Interview/Télé. Consacrée à la découverte du patrimoine artistique, culturel et naturel mondial, l’émission quotidienne d’Arte « Invitation au voyage » animée par Linda Lorin depuis quatre ans, s’offre une nouvelle formule en ce début d’année. Au menu, un décor différent, deux nouvelles rubriques et un format plus long pour l’émission qui passe désormais à 45 minutes. De quoi prendre le large et rêver d’ailleurs en ces temps particulièrement anxiogènes. A voir sur Arte du lundi au vendredi à 16:30 et le samedi à 16:20. Rediffusion tous les matins à 8:35.
Linda Lorin : « Je suis une passeuse, le lien entre le sujet et le public. A travers « Invitation au voyage », mon but est de transmettre l’envie que j’ai eu en visionnant le reportage, dont je suis la première spectatrice »
Votre émission « Invitation au voyage » présente depuis le 4 janvier une nouvelle formule, avec un format plus long et de nouvelles rubriques. Dans le paysage actuel de la télévision, qui a trop souvent tendance à réduire la voilure, voire à supprimer des programmes, c’est une bonne nouvelle, non ?
Linda Lorin : Oui, Arte investit ! Contrairement à l’ensemble du PAF la chaîne continue sur sa lancée et mise sur la qualité des programmes… J’ai envie de dire que le bébé grandit, que c’est plutôt une très bonne nouvelle. « Invitation au voyage » a démarré tout petit et progressivement, même si on se situe dans l’après-midi et le matin dans des cases horaires pas forcément mises en avant, on a un public de plus en plus fidèle chaque jour. Et on espère que la nouvelle formule va les fidéliser encore plus. On a eu les sondages hier, nous avons fait 3,9% de parts d’audience, j’espère que cela va continuer sur cette lancée.
Quels sont les principaux changements ?
Linda Lorin : Il y a plusieurs choses, un décor nouveau dans un appartement aux teintes douces, deux nouvelles rubriques, avec une devinette que je pose en début d’émission inspirée d’un numéro précédent, dont on donne la réponse à la fin. Et on a une rubrique pour les gourmands qui s’appelle « Papilles », où chaque jour est présentée une recette traditionnelle différente d’un pays particulier. Le petit plus, c’est qu’il y a des journalistes à travers le monde qui filment les gens sur place dans leur cuisine. On peut voir par exemple à Athènes un architecte passionné de cuisine nous dévoiler les secrets de fabrication d’un plat, le « Kalaktoboureko » (gâteau à la semoule), à Rome quelqu’un qui prépare avec sa grand-mère une tarte à la ricotta et aux griottes, la « crostata di ricotta e visciole ». C’est le côté « chez l’habitant » qu’on met en avant à travers la cuisine de chaque pays. C’est intéressant parce qu’on voit les gens faire leur marché, la façon dont ils préparent les plats.
D’où vient votre curiosité pour la gastronomie locale ?
Linda Lorin : Ce n’est pas nouveau, je suis hyper gourmande! (rires) et on l’est tous dans l’équipe. C’est vraiment l’idée de glisser des plaisirs gustatifs dans les sujets. C’est une manière de voyager différente. Savourer un plat, ça fait partie du voyage. Se balader dans un marché, sentir les épices, c’est formidables. J’adore aller dans les supermarchés pour découvrir des marques différentes, des petits produits qu’on ne trouve pas chez soi. La nourriture est l’une des rares choses où il y a encore une vraie spécificité culturelle. Quand on arrive dans une grande ville, on voit les mêmes magasins de grandes marques de vêtements de prêt-à-porter. Quand est dans un supermarché, il y a évidemment des grandes marques, mais il y a toujours ce petit truc en plus. Je me souviens d’un séjour à Naples, où j’ai vu des rayons entiers de pastas, c’est fou ! (rires). Il n’y avait pas cela encore en France. C’est vraiment une spécificité culturelle qui demeure. C’est intéressant à creuser.
A quoi attribuez-vous le succès de l’émission ?
Linda Lorin : Je crois que les gens ont besoin d’évasion. L’actualité est hyper anxiogène, en particulier durant cette dernière année, et je pense que les mois qui viennent vont être encore compliqués. On est là pour les faire décrocher du quotidien qui est très stressant. C’est souvent les retours que j’ai. Les gens commencent à ne plus suivre les infos. Ils regardent « Invitation au voyage » lors de la rediffusion le matin, pour se réveiller en douceur, pour voir des choses plutôt belles au réveil. L’émission, c’est du dépaysement depuis chez soi, faire découvrir de nouvelles cultures, éveiller avec parcimonie les consciences en étant dans l’ouverture des frontières et des esprits. L’idée, c’est de faire rêver le spectateur quoiqu’il arrive et pour tous, ceux qui ne peuvent pas voyager financièrement ou ceux qui ne le peuvent pas physiquement. C’est de l’évasion sans bouger de chez soi, en étant accessible à tous.
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Les confinements et la crise sanitaire ont-ils eu un impact sur vos programmations ?
Linda Lorin : Avant, il y avait 160 journalistes qui partaient à travers le monde. Maintenant, on fait beaucoup davantage appel à des journalistes qui sont sur place. Je pense à un journaliste qui a été bloqué pendant le confinement, qui s’est installé là-bas et nous fournit tous les sujets de la région. Nous avions des correspondants qui étaient avec nous et qui ont décidé de s’installer à l’étranger. On a des journalistes sur tous les continents.
En tant qu’animatrice, comment définiriez-vous votre rôle ?
Linda Lorin : Je suis une passeuse, le lien entre le sujet et le public, la courroie de transmission. Dans mon passé de journaliste, j’avais le privilège de voir en avant-première des expos, des spectacles, des concerts. J’essayais de transmettre aux gens l’envie de découvrir à leur tour ce qui m’avait intéressé. Là, c’est la même chose. A travers « Invitation au voyage », mon but est de transmettre l’envie que j’ai eu en visionnant le reportage, dont je suis la première spectatrice.
Vous-même, à quand remonte votre passion pour le voyage ?
Linda Lorin : Assez tard, parce je n’avais pas des parents qui voyageaient. C’est venu vers la vingtaine, quand je suis partie de la maison. J’ai fait un an en Angleterre pour mes études de droit. J’étais encore chez ma mère, mais j’avais déjà envie d’aller à l’étranger. Avant d’être journaliste, je faisais un mois de stage et un mois de grands voyages : la Thaïlande, le Vietnam…
Vous êtes plutôt du genre baroudeuse ou hôtels-club?
Linda Lorin : Je suis plutôt baroudeuse, au grand dam de ma famille, parce que je veux tout voir. Je prends un sac à dos et j’essaie de visiter un maximum de choses quand je suis sur un lieu. Je fais un travail d’enquête avant de partir pour découvrir les plus beaux endroits recommandés dans des blogs, des guides. Et surtout, pas d’hôtels-club, ça me déprime. J’essaie de trouver des logements au plus près de l’habitant. C’est ça qui m’intéresse. Avec le bébé qui est né en même temps que « Invitation au voyage », c’est un peu plus compliqué. Mais on a réussi à le trimballer à un an et demi, avec mon grand, en road trip qu’on a fait en Estonie et en Finlande, il y a deux ans.
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Quel est le pays que vous avez trouvé le plus fascinant ?
Linda Lorin : L’Islande et ses paysages extraordinaires très puissants. Ça été une grande claque à laquelle je ne m’attendais pas. On change d’atmosphère tous les quarts d’heure. C’est incroyable ce pays. Je n’y suis restée que cinq jours, j’ai vraiment envie d’y retourner beaucoup plus longtemps.
Ce n’est pas trop frustrant de rester sur le plateau, pendant que les journalistes font le tour du monde ?
Linda Lorin : Hyper frustrant ! (rires). Surtout quand je vois les sujets. Dans quelques semaines on va diffuser un voyage d’un reporter qui a fait la Tanzanie, mais qu’est-ce que c’est beau ! Il a rapporté des images magnifiques, filmé la migration des gnous depuis une montgolfière. J’aurais tellement aimé être là…J’avoue que j’ai été très jalouse de lui ! (rires).
Après le confinement, quelle serait votre prochaine destination ?
Linda Lorin : J’aimerais retourner en Finlande et pour les prochaines vacances d’été si jamais on n’a plus le Covid, j’adorerai aller à Cuba. Ça fait partie de ma liste de voyages.
Avez-vous d’autres projets télé ?
Linda Lorin: Pour le moment je me concentre sur « Invitation a voyage », qui est hyper chronophage. Eventuellement, je pense à une version radio déclinée autour de l’émission et à retrouver les interviews. J’adore poser les questions et j’avoue que cela me manque. Si je devais réfléchir à quelque chose de nouveau, ce serait plus autour de ça.
Entretien réalisé par Victor Hache
- En ligne sur arte.tv : une semaine avant leur diffusion à l’antenne, les épisodes d’Invitation au voyage sont ensuite disponibles pendant soixante jours.
- Retrouvez toutes les destinations de l’émission sur arte.tv/invitationauvoyage, Facebook et Instagram.
J’ai beaucoup de plaisir de regarder l’invitation au voyage. Je suis suisse né aussi le 4 novembre mais en 1955. Bravo pour le ton et le sourire de Linda.