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Les livres de la semaine : la romancière américain Emma Cline publie "L'invitée" © Stephane Mouchmouche / Hans Lucas

Livres We Culte. Pour cette semaine de lecture, trois suggestions. On commence avec la nouvelle prodige des lettres états-uniennes d’Emma Cline, et son deuxième roman « L’invitée » tout en menaces et malfaisance. On enchaîne avec « Petit abécédaire de l’apocalypse heureuse », un bonheur de lecture signé Pascal Fioretto qui, dans un abécédaire déconstruit, chante l’apocalypse heureuse, et on boucle cette semaine de lecture avec Olivier Weber et son impeccable roman biographique « Dans l’œil de l’archange » consacré à Gerda Tardo, l’une des pionnières du photo-reportage. Bonne lecture à toutes et tous !

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Les livres de la semaine : « L’invitée » d’Emma Cline

EMMA CLINE : « L’invitée »

C’est malfaisant. Très menaçant. Du coté de Long Island en fin d’un été, Alex, une jeune femme de 22 ans, n’est pas vraiment la bienvenue. Elle hante toutes les pages de « L’invitée », le nouveau roman de la surdouée auteure américaine Emma Cline. Voilà sept ans, elle avait ébloui le monde des lettres avec « The Girls », énorme succès qui lui valut pour la suite un contrat en millions de dollars. Après deux textes (un docu : « Harvey », et un recueil de nouvelles : « Daddy », 2021 pour la VF), la voilà donc de retour avec un deuxième roman.

Alex habite avec Simon, beaucoup plus âgé qu’elle- lors d’un dîner, elle commet un impair, il l’emmène à la gare et lui paie un billet aller (sans retour) pour New York. Elle ne part pas, reste à Long Island, va dériver à la marge jusqu’à la prochaine fête qu’organise Simon sept jours plus tard.

Errance, rencontres jusqu’au Labor Day… Elle est persuadée que Simon l’attend, qu’il va l’accueillir les bras grand ouverts. En attendant ce retour, loin des villas du bord de mer, Alex va croiser des enfants de riches torturés, une femme de ménage, l’intendant, la nourrice, un serveur… Avec « L’invitée », Emma Cline fréquente des contrées où l’on aperçoit Patricia Highsmith et Marguerite Duras. Ce pourrait être pire !

  • « L’invitée » d’Emma Cline. Traduit par Jean Esch. Quai Voltaire / La Table Ronde, 322 pages, 23 €.

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Les livres de la semaine : Pascal Fioretto : « Petit abécédaire de l’apocalypse heureuse »

PASCAL FIORETTO : « Petit abécédaire de l’apocalypse heureuse »

L’époque est formidable, nous assure-t-on. A preuve : on nous parle de « jardiniers du paysage » et non plus d’agriculteurs et on nous prédit que l’avenir du travail, ce sont les séances de « visio dans le métavers ». Et d’autres élégances du moment ou du futur sont compilées dans « Petit abécédaire de l’apocalypse heureuse », le nouveau livre de l’indispensable Pascal Fioretto.

En voilà un, c’est un décathlonien de la chose écrite- aussi à l’aise dans le pastiche que l’humour, dans la brève ou le texte long… Et, en prime, on tient là avec ce Fioretto un observateur implacable et furieusement de la vie qui va. Avec un bonheur qui mêle pétillance et brillance, il déroule son abécédaire du temps présent. Attention ! tenant.e.s du l’ordre alphabétiques, passez votre chemin.

Avec Pascal Fioretto, c’est délicieusement déstructuré, déconstruit « afin de ne rien céder à l’arbitraire totalitaire et à la violence symbolique de l’ordre alphabétique ». On commence à « S’[e]effondrer », on finit à [S]implifier, auparavant on est passé par « Se retrouver au [d]ésert », « [D]éranger les clous » ou encore « Avoir de bonnes [n]otes »… Halte à la neurasthénie catastrophiste- bien sûr, on est en plein Grand Effondrement mais le Progrès, lui, continue. Et vive Fioretto !

  • « Petit abécédaire de l’apocalypse heureuse » de Pascal Fioretto. Hérodios, 150 p, 20 €.

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Les livres de la semaine : Olivier Weber « Dans l’oeil de l’archange »

OLIVIER WEBER : « Dans l’œil de l’archange »

La guerre civile en Espagne, on est en 1937. Une jeune femme, Gerda Tardo, née Gerda Pohorylle, juive allemande échappée des premières prisons de l’Allemagne nazie et réfugiée en France, va bientôt fêter son 27ème anniversaire. Elle est photo-reportrice, compagne de Robert Capa- un grand du photo-reportage. Elle va mourir, écrasée accidentellement par un char espagnol.

Olivier Weber, lui, a été un des meilleurs reporter de guerre de la presse francophone- il est aujourd’hui écrivain, et il consacre son huitième roman, « Dans l’œil de l’archange », à Gerda Taro. Dans des pages d’élégance, d’une écriture aussi brillante que précise, il raconte les derniers mois de celle qui demeure une des pionnières du photo-reportage.

Journaliste de guerre au Kurdistan ou encore en Afghanistan, Weber nous offre le portrait d’une femme libre, aussi passionnée que passionnante, au talent débordant, au courage immense. Après avoir fui l’Allemagne nazie, elle s’était posée à Paris, y avait côtoyé des intellectuels de gauche parmi lesquels Aragon, Koestler, Nizan ou encore Man Ray. Convaincue que le futur de l’Europe se joue, dans ces années 1930, en Espagne, elle passe les Pyrénées. Pour photographier, pour témoigner. Elle y mourra, écrasée par un char…

  • « Dans l’œil de l’archange » d’Olivier Weber. Calmann-Lévy, 546 pages, 23,90 €.

Serge Bressan

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