arbre de vie », à trouver le moyen d’exprimer cette insouciance, cet émerveillement. En même temps, dans cet album il n’y a pas que la lumière, il a une part d’ombre aussi »


louis arlette arbre de vieVous avez baptisé votre nouvel album «Arbre de vie». Un titre qui renvoie à quelque chose de mystique et de magique ?

Louis Arlette : Je crois que cet album témoigne d’une vision assez romantique du monde. Il y a un appel à la nature, un retour aux sources. Je l’ai baptisé «Arbre de vie», parce que tous les morceaux du disque forment comme des ramifications, des branches qui renvoient à quelque chose qui aide à grandir. C’est moins un refuge qu’une ouverture vers le ciel, une connexion qui, un peu comme un arbre, permet de s’ouvrir au monde.

Comment expliquez-vous cette volonté d’ouverture au monde de votre part ?

Louis Arlette : Je pense qu’il y a une forme de maturité. On me fait souvent la remarque que cet album est plus léger que les précédents. Personnellement, je ne le vis pas comme une rupture. J’ai toujours cherché à exprimer des émotions variées, je n’ai jamais voulu rester cantonné dans un schéma, un style. Je suis content d’avoir réussi à trouver le moyen d’exprimer cette insouciance, cet émerveillement. En même temps, dans cet album il n’y a pas que la lumière, il a une part d’ombre aussi.

Après «Des ruines et des poèmes», votre précédent opus, vous avez voulu faire une pause et voyager. Un moment important pour trouver l’inspiration ?

Louis Arlette : C’est important de savoir se retirer. Là, en plus il y a eu un double retrait volontaire, puisque j’ai commencé à travailler sur cet album avant le confinement. Mes sources d’inspiration, c’est tout sauf la musique, même si elle fait partie de mon ADN. Cela peut être de la poésie, de la littérature, de l’architecture aussi, à l’image du morceau «Le promeneur», que j’ai composé à la suite d’une promenade au château de Chambord.



Comment est né «Blanc et bleu», un morceau solaire inspiré d’un voyage en Crète…

Louis Arlette : Dans cette chanson, il y a ce fantasme d’une vie un peu rêvée. C’est un morceau qui a quelque chose d’apaisé, même si le texte est construit comme un combat entre le présent et le passé. C’est une utopie, un monde qui n’existe pas, effectivement inspiré de la Crète et de cette passion de l’Antiquité que j’ai, parce que je trouve ça très beau, émouvant. Quand j’étais là-bas, j’étais allé voir évidemment les vestiges de la civilisation antérieure à la Grèce, la civilisation minoenne, du roi Minos. C’est vraiment fascinant. Cette chanson fait écho à «L’invitation au voyage» de Baudelaire, qui m’a bercé. C’est un peu cette lumière-là qu’on retrouve, qui est presque plus triste que ses poèmes tourmentés. On sent bien qu’on n’atteindra jamais ce calme et cette douceur, le spleen étant toujours présent chez lui. A la fin de «Blanc et Bleu», il y a l’idée d’aspiration. Je ne sais pas pourquoi, je suis attirée par ce côté de disparition dans le paysage.

Parlez-nous d’Aragon, qui fait aussi partie de vos références…

Louis Arlette : Quand j’ai lu Aragon, il y a vraiment quelque chose qui s’est passé. Je me suis complètement identifié, j’étais une vraie éponge. Sa musicalité me bouleverse. Il écrit souvent en alexandrins, avec une forme très travaillée et des doubles résonances qui se répondent. Cela rend quelque chose de très chantant, qu’on a envie de mettre en musique immédiatement. «Les yeux d’Elsa», c’est un poème fabuleux d’un point de vue musical.

Vos textes empreints de poésie, sont également très travaillés...

Louis Arlette : Peut-être plus que la musique, que j’ai toujours considérée comme un accompagnement du texte. C’est un peu comme le corps et l’esprit, on a du mal à différencier les deux. Mais, si j’abandonne un morceau, c’est toujours pour la même raison, parce que je ne suis pas content du texte. A l’inverse, si j’ai un texte qui me plaît, je sais que la musique finira toujours par arriver. Ce n’est pas quelque chose qui m’inquiète. La musique c’est presque un jeu, de la peinture sonore en quelque sorte. Les morceaux sont plus up tempo, plus rapides. Je voulais un album qui soit dansant. Cela m’intéresse ce côté paradoxal entre des textes assez littéraires et une musique dynamique.

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Louis Arlette

Vous dites vous sentir souvent en décalage avec la vie. D’où vient ce sentiment ?

Louis Arlette : Je ne sais pas si c’est lié à l’air du temps, parce qu’on est quand même toujours l’enfant de son époque, dans laquelle je me sens bien. Mais, c’est assez proustien comme vision, j’ai toujours le sentiment que vivre les choses ne permet pas d’en prendre pleinement conscience. On se rend compte de ce qu’on a vécu qu’une fois que c’est terminé. Ce sont ces réminiscences dont parle Proust dans «A la recherche du temps perdu », que je ressens fortement. Je ne suis pas du genre à prendre des notes dans mes voyages. Les expériences, il faut que je les revive après coup, pour pouvoir les intégrer, les digérer et avoir le sentiment de les avoir vécues. Je crois que c’est assez universel comme sentiment.

Le disque s’ouvre pas un morceau très fort «La rage», qui semble mettre en scène une étreinte. Que raconte cette chanson ?

Louis Arlette : C’est assez suggestif. C’est un morceau sur le désir physique. La sexualité est un thème que j’ai déjà abordé. Dans mon album précédent «Des ruines et des poèmes », il y avait un morceau «La semence», qui était lié au désir sexuel, dans des ambiances moins apaisées, puisque je comparais les deux corps à des insectes en train de se reproduire. C’était scabreux et en même temps positif, avec un  message d’amour. «La Rage», c’est une chanson sur la violence de la sexualité et du désir. Je pense qu’il y a une part de combat dans l’acte sexuel et dans l’amour en général, une forme de violence.



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Pochette de l’album « Arbre de vie » de Louis Arlette

Comment vivez-vous cette période de confinement, qui empêche toute expression artistique ?

Louis Arlette : Le premier confinement, c’était le moment où j’avais terminé la première phase de l’album, où je travaillais seul. Lorsque devait avoir lieu la phase de l’enregistrement en studio avec les musiciens, on a appris que ça n’allait pas être possible. J’étais inquiet, car je ne voyais pas comment on allait pouvoir travailler à distance. Au final, ça s’est très bien passé. On a pu travailler, chacun chez soi, avec les musiciens de manière synchronisée, avec Dimitri Tikovoi, le réalisateur de l’album, qui était en Angleterre et a géré tout cela par visio grâce à un logiciel spécial. C’était super, on a vécu de très beaux moments, avec une vraie interaction. Ce système a même cassé cette espèce de routine du studio et a été une très bonne chose pour notre créativité à tous. Et on a réussi à avoir un son, dont je suis très content.

Quand pensez-vous revenir sur scène ?

Louis Arlette : La scène me manque énormément. C’est vraiment la lumière au bout du tunnel. J’ai hâte de partager cet album. J’espère qu’on pourra refaire des concerts à l’automne. On ne pourra jamais remplacer ce moment unique, où on est face aux gens.

Entretien réalisé par Victor Hache
  • Album «Arbre de vie» de Louis Arlette – Le Bruit Blanc/Kuroneko

 

 

 

 

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